L’accord approuvé par le Hamas: un piège diplomatique?

Y aurait-il deux versions d’une proposition de trêve à Gaza? Y a-t-il vraiment eu une version remaniée à l’insu de l’État hébreu? À en croire les Israéliens, la proposition égypto-qatarie pour un cessez-le-feu dans l’enclave, approuvée lundi par le Hamas, n’est pas celle à laquelle Tel Aviv avait dit «oui». Cependant, il ne semble pas y avoir une explication à la présence éventuelle de deux versions. En quoi celles-ci différeraient-elles?
La proposition de trêve, telle qu’acceptée par le Hamas, mais qui reste «loin des exigences essentielles» israéliennes, comme l’a déclaré le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, comprend trois phases.
La première, d’une durée de 42 jours (contre 40 jours selon la version israélienne), serait marquée par un cessez-le-feu à Gaza et par un retrait partiel des troupes israéliennes, notamment du couloir de Netzarim. Elle aboutirait aussi à un retour ou à une libre circulation des habitants dans le nord de la bande, sans contrôles de sécurité – comme l'avait revendiqué Israël, pour empêcher les combattants du Hamas d’y retourner.
Selon la version qui aurait été remaniée, l’État hébreu devrait également donner son feu vert pour le passage quotidien de 600 camions humanitaires, dont 50 transportant du carburant. À cela s’ajouterait une pause dans les combats pour permettre la libération d’au moins 33 otages israéliens (vivants ou morts, des femmes, des malades, des blessés et des personnes âgées) contre celle de 800 à 1000 prisonniers palestiniens qui se trouvent dans les geôles israéliennes.
Or, tel qu'il a été approuvé par les Israéliens, le texte initial, affirme Tel Aviv, exige la libération de 33 otages vivants. Il prévoit également des chiffres différents de ceux avancés par la proposition du Hamas. Ainsi, pour chaque otage israélien, le nombre de détenus palestiniens à libérer aurait augmenté, dans le cadre de la première phase. L’accord, validé par le groupe, consiste à libérer 30 Palestiniens pour chaque civil israélien et 50 prisonniers (dont 30 condamnés à perpétuité) contre chaque soldat-femme. Pour Israël, il s’agissait initialement de 40 détenus palestiniens et non pas 50.
La deuxième phase, de 42 jours supplémentaires, prévoit «un calme permanent», une formule qui diffère largement, selon Tel Aviv, de celle agréée par les Israéliens qui évoquent «un calme durable».

La version du Hamas prévoit, en outre, un nouveau retrait des forces israéliennes ainsi que la libération d’otages réservistes et de certains soldats israéliens. Davantage de prisonniers palestiniens (notamment ceux dits «de sécurité») retrouveraient, en contrepartie, leur liberté, sans que leur nombre soit spécifié par le Hamas, qui aurait, néanmoins, insisté sur la nécessité de parvenir à un accord à ce sujet, avant que tous les otages de la première phase soient libérés.
Dans le cadre de la troisième phase, les corps des otages morts seraient remis à Tel Aviv, en échange des dépouilles de Palestiniens. Le blocus israélien serait complètement levé et la reconstruction de la bande de Gaza, sous l’égide de la communauté internationale, débuterait et s’étalerait sur une période de 3 à 5 ans.
Sur la question des otages, Israël aurait relevé le rythme «lent» selon lequel leur libération sera entreprise (un rythme qui diffère de celui initial, selon Tel Aviv): le Hamas se serait engagé à remettre à l’État hébreu trois otages au troisième jour de la trêve, les autres devant être remis en liberté à raison de trois tous les sept jours.
La condition du veto imposé par Israël pour la libération de certains prisonniers de sécurité palestiniens aurait été supprimée par le Hamas, pour que le groupe puisse en décider. La crainte pour l’État hébreu, qui avait prévu une sorte d’entente sur les listes des détenus à remettre au Hamas, est que ce choix se fasse sur des prisonniers potentiellement dangereux, à savoir «des chefs terroristes» aux yeux d’Israël, avant que de nombreux otages soient libérés.
Sur la question du retrait israélien de Gaza, la différence entre les deux versions est telle que pour le Hamas, ce retrait se fait au troisième jour de la trêve, après la libération de trois otages, alors que pour les Israéliens, elle se fait au septième jour, au lendemain de la libération de toutes les femmes prises en otage.
En validant la proposition de trêve, fruit de la médiation entre le Qatar et l’Égypte principalement, le Hamas a renvoyé la balle dans le camp de Tel Aviv. S’agit-il d’une sorte de piège diplomatique pour «amadouer» davantage la communauté internationale et l’opinion publique? Les reproches israéliens sont-ils justifiés? Le cas échéant, les États-Unis étaient-ils au courant d'un remaniement de la version initiale – si cela s'avère vrai –, trahissant ainsi la confiance de leur allié israélien? Certains observateurs répondent par l’affirmative et notent, dans ce cadre, la décision prise par Washington de retarder de plusieurs semaines des livraisons d’armes à l’État hébreu.
 
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