
La Commission parlementaire de l’environnement s’est réunie mercredi au Parlement, sous la présidence du député Ghayath Yazbeck, en présence de la ministre de l’Environnement, Tamara el-Zein, et du ministre des Finances, Yassine Jaber.
Les discussions ont porté sur un amendement de l’article 28 de la loi n°80/2018, afin de permettre aux municipalités de facturer le traitement des déchets au coût réel dans la monnaie en circulation – une mesure jugée nécessaire face à l’épuisement du fonds indépendant des municipalités et à l’incapacité du ministère des Finances de financer ce service.
Mais au-delà de ce débat technique, une question plus large se pose: où en est-on réellement par rapport à la question des déchets au Liban?
Production et évolution des déchets
En 2018, la production nationale de déchets solides était estimée à environ 2.679.992 tonnes par an, soit environ 7.300 tonnes par jour, selon un rapport publié en 2024 par le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR).
Toujours d’après ce document, la crise économique a entraîné une baisse d’environ 25% en 2022, pour atteindre 5.600 tonnes/jour. Ces volumes «ne devraient pas retrouver le niveau de 2018 avant cinq à sept ans», peut-on lire dans le rapport.
En termes de composition, la Banque mondiale indique que la part des déchets organiques est passée de 50-55% en 2017 à 69-72% en 2021, tandis que le papier/carton est passé de 15-17% à 4-5% et le plastique de 10-13% à 11-14% sur la même période.
Capacités de traitement et modes d’élimination
Selon le rapport du CDR, le Liban dispose théoriquement d’une capacité de traitement de 6.390 tonnes/jour, suffisante pour absorber la production actuelle, mais seules 440 tonnes par jour sont effectivement traitées, soit 7,9% des déchets générés, constituant seulement 6,8% de la capacité de traitement.
D’après la même source, on précise que 98,7% des déchets sont éliminés dans des décharges contrôlées ou sauvages, contre 77,3% en 2018.
D’après la Banque mondiale, la part allant spécifiquement vers des décharges à ciel ouvert, brûlée ou abandonnée dans l’environnement, est passée de 22% en 2018 à 42% en 2022.
Selon le CDR, huit décharges en activité reçoivent environ 3.182 tonnes par jour, dépassant leur capacité de conception, et le nombre de décharges sauvages est estimé à 1.000 sites au moins.
Le CDR rapporte également que les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) représentaient 46.000 tonnes en 2021, mais seulement 0,09 kt ont été traitées de manière écologique. Les pneus usagés sont estimés à 20.000 tonnes par an, avec seulement trois installations officielles de collecte et de recyclage.
Coût et gouvernance du secteur
Avant la crise de 2019, le coût total pour l’État était d’environ 180 millions de dollars par an, tandis que le coût de la dégradation environnementale liée aux déchets atteignait environ 200 millions de dollars par an, selon la Banque mondiale.
Aujourd’hui, les municipalités consacrent entre 75 et 100% de leur budget à la collecte et au traitement des déchets, allant parfois jusqu’au déficit.
À force d’empiler les solutions temporaires, le pays risque de transformer sa crise des déchets en héritage permanent, un legs toxique que les générations futures n’auront d’autre choix que de payer.
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