Montré du doigt sur le nucléaire, l'Iran s'assoit à la table des Européens
Le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi est photographié lors d'une réunion avec son homologue qatari à Téhéran, le 20 novembre 2024. ©Photo par -STR / AFP

L’Iran pourrait lever son interdiction d’acquérir des armes nucléaires si les sanctions occidentales étaient réimposées, a déclaré son principal diplomate dans une interview accordée à The Guardian, publiée jeudi, à la veille de discussions sur la question.

L’Iran doit rencontrer vendredi la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne pour des discussions sur son programme nucléaire, après que ces trois gouvernements se sont associés aux États-Unis pour demander la censure de Téhéran par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).

Cette condamnation, survenue la semaine dernière, a provoqué une réponse défiante de Téhéran, mais ses responsables ont depuis signalé leur volonté de dialoguer avant le retour du président américain élu Donald Trump, dont la précédente administration avait adopté une politique de "pression maximale" contre la République islamique.

L’Iran insiste sur son droit à l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, mais selon l’AIEA, il est le seul État non doté de l’arme nucléaire à enrichir de l’uranium à 60 %.

Dans une interview publiée à la veille des pourparlers, le ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi a averti que la frustration de Téhéran face au non-respect des engagements, comme la levée des sanctions, alimentait un débat sur la nécessité pour le pays de modifier sa politique nucléaire.

"Nous n’avons pas l’intention d’aller au-delà de 60 % pour l’instant, et c’est notre position actuelle", a-t-il déclaré au journal britannique The Guardian.

Cependant, il a ajouté : "Il y a un débat en cours en Iran, principalement parmi les élites... pour savoir si nous devrions changer notre doctrine nucléaire", car celle-ci s’est révélée "insuffisante en pratique".

L’accord nucléaire de 2015 entre Téhéran et les grandes puissances visait à offrir à l’Iran un allègement des sanctions en échange de la limitation de son programme nucléaire afin d’empêcher le développement d’une capacité d’armement.

Téhéran a constamment nié toute intention de poursuivre des armes atomiques.

La volonté de Téhéran de s’asseoir à la table des négociations avec les trois gouvernements européens si peu de temps après la censure intervient à quelques semaines du retour de Trump à la Maison-Blanche.

Lors de son premier mandat, Trump avait réimposé de lourdes sanctions à l’Iran après le retrait unilatéral de son administration de l’accord de 2015, trois ans après sa conclusion.

En réponse au retrait américain, Téhéran avait réduit sa conformité à l’accord, augmentant ses niveaux d’enrichissement d’uranium à 60 %, soit près des 90 % nécessaires pour une bombe nucléaire.

Obligations légales

Dans le cadre de l’accord de 2015 – qui expirera en octobre 2025 – l’enrichissement iranien était limité à 3,67 %.

Le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, qui détient la décision finale en Iran, a émis un décret religieux, ou fatwa, interdisant les armes atomiques.

Le diplomate iranien Majid Takht-Ravanchi, adjoint politique d’Araghchi, devrait représenter l’Iran lors des pourparlers de vendredi.

Il rencontrera auparavant Enrique Mora, secrétaire général adjoint du service des affaires étrangères de l’Union européenne, selon l’agence de presse d’État IRNA.

La semaine dernière, le conseil des gouverneurs de l’AIEA, composé de 35 nations, a adopté une résolution condamnant l’Iran pour son manque de coopération sur les questions nucléaires.

L’Iran a qualifié de "politiquement motivée" la résolution présentée par la Grande-Bretagne, la France, l’Allemagne et les États-Unis.

En réponse, Téhéran a annoncé le lancement de "nouvelles centrifugeuses avancées" conçues pour augmenter ses stocks d’uranium enrichi.

Pour Téhéran, l’objectif des discussions de vendredi est d’éviter un "double désastre", qui le confronterait à de nouvelles pressions de la part de Trump et des nations européennes, selon l’analyste politique Mostafa Shirmohammadi.

Par Sebastien Ricci et Ahmad Parhizi avec AFP

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