La visite de Mohammed ben Salmane (MBS) à Washington aura donné lieu à l’une des annonces les plus spectaculaires de l’ère Trump : près de 1 000 milliards de dollars d’accords et d’engagements, économiques et militaires confondus, entre les États-Unis et l’Arabie saoudite.
Le prince héritier saoudien, reçu en grande pompe à la Maison-Blanche, a affirmé que le montant initial de 600 milliards pour des mégacontrats serait porté à « près du trillion » afin d’accompagner la Vision 2030 saoudienne et de renforcer la relation stratégique entre les deux pays. Donald Trump, fidèle à son approche transactionnelle, a salué un « partenariat historique » qui, selon lui, « changera la donne pour l’économie américaine ».
Un méga-contrat d’armement au cœur du pacte
Au centre de ces accords figure une vaste série de contrats de défense présentés par Washington comme l’un des plus importants jamais signés. Les États-Unis ont validé une vente d’armes de 142 milliards de dollars, incluant des systèmes sophistiqués pour la marine, l’aviation et la défense aérienne saoudiennes.
Cette coopération militaire constitue un pilier de la stratégie saoudienne, MBS cherchant à moderniser en profondeur son appareil de défense face aux tensions régionales. Pour Donald Trump, cette manne contractuelle tombe à point nommé : elle nourrit l’industrie américaine de l’armement et offre un succès politique majeur dans un domaine qu’il présente comme l’expression même de sa capacité à « faire des affaires ».
Mécontentement israélien face à la perspective des F-35
Les discussions autour des F-35 ont toutefois suscité une forte irritation en Israël, où l’on redoute que la supériorité militaire qualitative — pilier de la doctrine de sécurité israélienne — soit fragilisée par l’accès saoudien à cet appareil furtif de cinquième génération.
Officiellement, Jérusalem s’en tient à une réserve prudente, mais plusieurs responsables sécuritaires ont laissé entendre, en privé, que la vente d’un tel avion à Riyad introduirait un précédent dangereux dans une région où les équilibres militaires reposent sur des lignes extrêmement fines.
Des investissements massifs dans l’économie américaine
Au-delà du volet militaire, Riyad a promis un programme d’investissements sans précédent aux États-Unis. MBS a détaillé une feuille de route s’étendant de l’énergie à l’intelligence artificielle, en passant par les infrastructures et l’exploitation des minéraux critiques. Les autorités saoudiennes y voient un moyen de sécuriser des technologies sensibles et de diversifier leur économie, conformément aux objectifs de leur Vision 2030.
Trump, de son côté, inscrit ces annonces dans son discours sur la renaissance industrielle américaine. Selon lui, ces capitaux stimuleront la création d’emplois, renforceront des secteurs stratégiques et consolideront l’influence économique de Washington face à la montée en puissance de la Chine.
Un partenariat à la fois stratégique et controversé
Malgré les déclarations triomphales, plusieurs zones d’ombre subsistent. De nombreux analystes soulignent que le chiffre de 1 000 milliards de dollars relève davantage d’un horizon politique que d’accords fermement contractés. Les documents publics confirment la vente d’armes et la signature d’un « accord de défense stratégique », mais la matérialisation du reste dépendra d’années de négociations et d’autorisations réglementaires.
Les critiques portent également sur les implications éthiques de ce rapprochement, notamment au regard des violations documentées des droits humains en Arabie saoudite. Dans certains cercles à Washington, on s’interroge sur l’influence saoudienne dans des secteurs sensibles, tandis que d’autres questionnent les intérêts personnels que Trump pourrait tirer d’un tel rapprochement, au vu de ses liens historiques avec le Royaume.
Une recomposition du jeu régional
Sur le plan géopolitique, ce pacte traduit un rééquilibrage profond au Moyen-Orient. Riyad consolide son rôle d’allié incontournable de Washington, au moment où l’Iran, la Turquie et la Chine cherchent à accroître leur présence dans la région. Le partenariat technologique et militaire noué avec les États-Unis pourrait repositionner l’Arabie saoudite comme un acteur majeur de la sécurité régionale, et donner à Trump un levier diplomatique de premier plan.
La véritable portée de cette annonce dépendra toutefois de la concrétisation de ces engagements. Entre la rhétorique grandiloquente de la Maison-Blanche et la réalité des contrats, un long chemin reste à parcourir. Mais une chose est sûre : Trump et MBS entendent projeter une image de puissance économique et stratégique destinée à redéfinir l’axe Washington-Riyad pour la décennie à venir.




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