Yassine Jaber : de votre propre aveu, la crise est systémique !
©Ici Beyrouth

Ce qui ressort des récentes déclarations du ministre des Finances, Yassine Jaber, c’est sa comparaison de la crise financière libanaise avec celles qu’ont connues plusieurs pays, comme la Grèce, Chypre ou le Portugal. Dans cette comparaison, Yassine Jaber se fourvoie une fois de plus.

En effet, Chypre n’a connu qu’une crise bancaire classique, tandis que la Grèce et le Portugal ont traversé des crises financières centrées sur la dette publique. Par conséquent, aucune de ces crises n’était systémique, alors que le Liban est frappé de plein fouet par une crise systémique, comme l’a si bien reconnu M. Jaber. Une telle crise exige des lois et des mesures exceptionnelles, puisque les entités au cœur du problème ne sont autres que l’État et la Banque du Liban (BDL). Une situation qui s’est ensuite répercutée sur les banques et a provoqué leur crise de liquidité, et non l’inverse.

Tout ce qui est proposé aujourd’hui impose de reporter l’adoption de la loi, afin que des négociations transparentes et constructives puissent avoir lieu. Celles-ci doivent mettre l’État et la BDL devant leurs responsabilités et les obliger à apporter une contribution financière réelle pour restituer les dépôts, tout en évitant toute mesure qui détruirait le secteur bancaire et compromettrait la reprise économique du Liban.

Toute solution à la crise financière doit passer par une reddition des comptes de la part de l’État. L’effondrement systémique du Liban résulte de décennies de mauvaise gestion publique, de politiques financières erronées et d’un usage abusif des ressources publiques, ce qui a fragilisé le secteur bancaire et sapé la confiance des citoyens.

Il incombe donc à l’État une responsabilité juridique et morale afin de recapitaliser la BDL. L’article 113 du Code de la monnaie et du crédit est clair à cet égard, afin de compenser les pertes résultant des politiques financières et monétaires. Ne pas appliquer cette disposition ne ferait que prolonger la crise, aggraver les inégalités et miner davantage la légitimité des institutions.

Les actifs publics représentent une opportunité de restituer les droits des déposants. L’État et la BDL ont la possibilité réelle d’utiliser leurs actifs publics et quasi souverains pour honorer les engagements envers les déposants, dans le respect des cadres légaux et des principes d’équité, afin de restaurer la stabilité financière.

Quant à faire supporter l’intégralité des coûts au secteur bancaire, cela reviendrait à anéantir ses capitaux et entraînerait, de facto, la perte des dépôts. Pourtant, un secteur bancaire sain est un élément essentiel pour la reprise économique du Liban. Un secteur bancaire viable et doté d’une véritable solidité financière est nécessaire pour relancer le cycle économique, créer des emplois et rétablir la confiance.

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