Berry enterre la Gap Law de Salam avant son passage au Parlement

Voici l'article d'Imad Marmal publié ce lundi matin dans le quotidien libanais al-Joumhouria. Ici Beyrouth le partage avec vous. 

Après l’approbation du projet de loi sur l’écart financier (ou “Gap Law”) par le gouvernement, des questions se posent sur l’orientation que prendra le Parlement dans son approche du plan gouvernemental, ainsi que sur la position du président de la Chambre, Nabih Berry, au milieu d’interprétations divergentes quant à ses intentions.

Certains ont peiné à cerner la position réelle de Berry vis-à-vis du projet de loi sur l’écart financier adopté lors de la dernière séance du Conseil des ministres, en raison de deux positions contradictoires exprimées par les deux ministres représentant le mouvement Amal au sein du gouvernement : Yassine Jaber et Tamara el-Zein.

La source de cette confusion réside dans le fait que le ministre des Finances, Yassine Jaber, soutient le projet — il a même été qualifié de l’un de ses principaux architectes — tandis que la ministre de l’Environnement, Tamara El-Zein, s’y est opposée et a voté contre son adoption.

Cette divergence d’approche entre deux ministres issus du même courant politique et du même bloc parlementaire présidé par Nabih Berry a conduit certains à supposer que le président de la Chambre aurait procédé à une répartition des rôles, mettant « un pied dans la mer et l’autre dans les champs » afin d’éviter l’embarras. Selon ce scénario, Berry aurait tacitement approuvé le projet de rétablissement financier et de restitution des dépôts, tout en demandant à El-Zein de s’y opposer au Conseil des ministres pour des raisons liées au climat populaire hostile au texte.

Cependant, loin des spéculations, Berry a lui-même tranché cette « énigme » en affirmant à ses visiteurs qu’il rejetait fermement le projet de loi adopté par le gouvernement, le qualifiant de projet d’exécution des dépôts et non de restitution.

Berry estime que le projet ne contient aucune solution réelle pour traiter la crise financière et restituer les droits des déposants, réaffirmant son attachement à sa position constante selon laquelle les dépôts sont sacrés.

Même si le Parlement est souverain et décidera collectivement du sort du projet lorsqu’il lui sera soumis pour examen, Berry souligne qu’il ne pense pas que la majorité des députés nourrissent des illusions, eux qui savent que le projet gouvernemental est mauvais et dénué de logique.

Des sources bien informées révèlent que la décision de s’opposer au projet et de voter contre au Conseil des ministres a été coordonnée entre Berry et le Hezbollah, soucieux d’adopter une position commune. Elles indiquent que le projet est passé de justesse au Conseil des ministres, « par le chas de l’aiguille », son adoption par une courte majorité — 13 voix contre 9 — traduisant la pénibilité de l’accouchement qui a précédé cette naissance par césarienne.

Ces sources ajoutent que ce qui a contribué à l’adoption du projet est le revirement de ministres issus de deux formations politiques, passés de la réserve à l’acceptation, malgré quoi le texte est passé de justesse.

Les observateurs confirment que le projet est né avant tout sous pression extérieure. Le Premier ministre, Nawaf Salam, semblait pressé d’en finir selon la logique du « Seigneur, sois témoin que j’ai transmis », renvoyant ainsi la balle dans le camp du Parlement. La manière dont celui-ci traitera le dossier sera influencée par les calculs électoraux et les considérations populaires, en prévision d’éventuelles élections législatives à la date prévue, ce qui rend probable soit le rejet pur et simple du projet par le coup de marteau parlementaire, soit son passage sur la table d’opération pour y apporter des amendements substantiels.

Les opposants au plan gouvernemental soulignent qu’il contient des promesses creuses et irréalistes, expliquant qu’aucune garantie n’existe quant à la capacité de l’État à réunir les fonds nécessaires pour restituer les dépôts à leurs propriétaires, sauf à liquider l’or — une option actuellement exclue. En somme, le projet n’est qu’un « poisson dans la mer », sans offrir aux déposants une véritable canne à pêche.

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