Explosion de Zebqine: les hypothèses se multiplient après la mort de six militaires
©Ici Beyrouth

Six soldats libanais ont perdu la vie, samedi 9 août, dans une violente explosion survenue dans la vallée de Zebqine, près de Majdel Zoun, dans le caza de Tyr. Membres de l’unité de génie, ils participaient à une opération visant à neutraliser un dépôt de munitions aux côtés de membres de la cinquième brigade, lorsque la déflagration s’est produite.

Ce drame intervient à un moment particulièrement sensible. Quelques jours auparavant, le Conseil des ministres avait confié à l’armée la mission d’élaborer, d'ici à la fin de l’année, un plan de désarmement du Hezbollah et des autres groupes armés – un objectif auquel la formation pro-iranienne demeure farouchement opposée.

Deux jours seulement avant l’explosion, la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) avait annoncé la découverte, dans la même zone, d’un réseau de tunnels fortifiés abritant des pièces d’artillerie, des missiles et des mines antichars. Les deux événements se sont produits au sud du Litani, dans la région placée sous le régime du cessez-le-feu conclu le 27 novembre 2024.

Ces coïncidences ont renforcé la crispation déjà palpable entre l’exécutif libanais et le Hezbollah. Sur les réseaux sociaux, certains ont rappelé les déclarations récentes du député Mohammad Raad, qui affirmait qu’en cas de saisie d’armes par l’armée, son parti «saurait exactement quoi faire» et que la décision gouvernementale mettait en péril la paix civile.

Trois hypothèses

Selon une source militaire de haut rang ayant requis l’anonymat, trois scénarios sont considérés comme plausibles.

Le premier est celui d’une erreur de manipulation lors de l’opération. Bien que les soldats concernés soient des spécialistes du déminage et de la neutralisation d’explosifs, la manipulation de munitions anciennes ou instables comporte toujours un risque. Un simple choc, une mauvaise coupe dans un détonateur ou une évaluation erronée de la charge peuvent suffire à déclencher une explosion.

La deuxième hypothèse évoque un dysfonctionnement technique des munitions elles-mêmes. Avec le temps, l’humidité ou la corrosion peuvent altérer les composants internes, rendant les engins explosifs imprévisibles et susceptibles de se déclencher spontanément. Si ce scénario se confirmait, il poserait la question des conditions dans lesquelles ces munitions étaient stockées avant leur prise en charge par l’armée.

La troisième piste, la plus lourde sur le plan politique, serait celle d’un piège délibérément installé. Un mécanisme explosif pourrait avoir été dissimulé dans le dépôt de manière à se déclencher lors d’une tentative de désarmement. Une telle action viserait à décourager toute saisie d’armes et à envoyer un signal au gouvernement sur l’impossibilité, selon ses auteurs, de mener à bien un processus de désarmement sans pertes humaines importantes.

«Si cette thèse se confirmait, elle pourrait non seulement mettre un coup d’arrêt aux opérations en cours, mais aussi aggraver considérablement les tensions entre l’armée et le Hezbollah», avance-t-on de même source.

Quant à l’éventualité d’une intervention israélienne, la source précitée écarte cette hypothèse, estimant qu’aucune incursion de l’armée israélienne n’a été observée à Zebqine.

L’incident rappelle un précédent survenu en avril dernier à Breiqaa, dans la région de Nabatiyé, où trois militaires avaient trouvé la mort et cinq civils avaient été blessés dans l’explosion de munitions transportées par l’unité de génie.

L’enquête actuelle devra déterminer si l’explosion de Zebqine relève d’un accident, d’un acte volontaire ou d’un autre scénario encore à éclaircir, sur fond de tensions politiques persistantes autour de la question du désarmement.

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