Manque d'enseignants, concurrence des nouvelles technologies: le braille, alphabet universel inventé il y a 200 ans par le Français Louis Braille et utilisé par six millions de personnes dans le monde, se bat pour continuer d'exister.
Permettant de lire du bout des doigts grâce à un système de points en relief, cet alphabet voit son utilisation de plus en plus menacée, au point que des associations ont entamé une démarche très symbolique: son inscription au patrimoine immatériel de l'Unesco.
En France, par exemple, il n'est plus maîtrisé que par 15% des près de deux millions de déficients visuels.
«La tendance à la baisse de l'apprentissage du braille se confirme», souligne auprès de l'AFP Bruno Gendron, président de la Fédération des aveugles de France: «Il n'y a pas assez d'enseignants et on doit désormais de plus en plus convaincre de l'intérêt d'apprendre le braille à l'heure du tout numérique».
Car ces dernières décennies, les innovations technologiques (synthèse vocale, livre audio, podcasts, dictée vocale...) se sont multipliées, offrant de nouvelles perspectives aux personnes déficientes visuelles.
À cela s'est ajoutée l'intelligence artificielle, une révolution qui a conduit toute une génération de malvoyants sur le tard à délaisser le braille, jugé peu accessible ou trop compliqué, au profit du numérique.
Or, loin d'être obsolète, le braille reste «la seule solution pour accéder à l'écrit, à la lecture, à l'écriture, pour ne pas être illettré», insiste Thibaut de Martimprey, directeur du Campus Louis Braille à Paris.
«Quand on peut lire directement un texte sous les doigts, ça veut dire qu'on voit l'alphabet, on voit l'orthographe, on voit la grammaire» complète, ajoute Pierre Marragou, président de l'association Accompagner, Promouvoir, Intégrer les Déficients Visuels (Apidv).
Au-delà du risque d'illettrisme, les associations mettent également en avant le facteur réussite scolaire.
Selon l'étude Homère publiée en 2024 portant sur le quotidien des personnes malvoyantes et aveugles en France, les aveugles maîtrisant le braille seraient ainsi 35% à avoir un niveau d'études inférieur au baccalauréat, contre 51% pour les non braillistes.
«Le braille est un outil qui, à un moment donné, dans un parcours universitaire et professionnel, devient incontournable», relève Pierre Marragou. «Notamment quand on va devoir apprendre des langues étrangères, travailler sur des documents qu'on doit relire ou sur des chiffres.»
Mais sur le terrain, les personnes malvoyantes se heurtent à un obstacle de taille: le coût, notamment des ouvrages en braille, que ce soit sur papier ou sous format électronique, qui reste encore très élevé.
Avec AFP



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