
Reconduction du démissionnaire Sébastien Lecornu ou nomination d'une nouvelle personnalité au poste de Premier ministre ? Le président français Emmanuel Macron doit mettre fin vendredi à cinq jours de suspense et tenter une nouvelle fois de désamorcer une crise politique qui ne cesse de s'aggraver.
Le chef de l'État a convié dans la nuit les patrons de partis et chefs de groupes à l'Assemblée nationale à 14H30 (12h30 GMT), à l'exception de ceux du Rassemblement national (RN, extrême droite) et de La France insoumise (LFI, gauche radicale), a-t-on appris de sources concordantes.
Il a promis de nommer un Premier ministre d'ici «vendredi soir» après la démission fracassante lundi de Sébastien Lecornu, après deux jours de négociations supplémentaires pour tenter d'arracher, en l'absence de toute majorité parlementaire, un accord de non-censure du futur gouvernement.
Rien n'a filtré sur l'heure et les modalités d'une annonce. Une prochaine prise de parole du chef de l'État est évoquée par son entourage. Il ne s'est pas exprimé sur la situation intérieure depuis cette nouvelle déflagration politique.
À quelques heures d'une nomination, deux scénarios revenaient avec force, la reconduction de Sébastien Lecornu ou la carte du centriste Jean-Louis Borloo, 74 ans, éternel «revenant» par temps de crise.
«Mission» terminée
Troisième Premier ministre désigné en un an depuis la dissolution de l'Assemblée par M. Macron en juin 2024, M. Lecornu est à ce stade le plus éphémère chef de gouvernement de la Ve République. Celui qui est resté un peu d'un mois en poste assure ne pas «courir après le job» et avoir «terminé» sa «mission».
Démissionnaire lundi, quelques heures après avoir annoncé son gouvernement, Sébastien Lecornu avait devancé l'implosion de sa fragile coalition gouvernementale de centre-droit, anticipant un départ de la droite, insatisfaite de la composition de l'exécutif retenue.
Plusieurs responsables politiques prêtent toutefois à Emmanuel Macron la tentation de le reconduire, au risque d'ulcérer les oppositions et d'accélérer la censure de la nouvelle équipe.
Une série d'acteurs soutiennent en revanche publiquement ou en coulisse la piste Borloo, ministre sous les présidents de droite Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy.
Vieux routard de la politique française et fondateur du parti Union des démocrates et indépendants (UDI), longtemps maire de Valenciennes (nord), M. Borloo avait annoncé en 2014 son retrait de la vie politique, disant n'avoir plus «l'énergie nécessaire» après une pneumonie aiguë.
De nouveau actif sur la scène politique, il a toutefois assuré jeudi soir ne pas avoir eu de contact avec l'Élysée.
D'autres noms sont aussi cités, de l'ex-Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve au Premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, lui aussi issu du PS.
Avec un double défi pour le chef de l'État : repousser le plus tard possible la menace d'une censure et a fortiori d'une dissolution.
Déconnectés de 2027
Avant d'achever sa «mission», Sébastien Lecornu a estimé que le projet de budget 2026, détonateur de la crise actuelle avec la censure début septembre de son prédécesseur, le centriste François Bayrou, pourrait être présenté lundi en conseil des ministres, soit la date-butoir pour qu'il soit adopté d'ici la fin de l'année par le Parlement, alors que la France, deuxième économie de la zone euro, affiche une dette de 3.400 milliards d'euros (115,6% du PIB) et une croissance plombée par la frilosité des investissements.
Cela sous-entend la nomination d'un gouvernement peut-être dès vendredi ou à défaut ce week-end. Sébastien Lecornu a suggéré que la future équipe gouvernementale soit «complètement déconnectée des ambitions» pour l'élection présidentielle de 2027, ambitions qu'il n'a lui-même jamais manifestées.
Cela exclurait Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur démissionnaire et patron du parti de droite Les Républicains, qui a précipité dimanche soir la chute du gouvernement Lecornu tout juste nommé.
M. Retailleau a conditionné son retour au gouvernement à la nomination d'un Premier ministre «ni de gauche, ni macroniste», relevant que c'était le cas de Jean-Louis Borloo.
Emmanuel Macron est aussi très attendu sur une éventuelle suspension de la très impopulaire réforme des retraites, préalable posé par les socialistes pour un accord de non-censure.
Avec AFP
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