
Dans un mois jour pour jour, le Liban devra faire face à l’un des enjeux les plus importants de cette phase ultrasensible de son histoire. En effet, fin août, la prorogation du mandat de la Finul sera soumise à un test décisif: soit il sera renouvelé pour une année supplémentaire, soit la mission prendra fin, si Israël parvient à imposer sa volonté au Conseil de sécurité.
Le Liban a officiellement adressé une lettre au Conseil de sécurité, appelant au renouvellement du mandat sans rien changer aux règles d’engagement, alors que circulent des informations préoccupantes sur des tentatives visant à mettre fin à la mission. Dans ce contexte, le Premier ministre, Nawaf Salam, s’est rendu à Paris d’où il est revenu porteur de garanties, notamment celles du président Emmanuel Macron. En effet, celui-ci lui a assuré que la France restera aux côtés du Liban en toutes circonstances et réitéré l’attachement de Paris au maintien de la Finul dans le Sud.
Dans ce contexte, une question centrale demeure: le renouvellement pourra-t-il avoir lieu sans modification du mandat et de ses prérogatives, comme le réclame le Liban? Il faut rappeler qu’Israël exerce une pression considérable sur Washington pour mettre fin à la mission de la Finul qu’il juge inefficace. Aux yeux de l’État hébreu, la force onusienne a échoué à faire appliquer la résolution 1701, à empêcher le Hezbollah d’installer des positions militaires, des dépôts d’armes et des rampes de lancement de roquettes, et ses patrouilles cèdent trop souvent face aux objections d’un «parti» bien ancré dans la population.
Selon certains milieux diplomatiques, à défaut d’obtenir la suppression pure et simple de la mission, Israël, avec l’appui de Washington, chercherait au minimum à en modifier le mandat. Une orientation à laquelle la France s’oppose vivement, redoutant que le départ de la Finul ne précipite une explosion régionale et ne conduise à un conflit généralisé.
Un diplomate français confie que Paris serait parvenu à convaincre Washington de préserver la présence des Casques bleus et de renouveler leur mandat, malgré l’hostilité d’Israël, qui juge leur rôle désormais inutile.
Depuis que Morgan Ortagus a pris en charge le dossier libanais (en tant qu’adjointe de l’ambassadrice américaine à l’ONU, Dorothy Shea, ex-ambassadrice au Liban), et qu’elle a été remplacée par le diplomate chevronné Tom Barrack, elle aurait, à la veille du vote sur le renouvellement du mandat de la Finul, entamé une série de rencontres avec des membres influents de la diaspora libanaise. Son objectif: relancer la feuille de route avortée lors de son précédent passage au Liban, axée sur la délimitation des frontières et le désarmement du Hezbollah.
Selon certaines sources diplomatiques européennes, Ortagus plaide en faveur d’une révision du mandat de la Finul garantissant une plus grande liberté de mouvement et d’intervention. Cette révision inclurait notamment l’autorisation de mener des opérations sur les dépôts d’armes, d’interpeller des individus et de recourir à la force en cas de légitime défense.
Des responsables libanais ont été informés par des sources occidentales des grandes lignes de cette feuille de route. Morgan Ortagus devrait par ailleurs se rendre au Liban avant le vote du Conseil de sécurité.
Dans ce contexte, le président Macron a assuré au Premier ministre Salam que la France, qui a la main sur ce dossier, œuvre pour un renouvellement fluide et a réussi à convaincre Washington des risques d’une explosion en cas de retrait.
Selon certains milieux, un large consensus international se dessine en faveur d’un renouvellement du mandat de la Finul sans modification, tout en rejetant les exigences israéliennes, notamment l’amendement des règles d’engagement ou le recours au Chapitre VII de la Charte de l’ONU.
Face à ce refus de modification, les États-Unis ont menacé d’opposer leur veto, ce qui signifierait la fin pure et simple de la mission. Toutefois, Washington aurait infléchi sa position, prenant conscience qu’un retrait de la Finul risquerait de provoquer une explosion régionale, de compromettre les efforts de paix engagés par Donald Trump et de replonger la région dans un cycle de guerre.
Partant, les États-Unis envisageraient plutôt d’intensifier leurs pressions pour renforcer le rôle de la Finul via un ajustement de ses prérogatives afin de la rendre plus efficace sur le terrain. Ce renforcement passerait par l’élargissement de sa zone d’intervention dans le Sud, dans l’Est et en mer, notamment après la délimitation des frontières terrestres et maritimes avec la Syrie, dans l’objectif de lutter contre la contrebande d’armes et de contrôler les points de passage frontaliers.
Washington, Paris et Riyad œuvrent pour une délimitation rapide de la frontière libano-syrienne, tout en visant une stabilisation durable de la frontière sud avec Israël qui, en vertu de l’accord d’armistice de 1949, avait reconnu les frontières sans en contester le tracé.
Selon certaines sources, un élargissement des prérogatives de la Finul ne nécessiterait pas de nouvelle décision du Conseil des ministres libanais, les dispositions y afférentes étant déjà incluses dans le texte de la résolution en vigueur.
En cas d’échec, Washington pourrait se rabattre sur une réduction du budget de la Finul, comme l’a évoqué Emmanuel Macron lors de sa rencontre avec Salam. Une telle mesure s’inscrirait dans la politique de réduction des dépenses onusiennes adoptée par Donald Trump, déjà illustrée par le retrait des États-Unis de l’Unesco. Mais, une coupe budgétaire aurait pour effet de réduire les effectifs de la Finul, à un moment où son renforcement semble pourtant crucial.
Selon les mêmes sources, la France et d’autres États contributeurs se disent prêts à combler ce vide financier. Emmanuel Macron, de son côté, n’exclut pas certains ajustements de la résolution, à condition qu’ils garantissent une liberté de mouvement sans altérer la nature de la mission.
Malgré les garanties françaises, le sort de la Finul demeure incertain à l’approche de la fin août, d’autant plus qu’Israël ne souhaite plus la présence d’une surveillance internationale dans le Sud, qui pourrait documenter ses violations du cessez-le-feu et de la résolution 1701, surtout dans la période à venir.
Commentaires