Les combattants kurdes du nord de la Syrie font face à une offensive de groupes armés soutenus par la Turquie et redoutent en parallèle que les nouvelles autorités à Damas mettent fin à leur autonomie chèrement acquise.
Réprimés pendant des décennies, les Kurdes avaient profité de l'affaiblissement du pouvoir central avec la guerre en Syrie pour proclamer une "région fédérale" dans le nord, s'attirant l'hostilité de la Turquie voisine.
Offensive parallèle
Lorqu'une coalition de rebelles, dominée par des islamistes radicaux, a lancé le 27 novembre une offensive fulgurante dans le nord de la Syrie qui lui a permis en douze jours de prendre Damas, des factions syriennes proturques ont déclenché de leur côté une attaque contre les forces kurdes.
Elles ont pris le contrôle de l'enclave stratégique de Tal Rifaat (nord) et de Manbij (nord-est), zone à majorité arabe.
Tal Rifaat et Manbij font partie d'une "zone de sécurité" de 30 kilomètres de large que la Turquie veut établir le long de sa frontière avec la Syrie.
Une médiation américaine a permis de conclure une trêve dans les combats mais les forces kurdes accusent les groupes proturcs de la violer.
Les Kurdes syriens sont la principale composante des Forces démocratiques syriennes (FDS) soutenues par les États-Unis et qui ont été le fer de la lance de la lutte contre le groupe jihadiste État islamique (EI).
Les FDS ont accusé les groupes soutenus par Ankara de se préparer à lancer l'assaut sur la ville de Kobané.
Cette ville à majorité kurde avait été érigée en symbole de la lutte contre les jihadistes qui y avaient connu leur première défaite avant d'être définitivement vaincus en 2019.
Mardi, Mazloum Abdi, chef des FDS, a proposé la création d'une "zone démilitarisée" à Kobané.
Menace turque
Ankara, qui en plus des groupes proturcs dispose de 16.000 à 18.000 soldats sur le sol syrien, selon un responsable turc, dit que son armée se tiendra prête pour une possible opération à l'"est de l'Euphrate" tant que les combattants kurdes du nord de la Syrie ne "déposeront" pas les armes.
Le chef de la diplomatie turque a toutefois jugé que l'armée d'Ankara n'aurait aucune raison d'intervenir si le nouveau pouvoir à Damas "s'occupait correctement de ce problème".
Selon des observateurs, la Turquie tente de profiter du changement de pouvoir en Syrie pour affaiblir et éloigner le plus possible de sa longue frontière les combattants kurdes, qu'elle qualifie de "terroristes".
Entre 2016 et 2019, la Turquie a lancé trois offensives dans le nord de la Syrie contre les Unités de protection du peuple kurde (YPG), l'épine dorsale des FDS, et Ankara tient depuis sous son contrôle deux vastes zones frontalières du côté syrien.
Ankara considère les YPG comme une extension du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui mène une insurrection sur son sol depuis les années 1980.
Autonomie menacée
Les Kurdes syriens ont effectué plusieurs gestes d'ouverture en direction des nouvelles autorités qui ont pris le pouvoir à Damas, craignant pour leur autonomie limitée acquise de haute lutte dans le nord-est de la Syrie.
Ils ont adopté le drapeau syrien de l'indépendance, qui flotte désormais dans la capitale. Mercredi, l'administration semi-autonome kurde a annoncé qu'elle abolissait les droits de douane et autres taxes entre les zones qu'elle contrôle et le reste de la Syrie.
Le chef militaire de HTC, Mourhaf Abou Qasra, connu sous son nom de guerre d'Abou Hassan al-Hamwi, a affirmé mardi à l'AFP que le nouveau pouvoir voulait étendre son autorité sur les zones kurdes et qu'il ne reconnaissait pas "le fédéralisme".
Il a ajouté que "la région que contrôlent actuellement les FDS sera intégrée à la nouvelle administration du pays".
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