Au cours de l’un de ses nombreux meetings populaires organisés dans une province française, le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, expliquait à ses partisans l’importance de maintenir en permanence un climat d’agressivité et d’escalade verbale dans le discours politique, accompagné de stimulation d’une instabilité chronique sur le terrain. Objectif recherché: entretenir une atmosphère de crise aigüe, passage obligé, selon lui, pour un changement en profondeur du système en place.
Cette conception de l’action politique a souvent été l’une des caractéristiques d’une certaine gauche (pas toutes…) dans les pays bénéficiant d’un minimum de libertés publiques. Sauf que le «nouvel ordre», lorsqu’il parvenait à s’imposer, n’était pas nécessairement plus bénéfique pour la population que le précédent, jugé «réactionnaire». Bien au contraire…
Cette stratégie de déconstruction et de déstabilisation à outrance a trouvé preneur au Liban au cours des dernières décennies sous les coups du tandem chiite dit «obstructionniste», plus particulièrement du Hezbollah qui a battu tous les records en la matière. Il s’est ainsi employé à combiner sciemment le blocage systématique – orné de pourrissement des institutions – avec une forte dose de terrorisme intellectuel, de lavage de cerveau idéologique (saupoudré de fanatisme sectaire) et, surtout, de déraison, poussée jusqu’à ses derniers retranchements.
Dernier en date de ce choix de la déraison démentielle dans la gestion de la chose publique: la velléité attribuée au leader du mouvement Amal, et néanmoins chef du législatif, Nabih Berry, d’organiser sous son égide une vaste réunion visant à lancer le gigantesque chantier de la reconstruction au Liban-Sud. Initiative à laquelle il aurait été naturel d’applaudir si elle ne s’accompagnait pas, de façon concomitante, d’un effort tout aussi enthousiaste visant à reconstituer rapidement l’arsenal militaire et les stocks de munitions du parti pro-iranien.
Ces messieurs du tandem sectaire désirent ainsi faire reconstruire aujourd’hui ce qui sera vraisemblablement détruit à nouveau dans deux ou trois ans, lorsque le Hezb lancera très probablement sa nouvelle guerre (évidemment stérile), puisqu’il s’empresse actuellement de remettre sur pied toute son infrastructure milicienne, à tous les niveaux… L’incohérence à son apogée et à l’état pur! L’histoire ne dit pas en effet qui financera ce gigantesque chantier de reconstruction. Certainement pas la République islamique iranienne qui est frappée d’une profonde crise économique, sociale et financière. Quant aux pays donateurs – les États du Golfe, les pôles de l’Union européenne et les États-Unis –, on les voit mal investir des centaines de milliards de dollars au Liban alors que le Hezb ne cesse de crier haut et fort sa détermination à préserver et développer son arsenal militaire, affichant sans scrupule une posture belliqueuse sans limite. De quoi faire fuir les investisseurs les plus audacieux. Et tant pis pour la population. L’important n’est-il pas de satisfaire les intérêts géostratégiques du Corps des Gardiens de la Révolution islamique?
Mais il y a pire, encore, en matière de déconstruction de l’État et de sabotage des fondements de la société: l’entreprise de falsification à grande échelle de certains diplômes universitaires! On avait déjà connu il y a quelques années l’incroyable scandale de la «vente» du baccalauréat libanais, permettant à nombre d’élèves de terminale d’obtenir… à domicile le diplôme de fin d’études secondaires sans avoir à se déplacer et sans se soucier outre mesure d’une déplaisante révision du programme scolaire enseigné en cours d’année!
Aujourd’hui, on a fait mieux, semble-t-il (on n’arrête pas le progrès…) : ce sont rien moins que les Masters et les Doctorats de certaines matières qui sont mis en vente, à prix cher, grâce à la complicité de fonctionnaires zélés. Le Premier ministre Nawaf Salam a heureusement réagi promptement et a pris contact avec la ministre de l’Éducation afin qu’elle réclame expressément une enquête sur ce scandale. Reste à espérer, cependant, qu’une investigation sérieuse et sans complaisance sera menée jusqu’au bout et que les mesures adéquates seront réellement prises afin de ne pas étouffer l’affaire.
Après avoir miné les institutions étatiques de l’intérieur, torpillé l’économie nationale, provoqué la ruine du secteur bancaire, et plongé le pays dans une situation de non-droit, c’est au prestige et à la réputation de l’enseignement universitaire libanais que l’on s’en prend désormais.
Le sabotage délibéré d’un État et des fondements d’une société n’a manifestement plus de limites… Surtout lorsque des responsables maléfiques sans foi ni loi s’obstinent à vouloir s’agripper aux commandes dans le but à peine voilé d’entraîner le pays dans les ténèbres les plus profondes.




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