Cézanne à Aix-en-Provence: une exposition d’exception
Une femme photographie des peintures du peintre impressionniste français Paul Cézanne lors d’une avant-première presse de l’exposition «Cézanne au Jas de Bouffan» au musée Granet à Aix-en-Provence, sud de la France, le 26 juin 2025. ©Christophe SIMON / AFP

Aix-en-Provence célèbre son peintre emblématique Paul Cézanne avec une exposition majeure rassemblant 135 œuvres rares et prestigieuses. Cette manifestation culturelle exceptionnelle met en lumière l’attachement du maître à sa ville natale et à sa bastide, le Jas de Bouffan.

Avec Cézanne au Jas de Bouffan, grande expo estivale qui devrait attirer plusieurs centaines de milliers de visiteurs, Aix-en-Provence scelle sa réconciliation avec son citoyen le plus célèbre, dont la réputation mondiale fait affluer les touristes dans la ville du sud-est de la France.

«Moi vivant, aucun Cézanne n’entrera au musée», avait promis Henri Pontier, conservateur du musée Granet d’Aix en 1906, à la mort du peintre français.

Et pendant des décennies «une modeste copie d’un nu masculin classique, réalisé lors de ses études, fut la seule œuvre de Cézanne dans le musée de sa ville», rappelle l’actuel directeur, Bruno Ely, commissaire de Cézanne au Jas de Bouffan, qui rassemble 135 peintures, dessins ou gravures, venus des plus grands musées publics ou privés ou encore de collectionneurs d’une quinzaine de pays.

«Modeste copie» qui ouvre le parcours de l’exposition phare (28 juin-12 octobre) de «l’année Cézanne» que célèbre la ville natale du peintre (1839-1906), avec comme «fil rouge, Cézanne chez lui», selon l’expression de la maire d’Aix, Sophie Joissains.

Et ce «chez lui», c’est avant tout le Jas de Bouffan, grande bastide provençale dans l’est de la ville qui fut la demeure de la famille Cézanne de 1859 à 1899 et a fait l’objet d’une profonde restauration pour près de 5 millions d’euros.

Son grand salon avait été décoré de fresques par le jeune Paul, peut-être pour impressionner son père qui souhaitait qu’il soit banquier comme lui. Il fit finalement construire pour son fils un atelier au dernier étage et lui légua à son décès de quoi vivre confortablement.

Reconstitué à 70%

De grandes parties de ces décorations, enlevées et transposées sur toile, puis dispersées au gré des ventes, parfois découpées car les petits formats se vendaient mieux, sont réunies au musée Granet, dont une retrouvée dans une collection privée japonaise il y a quelques semaines à peine. «Environ 70 % du salon est reconstitué» estime Bruno Ely.

Et à la bastide même, une animation dans le grand salon recrée les différentes étapes de ces décorations. Le jeune Cézanne n’hésitait en effet pas à repeindre par-dessus les premières œuvres. Et certaines furent recouvertes de papier peint par les propriétaires ultérieures de la demeure.

L’exposition, pour laquelle plus de 50 000 billets ont été prévendus, devrait attirer jusqu’à 400 000 visiteurs, pour admirer des œuvres prêtées par les National Galleries de Londres et Washington, le MoMA, le Guggenheim ou le Metropolitan de New York, la Courtauld Gallery, des musées de Bâle, de Montréal, d’Hiroshima, ou encore la Narodni Galerie de Prague, dont une vue de la bastide sert d’affiche. Des œuvres issues de collections personnelles d’artistes, Picasso ou l’Américain Jasper Johns, témoignent de l’influence de Cézanne sur ses pairs.

Pas chercher loin

Même s’il vit aussi à Paris, «au fil des années Cézanne ne va pas chercher très loin ses sujets, il va tourner autour», souligne Bruno Ely. Et revenir ainsi au Jas de Bouffan, y peindre ou y puiser l’inspiration. Comme cette série de natures mortes, les iconiques pommes ou poires bien sûr, mais aussi de plus rares melon, cerises ou grenade. Sept toiles dont de petits détails laissent penser qu’elles sont peintes d’après la cuisine de la bastide ou dans l’atelier du deuxième étage, reconstitué lors de la récente rénovation.

Au fil des salles de l’exposition, on retrouve les pattes successives du «maître d’Aix» – couillarde du début, à la peinture épaisse étalée au couteau, impressionniste, constructive, voire pré-cubiste.

Des portraits ou scènes, également peints sur place, comme ces célèbres Joueurs de cartes venus du musée d’Orsay de Paris et qui représentent des paysans des alentours, payés quelques francs pour prendre la pose autour d’une table de jeu installée devant les boiseries du salon de la bastide.

Finalement, résume le commissaire Bruno Ely, le territoire provençal de Paul Cézanne «est un triangle minuscule. Mais qui lui suffit pour réinventer la peinture». Et attirer dans et autour de sa ville natale des visiteurs du monde entier.

Par Stéphane ORJOLLET / AFP

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