
Le fameux aphorisme du sénateur romain Caton l'Ancien (232 av. J.-C.-149 av. J.-C.), «Il faudrait détruire Carthage», est interpellant chaque fois que des menaces font appel à des choix militaires décisifs afin de protéger la paix et l'intégrité d'un pays ou d'une aire stratégique de grande amplitude. Israël est sommé de mettre fin à un cycle de conflits dûment conçu et mis en place par la politique impériale iranienne. L'enrayage de la politique iranienne des «plateformes opérationnelles intégrées» a entièrement changé la donne stratégique régionale et intercontinentale, et il n'est plus question de revenir sur la nouvelle donne et ses configurations géostratégiques.
La tentative renouvelée de l'Iran et de ses émules de remettre en question la nouvelle dynamique en cours fait long feu. La riposte aux bombardements aveugles des Houthis et aux actes de terreur en Israël nous renvoie à d'autres enjeux autrement plus parlants sur le plan géostratégique. Nous ne sommes plus dans le registre des représailles ponctuelles. Israël se positionne désormais sur une trajectoire de fin de guerre moyennant des changements géostratégiques finalisés. Il n'est plus question de faire ménage avec des impondérables sécuritaires pérennisés comme ce fut le cas jusqu'à maintenant.
Le coup porté au directoire du Hamas va bien au-delà des personnages ciblés; il porte atteinte au double jeu du Qatar, à la politique de déstabilisation iranienne qui tente de renouer avec sa dynamique enrayée ainsi qu'aux velléités de la Turquie islamiste. L'aboutissement de cet acte de grande prouesse est concluant à plus d'un titre, nommément celui d'en finir avec les ambiguïtés d'un contexte géostratégique indéfiniment ouvert aux politiques de subversion en permanente gestation. Le tintamarre politico-médiatique relève du bavardage et de la diversion qui visent à occulter les enjeux politiques et militaires sous des prétextes fallacieux de souveraineté nationale qatarie et des principes de la guerre juste, alors que les personnes visées sont des terroristes abrités par un satrape qui se joue de la confusion des juridictions pour se donner une titulature qui sert de couvert à une politique de puissance islamiste qui opère par procuration.
La fin de ce conciliabule de terroristes et de mafieux pilotés par les politiques islamistes du Qatar et de l'Iran est préliminaire à toute politique de paix en perspective. Il est impossible d'effectuer un virage à moins d'en finir avec les verrouillages géostratégiques des politiques de puissance islamistes et de leurs mandataires. Les politiques qatarie et iranienne sont les revers d'une même médaille, celle des politiques impériales de l'islamisme et de ses modulations. Les chefs du Hamas sont les mandataires obligés à qui on doit les politiques de verrouillages stratégiques des plateformes intégrées et la manipulation de la variable palestinienne à des fins de politique de puissance islamiste.
Des figures comme celles de Khaled Chaalan, Khalil al-Hayya, Sami Abou Zahra, etc. doivent être éliminées si l'on veut la fin de la guerre. Ces énergumènes n'ont d'autre rôle que de gérer leur fonds de commerce, d'instrumentaliser la politique de victimisation qu'ils ont mise au point et de reconduire leur carrière politique comme ils n'ont cessé de le répéter. L'absurdité de cette guerre, les tragédies qui en ont résulté ne comptent nullement dans leurs calculs. De toute manière, pour reprendre leurs propos, «les civils palestiniens sont la responsabilité de la communauté internationale» et le nombre des victimes a peu de poids parce qu’ «il y a suffisamment de femmes palestiniennes pour en accoucher d'autres». De plus, le prolongement de la guerre sert largement leurs intérêts politiques, médiatiques et stratégiques.
La sagacité de la politique israélienne n'a d'autre pendant que son efficacité opérationnelle si l'on veut un épilogue à ces cycles de violence aux auto-engendrements continus. Cette opération s'inscrit également dans le prolongement des luttes intestines au sein du Hamas. La rivalité entre les commanditaires du Qatar et le commandant de terrain, Ezzedine al-Haddad, ouvre la voie à une négociation entre Israël et celui-ci, lequel a, en effet, fait part de sa volonté de mettre fin à la guerre. La fin de la guerre correspond à l'achèvement de l'entreprise terroriste du Hamas qui s'est emparée de la titulature palestinienne qui a mené à ce désastre dans ses figurations multiples. Ces profils sont symptomatiques d'une ère, d'un climat idéologique et d'une configuration géostratégique liées à la morbidité foncière de la militance palestinienne et à son tableau clinique et pénal.
Cette opération, de par sa dynamique interne, devrait ouvrir la voie à la fin imminente de la guerre à Gaza et amorcer l'étape politique. La naïveté et l'impertinence des diplomaties occidentales en disent long sur les apories intellectuelles des démocraties et leurs incidences sur les politiques concrètes. Quelles que soient les déconvenues circonstancielles et leurs coûts prohibitifs, la politique israélienne vise juste et fait preuve de son opportunité.
Cette politique est, par voie de conséquence, liée à l'ensemble du champ stratégique proche-oriental. La fin du Hezbollah s'inscrit inévitablement dans la même dynamique et ses modulations géostratégiques. Il est impossible de stabiliser le Liban alors que le pays est phagocyté par une politique ingestive qui a entamé la structure étatique au bénéfice d'un faux-semblant institutionnel dûment instrumenté par la politique de domination chiite pilotée par le régime iranien. Il faudrait, en somme, mettre fin à un conglomérat qui s'est construit dans les interstices des extraterritorialités politique, stratégique et criminelle.
La mutation politico-stratégique actée par la stratégie israélienne et ses doubles diplomatiques américains ont redonné à l'État libanais la chance de réaffirmer sa centralité politique après des décennies de relégation et d'instrumentalisation par les condominiums alternatifs (Égypte nassérienne des années 50, coalition palestino-gauchiste, Syrie alaouite et baathiste, régime iranien). La réhabilitation de la souveraineté libanaise ne se limite pas à la réquisition des armes illégales, elle déborde sur des enjeux nomothétiques et politiques qui se rapportent à la légitimité nationale du Liban, à celle de ses institutions et à l'effectivité de sa gouvernance.
La souveraineté nationale n'est plus un enjeu nominal, il s'agit d'enjeux politiques effectifs qui mettent fin aux abîmes entre le pays réel et celui d'une fiction juridique qui cherche à s'accréditer de manière continue. La réhabilitation de la souveraineté libanaise est déterminante tant au niveau interne que régional. Or, les politiques de subversion alternées ont rendu la tâche impossible. Le dernier épisode en question est décisif, car le principe d'extraterritorialité dont il excipe rend invraisemblable toute démarche dans cette direction. Le Liban est mis au défi, celui de sa restructuration politique et stratégique. Ou alors il sera voué à des entropies proliférantes dans tous les sens qui finiront par abattre le projet national libanais et son inscription étatique, le fait national libanais n'étant plus en mesure de s'accommoder des variantes de souveraineté discrétionnaire, limitée ou entièrement neutralisée.
Reste à savoir si la destruction des plateformes opérationnelles adventices va suffire ou s'il est impératif d'en finir avec le régime iranien et ses émules islamistes. De la même manière, les changements de narratif et de configurations géostratégiques se font écho.
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