Internet venu du ciel: Starlink se pose au Liban
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Le Liban entre officiellement dans l’ère du haut débit spatial. Le gouvernement a validé la licence de Starlink, la filiale d’Elon Musk, pour fournir Internet par satellite dans tout le pays. Une décision qui promet une meilleure connectivité, plus de sécurité numérique et un vent d’innovation… venu du ciel.

Dans un pays où une simple coupure de courant peut mettre tout un quartier hors ligne, une nouvelle ère numérique semble poindre à l’horizon. Le Liban vient officiellement d’autoriser Starlink, le réseau satellitaire d’Elon Musk, à opérer sur son territoire. Un tournant majeur pour un secteur des télécommunications souvent à la traîne, mais aussi un pari ambitieux: connecter un pays fragmenté, depuis les villages du Sud à ceux du nord en passant par le centre-ville de Beyrouth en utilisant en lieu et place des câbles… des étoiles.

En effet, le Conseil des ministres a signé, mardi 8 octobre, le décret accordant à Starlink une licence de deux ans pour fournir des services Internet par satellite dans tout le Liban. Cette autorisation intervient après six mois de discussions entre le ministère des Télécommunications et la société SpaceX, fondée par le milliardaire américain Elon Musk.

Il est précisé dans le décret que cette licence «ne confère aucun droit exclusif», ce qui laisse la possibilité à d’autres opérateurs, comme Eutelsat, avec qui les discussions se poursuivent, d’obtenir des autorisations similaires. Pas de monopole, donc, même quand il s’agit d’Elon Musk!

Des revenus partagés et un cadre strict

Sur le plan financier, l’accord est aussi ambitieux que la technologie qu’il introduit. Starlink devra verser au ministère des Télécommunications 25.000 dollars de frais fixes annuels, payés d’avance pour deux ans, ainsi que 25% de ses revenus bruts d’abonnement – un taux record, alors qu’il n’est que de 5% dans la plupart des pays, indiquent à ici Beyrouth des sources proches du ministère.

Ce modèle de partage des recettes s’inscrit dans la stratégie des Télécoms visant à moderniser les infrastructures numériques, renforcer la sécurité du réseau et accroître les recettes publiques. Les autorités espèrent ainsi améliorer la qualité et la fiabilité d’Internet dans tout le pays, même en cas de coupures de courant, de crises politiques ou de perturbations techniques.

Starlink répond à deux besoins urgents du marché libanais, indiquent les mêmes sources. D’abord, le besoin de redondance numérique: les entreprises exigent une connexion stable et indépendante de la seule route Internet actuelle, faute de quoi elles se voient dans l’obligation de transférer leurs back-offices à l’étranger, comme cela a déjà été le cas pour de nombreuses sociétés. Starlink permettra à ces acteurs de sécuriser leurs activités et de rester ancrés au Liban, voire d’y revenir.

Ensuite, le besoin de connectivité dans les régions éloignées, souvent privées d’Internet, qu’il soit «légal» ou «illégal». Avec une capacité de 10 Gig, Starlink ne couvrira que 1%  environ de la consommation nationale (estimée à 750 Gig), mais offrira une connexion stable, solide et continue aux zones négligées par les fournisseurs traditionnels.

Un service haut de gamme pour un marché fragile

Dans un premier temps, l’accès à Starlink sera réservé aux entreprises, avec des abonnements à partir de 100 dollars par mois. Ce tarif élevé vise à protéger le marché local tout en fournissant une solution de secours aux institutions et entreprises dépendant d’une connexion fiable.

En d’autres termes: Starlink n’est pas là pour remplacer les fournisseurs existants, mais pour éviter la panne totale aux utilisateurs.

De la méfiance à la modernité

Avant la signature du décret, le dossier Starlink avait suscité de vifs débats, notamment autour de la surveillance des données. Mais selon les mêmes sources, ces craintes provenaient surtout des distributeurs de l’Internet «illégal», un marché parallèle qui entraîne des pertes pour l’État estimées à plusieurs centaines de millions de dollars. Ces acteurs redoutent désormais d’être écartés du jeu. Le ministère des Télécommunications, lui, vise à les intégrer dans le réseau national, afin d’assainir le secteur et d’élargir l’accès légal à Internet.

Ce qui est certain, c’est qu’avec ce décret, le Liban entre enfin dans une nouvelle phase de modernisation technologique. La route est certes encore longue et semée de câbles! La connexion venue du ciel ne résoudra pas tous les problèmes, mais elle prouve que le Liban commence à viser plus haut que ses antennes. Et si tout se passe bien, le pays pourrait bien devenir, à terme, un hub digital régional. Pour une fois, on ne parle pas d’un projet tombé à l’eau, mais bien venu du ciel.

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