Thérèse de Lisieux ou la sainteté possible
Les reliques de sainte Thérèse de Lisieux parcourent le Liban. ©Ici Beyrouth

Les reliques de sainte Thérèse de Lisieux parcourent en ce moment le Liban. Malgré certains excès, qui tiennent à la brièveté de certains de ses «passages», et au défilé expéditif devant son reliquaire, cette forme de piété populaire est bien ancrée dans la doctrine de l’Église. La vertu des reliques et leur vénération remonte à loin. Ainsi, on peut lire dans la Bible: «Et comme on enterrait un homme, voici qu’on aperçut une troupe armée, et l'on jeta l'homme dans le sépulcre d'Élisée. L'homme alla toucher les os d'Élisée, et il reprit vie et se leva sur ses pieds.» (II Rois, 13:21)

Une tradition ancrée dans la foi

La vénération des reliques est liée à la notion de communion des saints. Nous vénérons, à travers ces reliques, des saints et des saintes décédés qui ont marqué l’histoire de l’Église et du monde par leur amour du Christ. Nous croyons que nous sommes en communion avec eux, et qu’ils vivent dans un monde où, par sa Résurrection, le Christ nous a précédés.

 Cette vénération est liée à l’idée évangélique que leur corps a été le temple de l’Esprit saint, et qu’il a été sanctifié par cette habitation; et que ce corps, moyennant la foi, a la vertu d’opérer des miracles, de rendre la santé à des mourants, voire de «transporter des montagnes», de suspendre les lois naturelles, de changer le cours de l'histoire.

Une rencontre spirituelle avant tout

Mais pour que la visite de ces reliques ne soit pas celle d’un musée, et que la vitre effleurée ne soit pas un geste magique ou superstitieux, il faut créer les conditions d’une rencontre personnelle avec le saint ou la sainte sollicité(e), et surtout avec le Christ qui les a aimés.

Pour le prêtre lazariste Ramzi Jreige, «une catéchèse doit accompagner le parcours des reliques, afin qu’elles soient un encouragement pour le fidèle à entreprendre le même chemin de la sainteté».

Pourquoi Thérèse est-elle si populaire?

Mais, qu’est-ce qui explique la grande popularité de Thérèse de Lisieux? Qu’est-ce qui lui vaut même le titre de «docteur de l’Église»? Thérèse n’a jamais, comme on dit, poussé ses études. La «doctrine» qui lui vaut ce titre n’existe dans aucun traité. Nous possédons d’elle des récits de souvenirs écrits à la demande de sa sœur, qui était également sa supérieure au Carmel de Lisieux, ainsi que des lettres, des poèmes, des «récréations» théâtrales écrites pour ses sœurs carmélites, ainsi que des propos, réparties et réflexions recueillis au cours des derniers mois de sa vie. Rien de tout cela ne correspond à l’idée que nous nous faisons d’un «docteur». Thomas d’Aquin, avec sa Somme théologique, Saint Augustin, avec ses Confessions et sa «Cité de Dieu», docteurs de l’Église, volontiers, mais Thérèse de Lisieux?

La «petite voie»: une sainteté accessible à tous

C’est sa vie, et la sincérité de sa «petite voie» qui ont valu à Thérèse de Lisieux le titre de «docteur de l’Église». Qu’est donc cette voie? C’est celle de la sainteté ordinaire, de la sainteté à la portée du premier venu. En négociant avec Dieu, Thérèse a réussi à acheter beaucoup avec très peu; en donnant une grande valeur à de petits actes, elle a obtenu un immense «retour sur investissement». Thérèse s’endormait souvent, durant ses heures d’oraison, et avait le plus grand mal à réciter le rosaire, mais ses moindres gestes étaient faits avec intention d’amour, sortie de soi, mouvement vers, extériorisation. Voilà la petite voie.

Oui, c’est pour avoir réussi sa vie et surtout, d’une certaine façon, sa mort, que Thérèse de Lisieux est docteur. C’est notamment pour avoir su franchir avec une foi héroïque ces redoutables rapides que sont les derniers jours et dernières heures «sur terre».

Mais, morte, Thérèse a plus que jamais les pieds sur terre, et c’est là l’un de ses plus grands exploits. Cela fait partie de sa «doctrine»: elle a voulu «passer son ciel à faire du bien sur la terre», et a réussi à devenir l’une des saintes les plus populaires de l’Église contemporaine, sachant que ce «bien» accordé, avant d’être l’octroi d’un miracle, c’est surtout le désir de goûter au même amour de Dieu que le sien. Et que l’on sache bien qu’en cela, ce sont les faits, et non la réputation de sainteté qui compte. Si son intercession n’était si efficace, la loi de l’oubli aurait depuis longtemps fait son œuvre.

Morte de tuberculose à 24 ans, dans un coin perdu de France, Thérèse de Lisieux jouit aujourd’hui d’une notoriété mondiale. Elle qui n’a jamais quitté son cloître, elle est, avec Jeanne d’Arc, patronne secondaire de la France, patronne des missions et «docteur de l’Église».

À ces titres de gloire, on pourrait en ajouter un, qui n’est pas rien. Sur son lit de souffrances, deux ou trois mois avant sa mort, Thérèse de Lisieux a vaincu la terrible tentation de mettre fin à ses jours. Elle en a fait la confidence à sa supérieure, lui affirmant qu’il ne faudrait jamais laisser de médicaments dangereux à portée des grands malades.

Pour ceux qui ont perdu, de la sorte, un être cher, comme pour tous ceux qui sont tentés de quitter la vie avant l’heure, la compassion et l’intercession de sainte Thérèse de Lisieux sont autant de raisons d’espérer.

Il faut lire Thérèse de Lisieux. Ses Œuvres complètes sont en librairie. Son maître ouvrage, Histoire d’une âme, prosaïquement intitulé Manuscrits autobiographiques, est accessible en poche et étonnement agréable à lire. On peut compter aussi sur les irréprochables ouvrages biographiques écrits par Mgr Guy Gaucher, évêque de Lisieux.

La pérégrination de ses reliques au Liban s’achèvera le 20 juillet.

 

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