À Londres, «Triple Trouble» réunit trois poids lourds de l’art contemporain
L’exposition d’œuvres individuelles et collaboratives des artistes Shepard Fairey (États-Unis), Damien Hirst (Royaume-Uni) et Invader (France), intitulée «Triple Trouble», se tient du 10 octobre au 29 mars 2026. ©Justin TALLIS / AFP

Trois figures majeures de l’art contemporain issues de la culture underground unissent leurs univers dans Triple Trouble, une exposition inédite à Londres. Shepard Fairey, Invader et Damien Hirst mêlent street art, mosaïque pixelisée et œuvres provocantes dans un projet collaboratif né d’une admiration mutuelle. À découvrir à la Newport Street Gallery.

Venus de la culture underground et subversive, aujourd'hui sommités de l'art contemporain, l'Américain Shepard Fairey, le Français Invader et le Britannique Damien Hirst exposent à Londres une œuvre commune «joyeuse et ludique» qui prouve que les artistes peuvent mettre leur ego de côté, estime Fairey.

Ouverte au public à partir de vendredi dans la galerie londonienne de Damien Hirst, l'exposition présente à la fois des pièces individuelles et des collaborations inédites entre les trois hommes, et a demandé un an et demi de préparation.

«C'est une idée qui est vraiment née de notre admiration mutuelle pour le travail de chacun», explique dans un entretien avec l'AFP Shepard Fairey, street artiste et sérigraphiste devenu internationalement célèbre avec l'affiche Hope, icône de la campagne présidentielle de Barack Obama en 2008.

Une affiche de sa «Marianne» tricolore, fresque murale conçue pour rendre hommage aux victimes des attentats de 2015 en France, orne aussi le bureau du président Emmanuel Macron à l'Élysée.

Hirst, peintre, sculpteur, est connu notamment pour ses œuvres réalisées avec des cadavres d'animaux ou sa tête de mort incrustée de diamants, certaines se vendant des millions d'euros.

Invader est un mosaïste français anonyme qui a parsemé les grandes métropoles du monde de ses Space invaders. Les trois hommes sont devenus amis et ont eu l'idée de cette collaboration inédite.

«Les artistes sont souvent considérés comme des personnalités égocentriques, réticentes à l'idée de collaborer avec d'autres. Je trouve que dans cette période de fracture culturelle, l'idée que des personnes aussi difficiles que des artistes puissent travailler ensemble est réjouissante», estime Shepard Fairey.

«Fauteurs de trouble»

«Nous nous sommes proposé nos idées respectives, les œuvres ont fait des allers-retours entre nos ateliers respectifs», raconte l'artiste, en évoquant une collaboration «joyeuse et ludique».

Dans la grande Newport Street Gallery, les œuvres de chacun des artistes sont revisitées ou complétées avec l'apport de chacun, les Spaces invaders s'invitent sur les peintures de Fairey ou dans les œuvres de Hirst.

Le titre de l'exposition, Triple trouble, entend rappeler le côté subversif de ces trois artistes qualifiés de «fauteurs de trouble».

«Nous avons tous été des perturbateurs. J'ai été arrêté à plusieurs reprises pour du street art, tout comme Invader. Damien a créé des œuvres dérangeantes sur la mort, mais aussi des peintures à propos desquelles les gens ont dit, hé, attends, il n'y a pas de message là-dedans. Ce à quoi il a répondu: je fais ce que je veux», se rappelle Shepard Fairey.

Le succès venu, «les questions se posent: être underground ou être connu? Qu'est-ce qui est authentique, qu'est-ce qui est commercial?», reconnaît-il. Mais «il y a des moyens de composer avec ça en tant qu'artiste», assure-t-il.

«Pour moi, il s'agit de rester fidèle à mes valeurs. Et j'ai toujours mis en œuvre ce que j'appelle la stratégie un pied dedans/un pied dehors», explique-t-il.

«Mes influences viennent du punk rock, du graffiti, du hip hop, du skate, du monde de la contreculture. Mais mon idée est que si tu peux infiltrer le système et le changer de l'intérieur, cela devient une forme de subversion et de nuisance formidable», analyse l'artiste.

«Mes valeurs aujourd'hui ne sont pas différentes que celle de mes débuts, quand je n'avais pas d'argent», affirme-t-il.

«J'ai juste plus de moyens pour donner de l'écho à mes idées et pour aider ceux qui travaillent à rendre le monde meilleur», dit-il, évoquant sa collaboration régulière avec des ONG et des associations.

Interrogé sur la polarisation politique aux États-Unis et sur l'administration de Donald Trump, il évoque «une régression» mais dit avoir de l'«espoir» dans la «résilience» des États-Unis.

Par Cécile FEUILLATRE / AFP

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