Journée mondiale de la langue arabe: une langue, une histoire, un avenir numérique
©Ici Beyrouth

La Journée mondiale de la langue arabe est célébrée chaque année le 18 décembre, en référence au 18 décembre 1973, date à laquelle l’Assemblée générale des Nations unies a adopté l’arabe comme sixième langue officielle de l’Organisation.

Cette reconnaissance institutionnelle consacre une langue parlée aujourd’hui par plus de 450 millions de personnes à travers le monde, du Moyen-Orient à l’Afrique du Nord, en passant par la Corne de l’Afrique et de nombreuses diasporas.

Au-delà de son statut officiel, la langue arabe incarne une richesse culturelle plurielle. De la poésie classique à la chanson contemporaine, de la calligraphie à l’architecture, elle a façonné des esthétiques et des formes de pensée qui dépassent largement son aire géographique.

L’arabe a également nourri d’autres langues de ses sonorités, comme le français, au gré des conquêtes, du commerce, des routes du savoir et des circulations humaines. Aujourd’hui, il doit relever le défi de se frayer une place dans le monde numérique et scientifique.

Quand l’arabe voyage: des mots arabes au cœur de la langue française

L’empreinte de l’arabe est particulièrement visible dans le domaine scientifique. À une époque où le monde arabo-musulman jouait un rôle central dans la transmission et le développement des savoirs, de nombreux termes ont été intégrés aux langues européennes. Le mot algèbre vient du terme arabe al-jabr, désignant une méthode de résolution d’équations. Zéro dérive de ṣifr, qui signifie « vide » ou « rien », tandis que chiffre partage la même origine. En astronomie, zénith provient de samt, abréviation de samt al-ra’s (« le chemin au-dessus de la tête »), et son opposé, nadir, vient de naẓīr.

Les échanges commerciaux ont également laissé une forte empreinte lexicale, traduisant l’influence des pratiques administratives et commerciales arabes dans les ports et villes marchandes européennes. Ainsi, le mot magasin vient de makhāzin, pluriel de makhzan, signifiant « entrepôt » ou « lieu de stockage ». Tarif dérive de taʿrīf (« notification » ou « indication »), tandis que douane trouve son origine dans dīwān, qui désignait à la fois un registre et une administration.

La Méditerranée a également constitué un vecteur majeur de circulation linguistique, notamment dans la navigation et le monde maritime. Le mot amiral vient de amīr al-baḥr, littéralement « commandant de la mer ». Arsenal dérive de dār al-ṣināʿa, la « maison de fabrication », désignant notamment les chantiers navals. Faluka a évolué en felouque, et hawl (« frayeur » ou « difficulté maritime ») a donné houle.

Dans le domaine culinaire, ces emprunts sont particulièrement parlants : café vient de qahwa, sucre de sukkar, et sirop de sharāb. Orange est issu de nāranj, aubergine de al-bāḏinjān, et artichaut de al-kharshūf. Ces mots racontent les routes des épices, des fruits et des saveurs, ainsi que les gestes culinaires transmis d’une culture à l’autre.

La langue arabe à l’épreuve de l’IA

Aujourd’hui, la vitalité de la langue arabe se mesure également à sa présence dans les technologies numériques et l’intelligence artificielle (IA). Malgré plus de 450 millions de locuteurs, l’arabe reste sous-représenté dans les outils de traitement automatique du langage, en grande partie à cause de sa diversité interne (classique, standard moderne et dialectes) et de sa complexité morphologique.

Pourtant, les enjeux sont considérables : la recherche en IA linguistique, la traduction automatique, la numérisation du patrimoine ou encore la création d’assistants vocaux adaptés pourraient renforcer significativement la présence de l’arabe dans l’espace digital mondial. En Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, plusieurs initiatives récentes visent à offrir une expérience linguistique et culturelle adaptée aux arabophones, tout en renforçant la souveraineté technologique régionale.

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