«Behind the Filter» explore la beauté féminine au-delà du cadre imposé
Affiche officielle du film «Behind the Filter». ©Micheline Nasrany

Projeté le 28 avril à 17h30 au cinéma ABC Dbayeh, dans le cadre du Women Film Festival, Behind the Filter est un docu-fiction imaginé par la créatrice de formats et productrice exécutive Micheline Nasrany. Le film est présenté par la journaliste de renom et consultante média Rima Karaki, et réalisé par Karl Salamé. Il explore l’influence des réseaux sociaux sur les choix esthétiques des femmes, à travers les témoignages authentiques de quatre protagonistes.

À l’ère des filtres, des standards irréels et des images calibrées, Behind the Filter se présente comme un regard sensible et sans artifice sur la manière dont les femmes vivent la beauté, la chirurgie esthétique et l’identité dans un monde numérique. Cette œuvre hybride mêle fiction et documentaire pour raconter les trajectoires de Zalfa Chelhot, Mireille Zammar, Batoul Abdallah et Jessica Said, chacune portant un rapport singulier à son image.

«Le film explore la chirurgie esthétique et son influence à travers les réseaux sociaux sur les femmes», explique Micheline Nasrany. «Nous avons approfondi ce sujet tout au long du film à travers les personnages. L’une d’elles refuse catégoriquement toute intervention, la deuxième y adhère profondément, la troisième a seulement retouché son visage pour éviter d’être jugée, et la quatrième y recourt de manière mesurée.»

L’idée du film puise sa source dans une interrogation intime: «Le projet a commencé comme mémoire de master en management et production télévisée», dit-elle. «En tant que productrice, je voulais aborder un sujet qui nécessitait une vraie recherche. Cette idée m’est venue parce que c’est une question que je me pose chaque jour. J’avais besoin de savoir ce que d’autres femmes en pensaient.»

De cette réflexion est né un film entièrement écrit et développé par Micheline Nasrany, et mis en images par Karl Salamé. Le style visuel est épuré, proche du réel. «Le tournage s’est basé sur une approche documentaire, avec des caméras portatives qui suivaient les personnages» dit-elle. «Nous avions un storyboard préalable et avons utilisé une Handycam, avec une stabilisation Ronin pour accompagner les mouvements. Nous avons tourné à la lumière naturelle, sans éclairage additionnel.»

Le choix de filmer les femmes chez elles était fondamental. «Nous avons décidé de tourner chez elles, là où elles se sentiraient plus libres face à la caméra», ajoute Micheline. «Nous avons mené des entretiens intimes avec les quatre femmes, pour vraiment plonger dans leur personnalité, au-delà de leur choix d’avoir ou non recours à la chirurgie.»

Le film s’ouvre sur un segment d’introduction présenté par Rima Karaki. «Le making-of avec Rima, la présentatrice, a été conçu et réalisé pour introduire le film», précise Micheline. «Cela permettait de préparer le spectateur à l’univers que nous allions explorer, avec un regard médiatique complémentaire.»

Même avec les autorisations signées, Micheline Nasrany a fixé des limites éthiques strictes: «Karl Salamé a réalisé mon idée à la fois sur le plan technique et esthétique», précise-t-elle. «Les personnages nous ont ouvert leur cœur, mais je refusais de montrer quoi que ce soit qui pourrait les mettre mal à l’aise, même avec leur accord préalable. J’ai moi-même fixé les limites. Je montre leur vulnérabilité seulement si cela sert le film sans les blesser. J’ai donc coupé plusieurs séquences au montage.»

Le film est plus qu’une critique: c’est une réflexion. «Je suis une personne qui cherche des réponses. J’ai beaucoup de questions», confie Nasrany. «Je vis dans une société orientale et j’ai eu la chance de grandir dans un cercle sans limites, sans frontières, avec un partenaire qui m’a toujours soutenue et poussée vers l’avant.»

Sa vision du monde repose sur un équilibre entre inclusion et co-construction. «J’aime travailler sur des sujets qui concernent les femmes. Mais je ne me définis pas comme “féministe” au sens extrême du terme», dit-elle. «Je crois en la complémentarité entre les femmes et les hommes, et je crois fermement à la présence de l’homme dans cette équation équilibrée.»

L’intention de Micheline Nasrany avec Behind the Filter est sans équivoque: «Ce film contient clairement un appel à l’action: s’accepter telles que nous sommes. Qu’est-ce que la perfection? Qu’est-ce que la beauté? Pourquoi laisser les réseaux sociaux définir les standards de la beauté humaine?»

Elle insiste sur l’importance de l’esprit critique face au numérique: «Je pense que l’éducation aux médias est très importante. Il faut savoir ce qu’on garde des réseaux sociaux et ce qu’on doit laisser de côté. C’est très important pour moi que les gens apprennent à ne pas simplement copier ce que font les autres.»

Et elle ne compte pas s’arrêter là. «J’ai d’autres sujets que je souhaite développer: comme le choix de rester célibataire, ou mettre en lumière le ressenti d’une femme mariée sans enfants», confie-t-elle. «J’ai réalisé un documentaire sur ce thème pour briser le tabou, mais surtout pour rompre avec la dimension de pitié que les gens ont souvent tendance à projeter.»

Avec Behind the Filter, Micheline Nasrany a créé un espace où les récits de femmes sont transmis avec dignité, authenticité et respect; des récits qui interrogent non seulement la manière dont nous nous voyons, mais aussi qui décide de ce que nous avons le droit de voir.

 

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