À l’aube de son 80e anniversaire, une ONU moribonde
©Ici Beyrouth

L’année 2025 marque le 80ᵉ anniversaire de l’entrée en vigueur de la Charte des Nations unies, une célébration au goût amer pour une organisation à bout de souffle. Instituée en 1945 en remplacement de la Société des nations (SDN), l’ONU avait, dès l’origine, pour objectif de maintenir la paix et la sécurité dans le monde.

Un objectif difficile, toujours sur le thème de cette 80ᵉ édition sobrement intitulée «mieux ensemble: 80 ans et plus pour la paix, le développement et les droits de l’homme». Les discussions devraient commencer le 22 septembre avec un programme chargé: guerre en Ukraine, conflit israélo-palestinien, programme nucléaire iranien, sanctions contre la Syrie, inégalités de genre, etc.

Un impact faible

Selon l’article 2 de sa Charte, l’ONU est un acteur de médiation qui doit agir avec neutralité. Un objectif noble mais qui, dans les faits, empêche la résolution de nombreux conflits. Vu le nombre d’États membres aux intérêts divergents, il est quasi impossible de parvenir à des décisions déterminantes.

À cette difficulté s’ajoute le droit de véto des cinq membres permanents du Conseil de sécurité (Chine, France, États-Unis, Royaume-Uni, Russie) qui leur permet de bloquer toute résolution contraire à leurs intérêts. Ce fut le cas lors de la guerre en Syrie où Vladimir Poutine a usé à plusieurs reprises de son véto pour soutenir son allié  Bachar el-Assad.

Depuis 1948, l’ONU dispose également de la force des Casques bleus, censée maintenir la paix. Formée de contingents issus de 121 États membres, elle a été déployée dans plusieurs conflits, comme la guerre de Bosnie-Herzégovine (1992-1995) ou, depuis 1978, à la frontière israélo-libanaise. Une présence censée garantir le maintien de la paix mais qui, dans les faits, n’a empêché ni le massacre de Srebrenica en 1995, ni les affrontements récurrents entre Israël et le Hezbollah.

Au final, la résolution de conflits passe généralement par des négociations directes entre les belligérants ou par l’intervention de puissances internationales comme les États-Unis. Ainsi les chefs de la diplomatie russe et américaine doivent se rencontrer en marge de l’Assemblée générale à New York, signe du manque de confiance dans l’ONU pour régler le conflit en Ukraine.

Un théâtre de représentations et d’affrontements

Si l’ONU ne brille guère par son efficacité dans la résolution de conflits, son Assemblée générale reste un rendez-vous diplomatique incontournable où chefs d’État et ministres se livrent à un véritable ballet de rencontres bilatérales. Elle sert également de tribune pour porter des causes nationales devant la communauté internationale.

Ainsi l’intervention, prévue le 24 septembre, du nouveau président syrien par interim, Ahmad el-Chareh, par laquelle il devrait plaider sa cause, notamment pour demander la levée des sanctions internationales et solliciter de l’aide pour développer le pays. Une intervention symbolique qui consacre la «normalisation» d’un homme longtemps poursuivi pour terrorisme en raison de son implication dans l’État islamique et Al-Qaïda.

Il convient d’ailleurs de noter que l’ONU n’a joué pour ainsi dire aucun rôle dans le renversement-surprise de Bachar al-Assad et la prise de pouvoir d’Ahmad el-Chareh. L’intervention de ce dernier a surtout pour but de s’adresser à la communauté internationale plutôt que de rechercher une collaboration avec l’ONU. De même, les différents massacres sur la côte syrienne contre les druzes n’ont mené à auncune résolution significative sur le terrain.

L’Assemblée devrait également être le théâtre de la reconnaissance de la Palestine par une dizaine de pays, dont la France, le Royaume-Uni et la Belgique. Une reconnaissance avant tout symbolique qui rejoint la résolution non contraignante adoptée le 13 septembre, également à l’ONU, en faveur d’une solution à deux États (Israël et Palestine), portée par la France et l’Arabie saoudite.

Le conflit israélo-palestinien est sans doute l’un des points noirs du bilan de l’ONU ces dernières décennies. Loin d’être résolu, il continue d’occuper le devant de la scène sans sans qu’aucune isse se dessine à l’horizon.

Marquée par une lourdeur administrative et un certain «immobilisme», l’ONU est de plus en plus critiquée. Outre son incapacité à résoudre les conflits, on lui reproche le manque de représentation des pays plus faibles et le monopole du Conseil de sécurité.

Quatre-vingts ans après sa création, l’ONU a plus que jamais besoin de se réformer. À défaut, elle risque de perdre encore davantage de crédibilité et de n’être plus qu’un forum symbolique où se croisent les grandes puissances.

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