L’actualité dramatique de ce lundi 11 novembre en dit long sur la descente aux enfers du Nigeria. Près de 200 jihadistes ont été tués lors d’affrontements entre Boko Haram et l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP) autour du lac Tchad, selon plusieurs sources locales. Ces combats fratricides illustrent la fragmentation extrême d’un conflit qui, depuis plus de quinze ans, déchire le nord-est du pays et menace aujourd’hui l’unité même de la première puissance démographique d’Afrique.
Une guerre dans la guerre
Ces affrontements entre factions islamistes rivales ne sont pas nouveaux, mais leur intensité actuelle est inédite. Boko Haram et l’ISWAP, issus d’une même matrice jihadiste, s’affrontent pour le contrôle du lac Tchad, une zone stratégique partagée avec le Niger, le Tchad et le Cameroun. Ce territoire sert de sanctuaire, de base logistique et de source de revenus grâce à la pêche et à l’agriculture.
Depuis la mort d’Abubakar Shekau, le chef historique de Boko Haram, en 2021, la rivalité entre les deux groupes s’est transformée en guerre ouverte, chaque faction cherchant à dominer un territoire où l’armée nigériane peine à imposer son autorité.
L’autre drame nigérian: la spirale des violences intercommunautaires
Parallèlement à cette guerre islamiste, le centre du pays est ravagé par des affrontements d’une autre nature, opposant milices peules musulmanes et communautés chrétiennes. Ces violences, souvent liées aux conflits fonciers et à la raréfaction des terres cultivables, ont pris un tour confessionnel sanglant.
Les États du Benue, du Plateau et de Kaduna concentrent les pires massacres: villages incendiés, églises détruites, des centaines de morts chaque mois. Pour de nombreuses ONG, il s’agit d’une «guerre silencieuse» qui décime les campagnes du centre-nord.
Trump souffle sur les braises
Face à cette situation explosive, les déclarations du président américain Donald Trump ont ajouté une dimension internationale à la crise. Accusant Abuja de «laisser massacrer les chrétiens», Trump a menacé d’une intervention militaire américaine et demandé au Pentagone de préparer «un plan d’action au Nigeria».
Le gouvernement nigérian a dénoncé une «caricature injuste», rappelant que la violence touche «toutes les confessions sans distinction». Des responsables musulmans du Nord-Est soulignent que la majorité des victimes de Boko Haram sont des musulmans, et accusent Washington de simplifier une réalité beaucoup plus complexe.
Un pays au bord de la rupture
Avec plus de 40.000 morts et deux millions de déplacés depuis 2009, le Nigeria est aujourd’hui pris dans un enchevêtrement de conflits – religieux, ethniques et économiques – qui minent son autorité centrale.
Dans un pays presque également divisé entre nord musulman et sud chrétien, la défiance s’installe. Les chrétiens du centre dénoncent un État absent; les musulmans du nord accusent les Occidentaux de manipulation. Entre les deux, la population paie le prix fort, livrée à l’insécurité, à la pauvreté et à l’impunité.




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