Cinq photos, une très courte déclaration à Naqoura : la visite de l’émissaire américaine au Liban, Morgan Ortagus, a été marquée par cette symbolique. Son sens : l’heure des palabres sans fin est terminée, il est temps de passer à l’action. Dans un pays où l’on parle beaucoup pour ne rien dire, c’est une nouveauté.
Comment ? Via le « mécanisme ». On dirait le titre d’un film de science-fiction. En réalité, il s’agit du comité chargé de l’application du cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah depuis novembre 2024.
Une nouvelle formule semble se dessiner : ouvrir ce fameux « mécanisme », pour le moment limité à des militaires, à des personnalités civiles libanaises et israéliennes — des ministres, par exemple. Cela pourrait permettre de lancer des discussions, même indirectes, pour régler les litiges et éviter une nouvelle guerre.
Il faut dire que nous sommes engagés dans une course contre la montre entre la reprise d’opérations israéliennes à grande échelle au Liban et le maintien d’un calme précaire. Le président de la République estime que des discussions avec Israël sont nécessaires pour ne pas laisser le Liban sur le quai de l’oubli. Car l’urgence est réelle.
Côté israélien, on accuse le Hezbollah de vouloir reconstituer son arsenal, ses dépôts d’armes, ses tunnels… notamment à travers la Syrie, via une filière qui, semble-t-il, est toujours active. Dans un entêtement qui frise la folie, la milice pro-iranienne campe sur ses positions, du moins en public : pas question de remettre les armes à l’armée libanaise !
Et, comme pour souligner la précarité de la situation, le chef des renseignements égyptien est venu faire sa tournée des trois présidences, après être passé par Jérusalem. Le message est clair : ne ratez pas le train de la paix que nous avons lancé avec Donald Trump à Charm el-Cheikh.
Même son de cloche dans la bouche du secrétaire général de la Ligue arabe. Le décor est planté : Occidentaux et Arabes pressent le Liban de sortir de sa langueur monotone afin d’éviter les sanglots longs des violons de l’automne. En espérant que tout le monde saisisse le message « codé ».
Ajoutez à cela l’arrivée très attendue du nouvel ambassadeur américain, Michel Issa, d’ici une dizaine de jours, qui va accentuer la pression, et vous obtenez tous les ingrédients du dilemme du Liban officiel. Ce dernier devrait foncer tête baissée dans la porte de sortie ouverte par Morgan Ortagus : le « mécanisme », qui doit tourner à plein régime. Pas pour continuer à faire semblant, mais pour mettre de l’huile dans les rouages. Et, dans ce pays où tout grince, c’est déjà un exploit mécanique.
En espérant qu’Albert Camus ait eu tort lorsqu’il disait que « les rouages les mieux huilés sont souvent ceux qui tournent dans le vide ».




Commentaires