Près de 72 heures après le séisme destructeur qui a ravagé le sud de la Turquie et le nord de la Syrie, quatre Libanais ont été extraits vivants de sous les décombres en Turquie. Au Liban, l’attente se fait de plus en plus pénible pour les proches de ceux toujours portés disparus. 

Fatima Zakaria est la quatrième Libanaise à avoir été retrouvée vivante mercredi, selon l’ambassadeur du Liban à Ankara, 72 heures après le séisme qui a ravagé lundi à l’aube le sud de la Turquie et le nord de la Syrie, faisant jusqu’à mercredi plus de 11.700 morts. Plus tôt dans la matinée, Bassel Habkouk avait également été sauvé. Il était enseveli sous les décombres de son hôtel à Antioche. Mardi, Mohammad Chamma et son fils avaient été extraits vivants des décombres de leur maison à Antioche et transportés à un hôpital de la région.

Pour de nombreuses familles libanaises qui sont toujours sans nouvelles de leurs proches, l’attente est longue. C’est le cas notamment des familles d’Ahmad al-Mohammad et Élias Haddad, qui sont toujours sous les décombres de l’hôtel où ils se trouvaient dans la nuit de lundi à Antioche. Pour le frère d’Élias Haddad, Georges, «l’heure est grave et l’attente se fait de plus en plus pénible».

«Bassel Habkouk, qui est sorti aujourd’hui vivant, nous a donné espoir», confie-t-il à Ici Beyrouth. «C’est un ami d’Élias. Selon lui, mon frère est toujours vivant, dit-il d’une voix enrouée. Quand le séisme s’est produit, ils ont tenté de fuir ensemble, mais lorsque l’hôtel s’est écroulé, ils se sont perdus de vue, explique-t-il. Bassel nous a assuré qu’il continue de communiquer avec Élias, qui se trouve toujours sous les décombres.»

Bassel Habkouk a raconté à Georges qu’Élias et lui «perdaient connaissance par moment». «Quand ils se réveillaient, ils tentaient de communiquer en s’appelant mutuellement, poursuit Georges. Bassel affirme que mon frère était vivant lorsque lui-même a été sauvé». «Il faut le sortir avant qu’il ne soit trop tard», implore le frère, dénonçant l’«inefficacité» des efforts menés par l’ambassade du Liban en Turquie.

Pourtant, selon un responsable de l’ambassade du Liban, «tous les moyens sont déployés par des équipes spécialisées, pour que les deux Libanais soient extraits au plus vite». Le responsable refuse néanmoins de fournir un nombre plus ou moins précis des Libanais victimes du séisme et les noms de ceux qui pourraient avoir péri ou survécu à la catastrophe. «Les chiffres et les noms sont jusqu’à présent incertains, affirme-t-il. Nous sommes encore à la recherche de certains ressortissants dans des hôpitaux. Nous ne pouvons donner d’informations précises par respect aux proches des victimes et des disparus.»

Il convient de rappeler que selon l’ambassade, «14.000 Libanais résident officiellement en Turquie». Le nombre exact de ceux qui se trouvaient dans la zone touchée par le séisme ne peut cependant être défini, car de nombreux Libanais se rendent en Turquie pour des affaires ou du tourisme. Dans ce cas, ils n’ont pas besoin de visas d’entrée et nombre d’entre eux ne déclarent pas leur présence à l’ambassade. À ceux-là s’ajoutent les Libanais qui sont entrés illégalement en territoire turc (depuis le début de la crise dans le pays).

«Nous sommes habités par la peur»


Outre les disparus, certains Libanais restent jusqu’à ce jour bloqués dans des régions ravagées par le séisme, les routes étant impraticables. Les cinq Libanais, contactés mardi par Ici Beyrouth et qui s’étaient réfugiés dans une usine de Gaziantep, ont réussi mercredi à atteindre Adana, considérée comme plus sûre. «À 5h, on nous a annoncé que les routes étaient désormais praticables, raconte l’un d’eux. Heureusement, nous avons réussi, grâce à des connaissances, à trouver une voiture qui nous a conduit jusqu’à Adana». «Actuellement, nous logeons dans un hôtel en attendant de prendre notre avion pour Beyrouth, jeudi dans l’après-midi», poursuit-il, soulagé. Pourtant sa voix tremblante trahit une grosse fatigue.



«Le pire est passé, mais nous n’arrivons pas à fermer l’œil ou à rester à l’hôtel. Nous restons dans des espaces ouverts par peur que les secousses ne se reproduisent. Les bâtiments ici sont dans un état effroyable. Nous sommes habités par la peur. Les secousses ont lieu en permanence, nous restons toujours sur nos gardes», confie-t-il, reprenant son souffle entre deux mots, comme si l’air lui manquait. Les cinq rescapés affirment en vouloir à l’équipe de l’ambassade du Liban, qui n’a pas été à la hauteur de leurs attentes.

L'intervention des équipes libanaises 

Au lendemain du séisme, le Liban a dépêché des équipes pour participer aux opérations de secours en Turquie et en Syrie. À la question de savoir si ces équipes pouvaient intervenir dans les zones où pourraient se trouver des Libanais, Mansour Srour, directeur des opérations à la Défense civile, explique à Ici Beyrouth que les équipes «ne peuvent pas choisir l’endroit où elles veulent intervenir». «Elles suivent un protocole défini par les directions de gestion des catastrophes des deux pays», affirme-t-il.

«Nous avons envoyé des équipes pour venir en aide à toutes les victimes, ajoute M. Srour. Il nous est alors impossible de privilégier une zone touchée à l’autre. Nous intervenons dans les régions qui manquent d’effectifs.»

En effet, des équipes de l’armée, de la Croix-Rouge libanaise (C-RL) et de la Défense civile libanaise dont quatre responsables des opérations ont été dépêchées sur les lieux ravagés par le séisme. La Défense civile a envoyé vingt volontaires en Turquie et vingt autres en Syrie, selon le directeur général de la Défense civile, Raymond Khattar. La C-RL a dépêché de son côté, 15 secouristes en Turquie et 21 autres en Syrie, souligne son secrétaire général, Georges Kettané. Les deux responsables affirment que les équipes libanaises interviennent notamment à Elbistan, en Turquie, et à Jablé (Lattaquié), en Syrie. Malgré le bilan macabre, elles ont réussi à sauver mercredi une femme turque enceinte et sa fille.
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