Téhéran saisira-t-il le message de la dernière chance?
©Haj Kadour / AFP

L’Iran joue ses dernières cartes dans les capitales de la région, cherchant à maximiser ses gains sur le dossier nucléaire. Il tente de déstabiliser la Syrie et de maintenir artificiellement le Hezbollah au Liban par des discours enflammés, tout en faisant fi des risques d’un affrontement avec une administration américaine résolument engagée aux côtés d’Israël, ainsi que des conséquences potentielles de ses guerres imprudentes et irrationnelles.

Lors des funérailles du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, le président Joseph Aoun a adressé un message clair à la délégation iranienne: “Le Liban est épuisé par les guerres des autres sur son territoire. Il est impératif de respecter sa souveraineté et de cesser toute ingérence extérieure, comme cela figure dans la Constitution iranienne.” Pourtant, Téhéran persiste à instrumentaliser le Liban, comme en témoigne la déclaration d’Ali Akbar Velayati, conseiller du guide suprême iranien: “Le Hezbollah poursuivra sa résistance avec force, car la majorité du peuple libanais le soutient et se tiendra à ses côtés.”

Selon des sources bien informées, la position iranienne ne se limite pas à une déclaration d’intention, mais constitue un véritable ordre opérationnel auquel les dirigeants du tandem chiite se sont immédiatement ralliés. Elle représente également un test pour le président Aoun et son gouvernement. Nabih Berry, président du Parlement, a rejeté toute proposition conditionnant une aide financière au désarmement, tandis qu’un député du Hezbollah a averti: “Nous ferons trembler la terre sous les pieds de l’ennemi s’il persiste dans son occupation.”

Or, M. Berry a lui-même signé l’accord de cessez-le-feu en son nom propre et en celui du Hezbollah, engageant ainsi le Liban dans un processus de désarmement, allant du sud jusqu’à l’ensemble du territoire. L’opposition affirme qu’il ne peut en aucun cas émettre de fatwas ni statuer sur la question des armes au nord du Litani, considérant que cette décision relève exclusivement des autorités libanaises et doit être intégrée dans une stratégie de défense nationale. Elle souligne également que Berry, en apposant sa signature sur l’accord, a lui-même engagé le pays dans cette voie.

Contourner la position officielle du Liban

D’autre part, les propos de M. Velayati véhiculent un message iranien qui contourne la position officielle du Liban, répondant directement aux engagements internationaux du président Aoun, notamment en ce qui concerne sa politique envers l'Arabie saoudite et son annonce du retour du Liban dans le giron arabe, après s’être affranchi de l’influence iranienne.

Ce retour à la neutralité, en accord avec la déclaration de Baabda, a été favorablement accueilli par les pays arabes, prêts à soutenir la reconstruction du Liban, à condition que celui-ci honore ses engagements et mette en œuvre la résolution 1701.

L’Iran répond également à la décision prise lors du sommet extraordinaire de la Ligue arabe au Caire, visant à reprendre en main le dossier palestinien, jusque-là instrumentalisé par Téhéran, en adoptant le plan égyptien pour un règlement politique et en réaffirmant la nécessité d’un État palestinien indépendant, avec Jérusalem-Est comme capitale.

Par ailleurs, la région amorce une phase de transition vers la paix, tandis que la Syrie reste un terrain de rivalités régionales. Son importance stratégique en fait un territoire disputé, mais son instabilité persistante complique les calculs des puissances impliquées. Les tensions entre les États-Unis, l’Europe et la Russie y exacerbent le climat explosif, tandis que les nouvelles autorités, continuant de naviguer entre ces influences divergentes, peinent à se démarquer du régime d’Assad.

Le conflit syrien a des répercussions directes sur le Liban, notamment avec l’afflux de dizaines de milliers de Syriens armés dans les régions de Baalbek et du Liban-Nord, alimentant les craintes d’une explosion communautaire. À une échelle plus large, une inquiétude croissante gagne les capitales internationales face à l’escalade des tensions à Gaza, en Syrie, au Liban, en Irak et au Yémen. Ces préoccupations sont d'autant plus marquées que l'axe de la Moumanaa mise fortement sur le retour de la Syrie dans son giron, selon des sources proches du parti. Dans ce contexte, des efforts sont déployés pour renverser le régime d'Ahmad el-Chareh, tandis que les discussions sur une éventuelle partition de la Syrie se multiplient, si celle-ci ne revenait pas dans l'orbite de la Moumanaa.

Risque d’embrasement au sud

À la veille d’un sommet américano-russe prévu bientôt à Riyad, il n’est pas exclu qu’Israël lance une offensive contre les positions du Hezbollah et ses dépôts d’armes, tout en frappant des cibles stratégiques en Iran pour réduire son influence. Le Premier ministre israélien a annoncé que la guerre se déroulerait simultanément sur sept fronts afin d’atteindre tous les objectifs. Pour la première fois, Washington a fourni à Israël des armes spécifiques en prévision de cette confrontation.

Parallèlement, des négociations ont lieu entre les États-Unis et le Hamas, hors des feux de la rampe, pour obtenir la libération des prisonniers américains.

L’administration Trump a également envoyé un message qualifié de “dernière chance” à l’Iran, exigeant un accord sur le nucléaire sans développement d’armes. Mais le guide suprême, Ali Khamenei, a rejeté cette offre, dénonçant l’intimidation américaine. Le ministre des Affaires étrangères iranien, Adnan Arakji, a lui aussi nié avoir reçu une telle proposition et s’en est pris à Washington, révélant ainsi l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations.

Par ailleurs, un haut responsable arabe reconnaît que le processus de paix dans la région se heurte à des obstacles en raison des divergences d’intérêts des pays. Pourtant, des sources proches de Baabda insistent sur le fait qu'il n’y aura pas de retour en arrière, et que la période de tutelle, de domination et de contrôle sur le Liban est révolue.

Selon ces mêmes sources, la voie naturelle vers la solution réside dans la remise des armes du Hezbollah à l'État et le retrait total d’Israël du Liban. Ils réaffirment que le processus de règlement est en cours, et que l'accord de cessez-le-feu constitue une feuille de route sous l’égide internationale et régionale. Il est impératif de mettre en œuvre la résolution 1701 dans son intégralité et conformément à ses dispositions.

Certes, les confrontations militaires pourraient ralentir la dynamique engagée, mais elles ne sauront l’arrêter.

 

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