Kim Novak, l’étoile libre de Hollywood honorée à Venise
Star planétaire puis disparue des radars, Kim Novak reçoit le Lion d’or à Venise. ©Ici Beyrouth

Actrice mythique des années 1950, Kim Novak recevra en 2025 un Lion d’or d’honneur à la Mostra de Venise. Star de Vertigo, elle incarne l’élégance, la rébellion et la liberté d’une époque désormais légendaire.

Née Marilyn Pauline Novak le 13 février 1933 à Chicago, Kim Novak n’a jamais été une actrice comme les autres. Avec ses traits sculpturaux, son regard mélancolique et une présence énigmatique à l’écran, elle s’impose dès les années 1950 comme l’une des figures majeures du cinéma hollywoodien. Et pourtant, derrière cette ascension fulgurante, se cache une femme profondément libre, rétive aux codes du star-system, dont le parcours, souvent méconnu dans ses choix personnels, force aujourd’hui l’admiration.

C’est par le biais du mannequinat que Kim Novak entre dans l’univers du spectacle. Elle signe en 1954 un contrat avec Columbia Pictures qui voit en elle une nouvelle Rita Hayworth, mais refuse de changer son nom, un premier acte de résistance. Très vite, elle tourne aux côtés des plus grands: William Holden dans Picnic (1955), Frank Sinatra dans The Man with the Golden Arm (1955), Tyrone Power dans The Eddy Duchin Story (1956). Sa beauté glacée fascine, mais c’est son ambivalence qui intrigue. Elle n’est pas simplement la blonde hollywoodienne typique, elle dégage une fragilité, une profondeur, une ambivalence entre apparente douceur et violence intérieure.

Cette dualité trouve son sommet dans Vertigo (Sueurs froides, 1958), chef-d’œuvre d’Alfred Hitchcock, où elle incarne à la fois Madeleine et Judy. Le film, longtemps sous-estimé, est aujourd’hui classé parmi les plus grands de l’histoire du cinéma. Et Kim Novak y livre une performance vertigineuse, littéralement. Son personnage incarne à la fois le fantasme masculin et la victime de ce fantasme, dans une œuvre à la fois esthétique, psychologique et profondément féminine. Sa performance n’est pas seulement mémorable, elle est fondatrice. Elle redéfinit le rôle de la femme dans le cinéma américain, en le faisant passer d’objet à sujet, de muse à tragédienne.

À la fin des années 1950, elle est l’actrice la plus rentable au box-office mondial. Mais cette réussite a un revers. Kim Novak déteste les contraintes imposées par les studios, le contrôle de son image, les rôles stéréotypés de séductrice glaciale qu’on lui assigne. Lassée, elle s’éloigne peu à peu de Hollywood dans les années 1960. Sa filmographie se fait plus rare, plus discrète. Elle refuse plusieurs projets importants, choisissant de préserver sa liberté plutôt que d’alimenter la machine à rêves. En 1991, après le tournage de Liebestraum de Mike Figgis, elle quitte définitivement le cinéma.

Ce retrait s’avérera être une manière de se reconquérir pour se consacrer à ce qu’elle a toujours aimé: la peinture, la poésie et les animaux. Elle s’installe dans l’Oregon avec son mari Robert Malloy, vétérinaire, et y mène une vie paisible et créative, loin des projecteurs. Elle continue d’exposer ses œuvres, d’écrire, de dialoguer avec ceux qui l’admirent, sans jamais céder à la nostalgie ni aux feux artificiels d’un retour forcé. Ce choix de vie lui vaut aujourd’hui un respect immense dans le monde artistique. Elle est devenue, au fil du temps, une figure d’intégrité.

À l’âge de 92 ans, Kim Novak recevra le Lion d’or d’honneur de la Mostra de Venise, qui se tiendra du 27 août au 6 septembre 2025, pour l’ensemble de sa carrière. Cette reconnaissance, saluée par la critique comme longtemps attendue, a été décrite par l’actrice elle-même comme «un rêve devenu réalité». Pour accompagner cette distinction, le festival présentera également la première mondiale du documentaire Kim Novak’s Vertigo, réalisé par Alexandre Philippe, dans lequel elle revient sur sa collaboration avec Hitchcock, les coulisses du film et son rapport à l’image.

La jeune génération ne l’oublie pas. Lors du Met Gala 2025, l’actrice Sydney Sweeney – qui doit l’incarner dans un biopic intitulé Scandalous! – a rendu hommage à son style en adoptant une tenue inspirée de Vertigo. La presse spécialisée, de Vogue à Variety, a salué l’élégance et la justesse de cet hommage. Plus qu’un simple clin d’œil, c’est la preuve que l’empreinte de Kim Novak continue d’inspirer, de traverser les époques, de nourrir les imaginaires.

Kim Novak n’aura jamais cédé à l’illusion de Hollywood. Elle a préféré tracer son propre chemin, entre lumière et silence, entre écran et toile. À l’heure où l’industrie du cinéma se réinvente, son parcours résonne comme une leçon d’indépendance, de pudeur et de force tranquille. Une icône, oui, mais surtout une femme qui a su redevenir elle-même.

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