Promotion de haut vol pour une pionnière : la Libanaise Paola Rizk rejoint la Commission du football de base et amateur de la FIFA, avec un mandat clair — élargir la base, structurer la relève et donner de la visibilité au football féminin. Ici Beyrouth a mis ses crampons pour aller à la rencontre de cette jeune dirigeante au dynamisme contagieux.
À Zurich, la nouvelle est tombée comme une ouverture du score à la 5e minute : Paola Pharaon Rizk a été nommée membre de la Commission du football de base et amateur de la FIFA. De Racing Beyrouth aux instances internationales, elle s’est imposée comme l’un des visages de la gouvernance moderne du jeu au pays du Cèdre. Cette promotion intervient dans le cadre de la refonte des commissions permanentes de la FIFA, pensée pour élargir la participation, assurer l’équilibre géographique et renforcer la présence des femmes dans la décision.
De Gemmayzé à Zurich, une trajectoire à contre-courant
Avant de prendre place à la table de la FIFA, Paola Rizk a d’abord déplacé les lignes au Liban. Première femme à présider un club de football dans le pays, elle a dirigé le Racing (Beyrouth) sur deux mandats au cœur de la tourmente — crise économique, pandémie, explosion du port qui a ravagé son quartier et le siège du club. Dans l’adversité, elle a remis de l’ordre, lancé un plan à cinq ans, priorisé la formation et stabilisé l’institution. Son style ? Écoute, collégialité, exigence. « J’aime le sport, j’aime servir, j’aime mon pays. C’est ce qui me fait avancer », s’est-elle confiée à Ici Beyrouth. Avec une conviction forte : faire siéger des femmes là où se prennent les décisions. Sous sa présidence, trois femmes siégeaient au conseil du club.
Jeune maman de trois garçons, elle assume ce tempo XXL sans lâcher son fil conducteur : transmettre. Supportrice de la Seleção en Coupe du monde, elle garde un souvenir impérissable de la finale de la dernière édition, vécue depuis les tribunes : « Cette finale, je l’ai encore dans les yeux. L’intensité, l’émotion… On se rappelle pourquoi on aime ce jeu. »
Cette crédibilité locale a accéléré son entrée aux étages supérieurs. Élue au comité exécutif de la Fédération libanaise de football, récemment nommée responsable du football féminin, elle a porté un discours concret : donner de la visibilité aux joueuses, couvrir les matchs, créer des opportunités et faire émerger des modèles. « Les signaux sont encourageants : on voit des progrès chez les jeunes, plus d’équipes, plus de matchs couverts. Il faut maintenant structurer et durer », glisse-t-elle, citant la qualification historique des U17 libanaises pour le Championnat d’Asie.
Pas un strapontin : un poste-clé
Le grassroots — le football de base — est le nerf de la guerre. C’est là que se gagnent l’adhésion populaire, la santé des championnats amateurs, la détection et la formation des talents : autant de briques sans lesquelles la pyramide s’écroule. Au sein de la Commission, où siègent des profils venus de tous les continents, la Libanaise apporte un vécu rare : gouverner un club dans la crise, bâtir avec peu et faire progresser la place des femmes dans un écosystème parfois rétif au changement. Sa voix comptera pour peser sur les priorités à venir : normes pour les écoles de foot et les académies, accompagnement des fédérations, passerelles entre l’amateurisme et l’élite, structuration des ligues de jeunes, meilleure visibilité médiatique des compétitions féminines et de base. « Le développement commence à la base : former, encadrer, donner des terrains et des matchs aux enfants. C’est là que tout se joue », insiste-t-elle auprès d’Ici Beyrouth.
Liban représenté, horizon élargi
La nomination de Paola Rizk s’inscrit dans une photographie plus large : le Liban renforce sa présence au sein des commissions internationales, signe d’une influence administrative grandissante et d’un casting désormais ouvert aux profils féminins. Pour le pays, c’est une double opportunité : faire remonter au bon niveau les besoins du terrain (infrastructures d’entraînement, formation des éducateurs, arbitrage, sécurité et encadrement des matchs de base) et ramener à Beyrouth des méthodes, standards et outils adaptés aux réalités locales.
Le match qui s’ouvre maintenant
Dans l’immédiat, le plan de jeu est limpide : capitaliser sur la dynamique locale (sélections de jeunes, académies, ligues féminines), outiller les clubs amateurs et mettre l’accent sur la formation, les données et l’encadrement. Sur la durée, l’ambition est plus large : faire du grassroots un escalator inclusif et méritocratique vers l’élite, pour que les joueuses et joueurs du Liban n’aient plus à forcer la porte — elle sera ouverte. « On ne cherche pas l’exploit d’un soir, mais des progrès chaque semaine », résume Paola Rizk.
Pour elle, la montée en gamme internationale n’efface pas l’essentiel : la base. Là où tout commence, là où l’on gagne les matchs qui comptent vraiment — ceux de l’accès, de l’égalité des chances et de la passion. Avec ce cap-là, le nouveau membre libanais de la FIFA ne vient pas seulement représenter : elle vient jouer. Et viser la victoire la plus durable de toutes — élargir la communauté du foot et laisser, au Liban comme ailleurs, des terrains mieux éclairés que ceux qu’elle a trouvés.




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