L’éditorial – Migrants syriens: à ces messieurs du HCR… 

À la fin du mois d’octobre 2023, le Danemark, la Suède, la Norvège, la Finlande et l’Islande ont décidé de renforcer leur coopération en vue de l’expulsion des migrants se trouvant en situation irrégulière dans leur pays respectif. Le quotidien Le Figaro rapportait, sur ce plan, une déclaration du ministre danois des Migrations, Kaare Dybvad Bek, soulignant qu’il était dans l’intérêt commun des pays nordiques que «les étrangers sans permis de résidence soient renvoyés chez eux». La Première ministre danoise, Mette Frederiksen, s’était faite l’avocate d’un objectif de «zéro réfugié» dans son pays après son accession au pouvoir en 2019, rappelait Le Figaro qui précisait, dans ce cadre, que le Danemark avait été, en 2020, le premier pays européen à retirer leur permis de séjour à des réfugiés syriens, les autorités danoises estimant à l’époque que «la situation dans la région de Damas est désormais suffisamment sûre».
Dans le cadre de cette politique convenue entre les pays nordiques pour faire face aux conséquences néfastes de l’immigration illégale, la ministre suédoise chargée de la Migration, Maria Malmer Stenergard, annonçait, en novembre 2023, que la Suède envisageait d’expulser les migrants «malhonnêtes». Le gouvernement suédois se proposait alors d’adopter des mesures ouvrant la voie à des expulsions de migrants en situation irrégulière ou représentant une menace «aux valeurs démocratiques suédoises».
Est-il nécessaire de rappeler que le Danemark, la Suède, la Norvège, la Finlande et l’Islande comptent parmi les pays les plus prospères, les plus développés et les plus démocratiques du monde occidental? Et c’est précisément afin de préserver cette prospérité et leur stabilité interne que ces pays ont adopté une attitude ferme à l’égard des migrants en situation irrégulière, s’employant à favoriser leur expulsion.
À Beyrouth, il y a une dizaine de jours, le représentant au Liban du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), Ivo Freijsen, adressait au ministre de l’Intérieur, Bassam Maoulaoui, un mémorandum demandant de «mettre fin aux pratiques inhumaines» (sic!) contre les migrants syriens. Le responsable onusien faisait référence aux mesures adoptées récemment par le ministre Maoulaoui pour lutter contre la situation irrégulière – notamment sur le plan économique – de nombre de migrants syriens au Liban. Ces mesures décidées par M. Maoulaoui rejoignent pour l’essentiel celles qui avaient été annoncées par les pays nordiques à la fin de l’année 2023. Mais, à l’époque, le HCR s’était abstenu de se montrer aussi véhément à l’égard des pays européens concernés qu’il ne l’a été avec le ministère de l’Intérieur… Ce qui est tolérable et légitime pour les pays nordiques ne l’est manifestement pas pour le Liban.

Le HCR au Liban feint d’ignorer que les migrants syriens dans le pays représentent désormais non moins de 40% de la population libanaise, que le régime Al-Assad ne désire pas leur retour en Syrie et que le Liban doit être un pays de transit pour les migrants et nullement un pays d’émigration, d’autant que l’État central est dans une situation de déliquescence avancée et que les Libanais sont confrontés dans leur quotidien à la crise économique et financière la plus dévastatrice de leur histoire contemporaine. Mais, malgré une telle situation, le HCR estime que ce qui était légitime dans le Vieux continent ne l’est pas au pays du Cèdre…
Il aura fallu l’extrême courage politique du ministre Maoulaoui pour prendre le taureau par les cornes et adopter des mesures concrètes visant à mettre un terme aux activités économiques illégales des migrants syriens. L’initiative fort louable du ministre de l’Intérieur a sans doute été facilitée par la campagne tous azimuts initiée récemment par le camp souverainiste, plus particulièrement par les Forces libanaises, les Kataëb et des personnalités indépendantes, qui ont stimulé, notamment après l’assassinat du responsable FL Pascale Sleiman,  une vaste mobilisation des municipalités, de leurs bases partisanes et de certaines forces vives locales pour poser sans atermoiements le grave problème, véritablement existentiel, de la présence chaotique des déplacés syriens. Il s’est ainsi créé un climat général, une quasi-unanimité nationale, favorable à l’adoption par le ministre de l’Intérieur de ses mesures fermes face à la migration illégale, en dépit de l’émergence de certaines voix discordantes.
Il faut toutefois se rendre à l’évidence: tous les efforts déployés sur ce plan risquent de s’avérer, en définitive, peu efficaces tant que les frontières avec la Syrie demeureront une véritable passoire. Les mesures d’expulsion auront, en effet, un impact très limité si les voies de passage entre les deux pays continuent d’échapper à tout contrôle. C’est précisément à ce niveau que la communauté internationale peut aider le Liban en fournissant à l’armée une aide à la hauteur des attentes libanaises. Mais c’est sans compter la présence, pesante, à ces frontières d’un Hezbollah échappant, lui aussi, à tout contrôle.
L’amorce d’une sortie de crise dans le pays passe ainsi inéluctablement par un traitement radical et durable de cet obstacle télécommandé – et c’est là le problème de fond – par le Guide suprême de la République islamique. La responsabilité de la communauté internationale, plus spécifiquement des puissances occidentales, est particulièrement grande à cet égard…
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