La faillite du parti Baas en Irak et en Syrie
Des membres du parti Baas irakien au pouvoir se déploient dans la ville de Saddam à Bagdad le 11 mars 2003.

L'arrêt des activités du Baas en Syrie avec la chute de Bachar el-Assad, 20 ans après l'interdiction de son jumeau mais ennemi en Irak, marque la faillite de ces partis devenus au fil des années synonymes de dictatures impitoyables.

"Le Baas en Syrie après la chute de Bachar el-Assad est voué à un déclin total" estime l'expert et auteur Nikolaos Van Dam.

"Je ne pense pas qu’ils (le Baas syrien et irakien) auront un jour l’occasion de revenir au pouvoir", ajoute l'auteur notamment de "Struggle for power in Syria" (Lutte pour le pouvoir en Syrie).

Le Parti socialiste de la résurrection arabe, fondé officiellement à Damas le 7 avril 1947, souhaitait au départ combiner le socialisme et le nationalisme arabe.

Il reconnaissait la place prépondérante de l'islam tout en préconisant un État laïc pour réunir toutes les composantes d'une nation arabe divisée sur le plan confessionnel.

C'est d'ailleurs dans deux pays, fractionnés en communautés, que les minorités vont exercer leur pouvoir par le biais du Baas, les sunnites face aux chiites majoritaires en Irak et les alaouites face aux sunnites prépondérants en Syrie.

Pour l'historien Sami Moubayed basé à Damas, les partis Baas irakien et syrien n'ont jamais mis en pratique leur devise "unité, liberté et socialisme". "Il n'y a jamais eu d'unité, encore moins de liberté et leur socialisme s'est réduit à des nationalisations catastrophiques", assure l'auteur de "The rise and fall of Syrian Democracy 1918-1958".

Courroies de transmission 

En fait, ces formations étaient devenues de simples courroies de transmission de deux dictateurs: Saddam Hussein à Bagdad et Hafez el-Assad puis son fils Bachar à Damas.

"Le nationalisme arabe, et en particulier le nationalisme arabe laïc, a perdu une grande partie de son attrait depuis plusieurs décennies, et par conséquent aussi le rôle du parti Baas en tant que parti nationaliste arabe", note M. Van Dam. Pour lui, "le nationalisme d’État est progressivement devenu plus important que le nationalisme pan-arabe".

En Syrie, une junte militaire formée d'officiers appartenant à des minorités alaouite, druze et chrétienne prend le pouvoir en 1963, prône une idéologie marxiste et mène de vastes nationalisations. Elle écarte les deux fondateurs du parti le chrétien Michel Aflak et le sunnite Saleh Bitar qui se réfugient en Irak. Mais en 1970, c'est le courant nationaliste conduit par Hafez al-Assad, alors chef de l'aviation, qui l'emporte au sein du parti. Il va diriger le pays d'une main de fer en écrasant toute opposition avant de transmettre le pouvoir à son fils Bachar en 2000.

Dans le pays voisin, le parti Baas prend définitivement le pouvoir en 1968 après un coup d'État également militaire mené par le général Ahmed Hassan al-Bakr qui laissera la main en 1970 à Saddam Hussein. Ce dernier règnera jusqu'à 2003 date à laquelle il sera renversé par une coalition internationale menée par les États-Unis.

Que "des échecs" 

"Les deux partis n'ont mené leur pays qu'à des échecs. Le Baas syrien a perdu face à Israël en 1967 et 1973 et le Baas irakien s'est incliné contre l'Iran (1980-1988), a mené une invasion catastrophique au Koweït (1990) et n'a rien pu faire face à l'invasion de son pays par la coalition dirigée par les États-Unis en 2003. De quelle victoire peuvent-ils se taguer?", note M. Moubayed.

Mais si les deux branches se détestent - la Syrie soutient l'Iran quand l'Irak l'envahit, Saddam Hussein est sunnite et Hafez al-Assad appartient à une branche hétérodoxe du chiisme - elles utilisent toutes les deux les mêmes méthodes de coercition contre leurs opposants.

"Une chose est sûre, leurs appareils étaient entièrement soumis à leurs présidents respectifs" explique M. Van Dam. "Il y aura peut-être un jour un renouveau du nationalisme arabe mais ce qui est sûr c'est que cela, ne sera pas le Baas", juge M. Moubayed.

Par Sammy Ketz, AFP

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