Israël: Netanyahou revient sur son choix pour le chef du Shin Bet sous pression américaine
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Benjamin Netanyahou a annoncé mardi être revenu sur son choix, annoncé la veille, d'un nouveau directeur du Shin Bet, l'Agence de la sécurité intérieure israélienne, après des critiques visant son candidat, notamment de la part d'un influent sénateur américain.

Ce revirement intervient alors que le Premier ministre israélien est engagé dans un bras de fer avec la Cour suprême, qui a gelé la décision du gouvernement de limoger l'actuel chef du Shin Bet, et au lendemain de l'arrestation de deux conseillers de M. Netanyahou sur fond de soupçons de pots-de-vins reçus en provenance du Qatar.

Après avoir annoncé sa nomination lundi, M. Netanyahou a finalement "remercié" le vice-amiral Eli Sharvit "d'avoir répondu à l'appel du devoir mais l'a informé qu'après plus ample considération, il avait l'intention d'examiner d'autres candidatures" pour le poste, selon un communiqué officiel.

La nomination de l'amiral Sharvit, ancien commandant en chef de la Marine israélienne, a été critiquée aux États-Unis par le sénateur républicain Lindsey Graham, proche du président américain Donald Trump, qui l'a qualifiée de "plus que problématique".

"Mon conseil à mes amis israéliens est de changer de cap et d'examiner plus minutieusement" le passé de leur candidat, a écrit M. Graham sur X, notant que des "déclarations" de l'amiral Sharvit "sur le président Trump et sa politique [ne manqueraient pas de créer] des tensions inutiles".

Le 23 janvier, deux jours après le retour de M. Trump à la Maison Blanche, l'amiral Sharvit avait publié dans un quotidien économique israélien une tribune fustigeant la promotion par le président américain des énergies fossiles à l'heure du réchauffement climatique, sous le titre: "Plus qu'une faute politique: Trump est en train de précipiter la Terre dans l'abîme"

 "Enquête politique" 

Quelques heures après l'annonce de sa nomination à la tête du Shin Bet, des médias israéliens ont rapporté qu'Eli Sharvit aurait fait partie des dizaines de milliers d'Israéliens descendus dans la rue en 2023 pour s'opposer aux tentatives du gouvernement Netanyahou de réformer le système judiciaire.

Selon les médias, l'amiral Sharvit aurait également soutenu l'accord de délimitation de la frontière maritime entre Israël et le Liban conclu en 2022 par le gouvernement précédent, et contre lequel M. Netanyahou avait fait campagne.

Le projet de réforme de la justice porté par le gouvernement de M. Netanyahou, l'un des plus à droite qu'ait connu le pays, a donné lieu en 2023 à l'un des mouvements de contestation populaire les plus importants de l'histoire d'Israël.

Les décisions prises par le gouvernement Netanyahou fin mars de renvoyer le chef du Shin Bet, d'engager une procédure de destitution contre la procureure générale du pays et de reprendre la guerre à Gaza en rompant près de deux mois de trêve, ont relancé la contestation contre l'exécutif, accusé par l'opposition de dérive dictatoriale. La mobilisation a aussi été nourrie par le vote au Parlement d'une loi contestée sur le système de nomination des juges,

Le gouvernement israélien a décidé le 21 mars de démettre de ses fonctions le chef du Shin Bet, Ronen Bar, après que M. Netanyahou eut dit ne plus avoir confiance en lui, notamment après le fiasco sécuritaire du 7 octobre 2023, jour de l'attaque sanglante du Hamas ayant déclenché la guerre en cours à Gaza.

Saisie de recours de l'opposition et d'ONG, la Cour suprême a suspendu le limogeage de M. Bar jusqu'au 8 avril pour les étudier, et statuer sur la légalité de cette révocation, qui pourrait être annulée.

Certains de ces recours dénoncent le fait que M. Netanyahou serait dans une situation de conflit d'intérêts en voulant renvoyer M. Bar en plein "Qatargate", soit l'enquête ouverte par le Shin Bet autour de proches du Premier ministre, et dans laquelle lui-même dit avoir été entendu.

La police a annoncé lundi l'arrestation Yonatan Urich et Eli Feldstein, deux proches conseillers de M. Netanyahu dans le cadre de cette enquête. Le Premier ministre a dénoncé une "enquête politique" et accusé la police de retenir ses deux conseillers "en otages".

Par Ruth EGLASH, AFP

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