Le président américain Donald Trump accueille jeudi à Washington pour la première fois les dirigeants des cinq ex-républiques soviétiques d'Asie centrale. Les Occidentaux cherchent à s'implanter dans cette région riche en ressources naturelles mais enclavée, où l'influence traditionnelle russe est concurrencée par la Chine voisine, désormais incontournable.
Nouveau grand jeu
Le format «5+1» entre les États centrasiatiques (Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan) et d'autres puissances a gagné en popularité depuis l'invasion russe de l'Ukraine en 2022.
Ces pays sous influence russe exclusive entre le milieu du 19ᵉ siècle et la chute de l'URSS en 1991 font l'objet d'un intérêt croissant, avec un premier sommet «États-Unis-Asie centrale» en 2023.
En 2025, les dirigeants de l'Union européenne Ursula von der Leyen et Antonio Costa, de la Chine Xi Jinping et de la Russie Vladimir Poutine sont venus en Asie centrale respectivement en avril, juin et octobre.
Ces sommets 5+1 ont été rendus possibles grâce à l'amélioration des relations entre les États centrasiatiques. Ils tentent d'apparaître comme un pôle géopolitique unifié et ont mis fin à des conflits, principalement autour de la ressource en eau.
Pékin est déjà solidement implanté avec ses «Nouvelles routes de la soie», immense projet d'infrastructures, et s'est imposé comme le premier partenaire commercial devant l'UE et la Russie.
Au niveau sécuritaire, Moscou reste incontournable, même si la Chine et la Turquie s'immiscent, tandis que les Occidentaux, qui avaient basé en Asie centrale au début des années 2000 des troupes opérant en Afghanistan, peinent à exister.
De vastes réserves naturelles
Les abondantes réserves naturelles encore largement inexplorées des pays centrasiatiques attirent les convoitises de Bruxelles et Washington, qui cherchent à diversifier leurs approvisionnements en terres rares et à réduire leur dépendance vis-à-vis de Pékin.
Outre ces réserves de terres rares, le Kazakhstan est le premier producteur mondial d'uranium, l'Ouzbékistan regorge d'or, les réserves de gaz du Turkménistan sont parmi les plus importantes, tandis que le Kirghizstan et le Tadjikistan ouvrent de nouveaux gisements minéraux.
La Russie reste solidement implantée dans le domaine énergétique, via la fourniture d'hydrocarbures grâce aux infrastructures soviétiques, ou la construction de centrales nucléaires.
Extrêmement polluée, cette région doit aussi lutter contre les effets du réchauffement climatique, encore plus ressentis que dans le reste du monde, dont le manque d'eau.
Logistique compliquée
Mais acheminer ces réserves naturelles depuis l'Asie centrale reste compliqué.
Cette région de hautes montagnes et de déserts d'environ 80 millions d'habitants, enclavée et immense (4 millions de km², soit presque autant que l'UE), est bordée par la Russie (nord), la Chine (est), l'Iran et l'Afghanistan (sud), des États aux relations conflictuelles avec les Occidentaux.
Traversée durant l'Antiquité et le Moyen Âge par la Route de la soie entre l'Asie et l'Europe, l'Asie centrale tente de retrouver son rôle historique de carrefour commercial.
Pour sortir de la dépendance envers Moscou, legs soviétique, et briser cet enclavement physique, les pays centrasiatiques multiplient les partenariats.
Pékin comme Bruxelles soutiennent le développement du corridor de transport transcaspien pour atteindre l'Europe via le Caucase, en contournant la Russie.
Le transport de fret à travers la mer Caspienne a connu une hausse de 668% entre 2021, avant l'invasion russe de l'Ukraine, et 2024, selon les données officielles.
Droits humains bafoués
Pour les États-Unis de Donald Trump, la coopération économique prime sur la promotion des valeurs démocratiques dans cette région aux régimes autoritaires, à divers degrés.
Si l'Asie centrale s'ouvre aux investissements étrangers et aux touristes, de nombreuses ONG notent une dégradation récente des droits humains tandis que la scène politique est cadenassée et la presse étroitement contrôlée.
Amnesty International estime la situation «préoccupante», Human Rights Watch relève «l'intensification de l'intimidation, du harcèlement et des poursuites contre les militants critiques et les journalistes», tandis que Reporters sans frontières place ces pays dans le dernier quart de son classement.
Le démantèlement par Donald Trump du média public américain Radio Free Europe, l'une des rares sources d'information alternatives en Asie centrale diffusant dans les langues locales, a été salué par les présidents du Kazakhstan et du Kirghizstan.
Avec AFP



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