
Une législation israélienne encadrant les ONG étrangères est de plus en plus utilisée pour refuser leurs demandes d’apporter de l’aide dans la bande de Gaza, selon une lettre signée par plus de cent ONG publiée jeudi.
Les relations entre les ONG soutenues par l’étranger et le gouvernement israélien ont longtemps été marquées par des tensions, les autorités accusant souvent ces ONG de partialité. Ces tensions se sont accentuées après l’attaque sans précédent du Hamas contre Israël, déclenchant la guerre en octobre 2023.
«Les autorités israéliennes ont rejeté les demandes de dizaines d’ONG pour apporter des biens de première nécessité [à Gaza], affirmant que ces organisations +ne sont pas autorisées à fournir de l’aide+», indique la lettre. Parmi les signataires figurent Oxfam et Médecins sans frontières (MSF). Rien qu’en juillet, au moins 60 demandes d’aide ont été refusées.
La lettre cite l’exemple de l’ONG Anera, qui dispose de plus de 7 millions de dollars de fournitures vitales prêtes à entrer à Gaza, dont 744 tonnes de riz, suffisantes pour six millions de repas, mais bloquées à Ashdod, à quelques kilomètres seulement de Gaza. Care et Oxfam se trouvent dans une situation similaire avec 1,5 million et 2,5 millions de dollars de fournitures.
Le gouvernement israélien a approuvé en mars un nouvel ensemble de règles encadrant les ONG étrangères travaillant avec les Palestiniens. Leur enregistrement peut être refusé si les autorités estiment qu’un groupe «nie le caractère démocratique d’Israël» ou «promeut des campagnes de délégitimation» contre le pays.
«Malheureusement, de nombreuses organisations d’aide servent de couverture pour des activités hostiles et parfois violentes», a déclaré le ministre de la Diaspora, Amichai Chikli. «Les organisations n’ayant aucun lien avec des activités hostiles ou violentes se verront accorder l’autorisation d’opérer», a-t-il ajouté.
Distributions meurtrières
Les ONG dénoncent l’impact de ces règles sur les civils. «Notre mandat est de sauver des vies, mais en raison des restrictions liées à l’enregistrement, les civils se retrouvent sans nourriture, ni médicaments, ni protection dont ils ont un besoin urgent», explique Jolien Veldwijk, directeur de Care dans les territoires palestiniens.
La lettre accuse Israël d’utiliser le système d’enregistrement pour bloquer davantage l’aide, alors que des milliers de Gazaouis se pressent chaque jour vers les centres de distribution gérés par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), soutenue par les États-Unis. Ces opérations se déroulent souvent dans le chaos et sous les tirs israéliens pour tenter de contrôler les foules.
Depuis le 27 mai, au moins 1.373 Palestiniens ont été tués à Gaza, la plupart par des tirs israéliens «alors qu’ils cherchaient de la nourriture», selon l’ONU. Les ONG étrangères et l’ONU ont refusé de coopérer avec la GHF, l’accusant de servir les besoins militaires d’Israël.
Les ONG craignent aussi d’être interdites d’activité en Israël et dans les territoires palestiniens si elles ne transmettent pas au gouvernement israélien des informations sensibles sur leur personnel palestinien. La date limite pour ces données est fixée à septembre, après quoi certaines organisations pourraient être contraintes de cesser leurs opérations à Gaza et en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, et de retirer tout leur personnel international sous 60 jours.
Par Hervé BAR/AFP
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