
À Moulins, le spectacle Murmures de la Cité a suscité de vives réactions en raison de ses soutiens financiers et de sa lecture contestée de l’Histoire de France. Tandis que certains saluent une initiative culturelle locale, d’autres dénoncent une tentative de diffusion d’idéologies conservatrices.
À grands renforts de jeux de lumière et en une heure trente, le spectacle Murmures de la Cité a raconté 2 000 ans d’Histoire vendredi soir à Moulins, dans un contexte polémique, ses opposants y voyant la main de l’extrême droite.
L’événement, dont une représentation a eu lieu vendredi et deux autres sont prévues samedi et dimanche, se présente comme «le plus grand spectacle immersif et historique d’Auvergne».
Sur scène ont défilé les grands personnages avec nombre de références catholiques et 350 figurants, de Vercingétorix à Napoléon, prenant à témoin deux enfants, Géraud et Astrid.
Parmi les 700 spectateurs apprêtés venus assister à cette fresque historique, des jeunes mais aussi des personnes âgées, beaucoup de familles avec enfants.
D’un budget de 170 000 euros, le spectacle a bénéficié de subventions de la Ville, de Moulins communauté, du département et de la région Auvergne-Rhône-Alpes, dirigées par des majorités LR.
Il a aussi été financé par le Fonds du Bien Commun, dont l’un des fondateurs est Pierre-Edouard Stérin, devenu milliardaire avec son entreprise de coffrets cadeaux Smartbox, qui défend des valeurs ultra-conservatrices.
«Lecture de l’Histoire»
«Il faut se réveiller parce que sinon il sera trop tard, si ce n’est pas déjà le cas», souffle Juliette Morin, 65 ans, venue rejoindre sur un rond-point de Moulins quelque 200 opposants, peu avant le spectacle.
«C’est une lecture de l’Histoire très dirigée, très ciblée, avec un fond de divertissement pour faire passer le message de l’extrême droite, le racisme, l’intégrisme», souligne-t-elle.
Maurice Forget, 30 ans, est venu de Vichy, tout près: «on sait ce qu’il s’est passé à Vichy et là ils reviennent nous raconter une fausse histoire de France qui remet en question la laïcité, la résistance, la Révolution. Ça me révolte», dit-il.
«Stérin dégage du bocage», «Stérin miné», pouvait-on lire sur les pancartes des opposants, réunis à l’appel d’associations et de syndicats (FSU, CGT, ATTAC, etc.). Sur une banderole déployée sur le rond-point est écrit «Pas de fonds publics pour l’extrême droite, notre histoire n’est pas à vendre».
Tous les spectateurs interrogés par l’AFP avaient connaissance de la polémique entourant l’événement.
«Ridicule» et «hors de propos», s’indigne Aude Bellanger, venue passer «un bon moment de détente devant un spectacle familial».
«Opportunité touristique»
Benjamin Sanchez, 35 ans, a invité trois amis à l’accompagner: «il faut être fier de ce qu’on est et ne pas regarder avec les lunettes de 2025 ce qu’il s’est passé il y a 200 ans. L’Histoire est ce qu’elle est, il y a eu des périodes glorieuses, d’autres moins, il faut arrêter de prendre ce qui nous arrange», juge-t-il.
Plus nuancée, Jeanne Chavarot, 25 ans, est venue «admirer le spectacle» car «c’est une belle opportunité touristique pour Moulins» même si elle juge que les opposants «ont raison de sensibiliser sur certains aspects comme l’utilisation des fonds publics et le projet derrière».
Le député communiste de l’Allier Yannick Monnet dénonce lui les liens entre l’association Murmures de la Cité et une autre association nommée Sophia Polis - Communauté et chrétienté qui prévoit «de reconquérir la France en commençant par les villages et les églises».
Et pour l’opposition socialiste à la région, qui réclame le retrait de la subvention, «Les Murmures de la Cité semble s’inscrire dans une stratégie d’implantation d’idées radicales et identitaires en milieu rural».
Si le Fonds du Bien Commun «finance» bien le spectacle, il n’a jamais demandé «de faire passer un message», a réagi un porte-parole de l’association Murmures de la Cité.
«Il y a une grande dissonance entre ce que nous vivons en tant que bénévole et ce que racontent les opposants à ce spectacle qui a pour but de dynamiser un territoire d’un point de vue économique, culturel et touristique», a-t-il ajouté.
Avec AFP
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