
Le Liban peine à relancer ses projets d’exploration pétrolière et gazière dans sa zone économique exclusive. La société française TotalEnergies semble totalement absente du processus, bien que le bloc n°9 reste officiellement sous sa responsabilité. Aucun signe concret ne laisse présager une reprise imminente, à l’exception de l’intention de l’Autorité de gestion du secteur pétrolier de lancer une campagne de prospection sismique dans le bloc n°8. Cependant, en l’absence d’avancées tangibles, et en coordination avec le ministère de l’Énergie, cette autorité pourrait être contrainte de prolonger une nouvelle fois le troisième cycle de licences, qui arrive à échéance en novembre prochain, alors qu’aucune entreprise ne s’est encore portée candidate à ce jour.
Dans l’attentisme ambiant, la relance du processus de délimitation des frontières maritimes avec Chypre apparaît comme un développement positif. Si ce processus aboutit, cela pourrait créer un environnement plus favorable aux investisseurs potentiels dans les blocs libanais, en particulier ceux situés à proximité de la ligne de démarcation maritime entre le Liban et Chypre. Pour rappel, celle-ci s’étend sur près de 95 milles nautiques, du point 23 au sud, également partagé avec Israël, jusqu’au point 7 au nord, partagé avec la Syrie.
Pour l’expert en affaires énergétiques Roudi Baroudi, ces négociations sont de bon augure: «Finaliser la délimitation de la frontière maritime avec Chypre constitue une excellente nouvelle pour le Liban. C’est un dossier à forte portée stratégique et économique. Le président Joseph Aoun semble déterminé à mener ce dossier à terme, là où d’autres ont échoué.»
Il a exprimé l’espoir que cette affaire soit traitée avec compétence, notamment en finalisant les nominations au sein de l’Autorité de gestion du secteur pétrolier et en renforçant son autonomie. Selon lui, cela permettrait à cette instance de suivre efficacement les négociations avec les Chypriotes et les Syriens, tout en accompagnant les entreprises internationales dans les futures attributions de blocs maritimes.
Les divergences techniques restantes ne sont pas, selon Baroudi, insurmontables:
«Le différend autour du point 7, situé dans les eaux du nord, peut être résolu dans le cadre du droit international. Le Liban et Chypre sont tous deux signataires de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, tandis que la Syrie détient le statut d’observateur. En effet, avec les technologies actuelles de délimitation, notamment celles reposant sur l’imagerie satellite, la marge d’erreur est quasi nulle.»
Les données géospatiales révèlent que les blocs libanais 1, 3 et 5 chevauchent partiellement plusieurs blocs chypriotes sur des distances allant de 233 mètres à 4,8 kilomètres. Inversement, certains blocs chypriotes empiètent sur les eaux libanaises sur environ 1,1 kilomètre. Il est à noter que lors des opérations sismiques menées par les Chypriotes en 2015, une épave avait été localisée à proximité du bloc 3, côté libanais. Nicosie avait alors informé les autorités libanaises, sans recevoir de réponse de leur part.
L’expert en énergie Roudi Baroudi estime que «la coopération libano-chypriote s’annonce à ce stade plus fluide que par le passé, d’autant que le premier chef d’État à avoir rendu visite au président de la République, le général Joseph Aoun, après son élection, a été le président chypriote Nikos Anastasiadis, le 10 janvier dernier».
Par ailleurs, Baroudi souligne que le dossier des frontières maritimes avec la Syrie devrait également faire l’objet d’un processus de négociation rapide, en vue d’un règlement accessible. Il rappelle que les premières étapes en ce sens ont été amorcées en Arabie saoudite, où le ministre de la Défense saoudien, le prince Khalid ben Salmane, a réuni ses homologues libanais Michel Menassa et syrien Merhaf Abou Qasra. Il s’ensuivit une réunion à l’Élysée, qui a rassemblé les présidents français, libanais, chypriote et grec, avec la participation du président syrien par visioconférence.
Selon les données disponibles, les blocs maritimes syriens empiètent sur les blocs libanais situés au nord sur une superficie d’environ 652 km², tandis que le chevauchement des blocs libanais sur les eaux syriennes couvre environ 69 km².
La délimitation des frontières maritimes entre le Liban et la Syrie, ainsi que l’accord sur le point n°7 – commun au Liban, à la Syrie et à Chypre – nécessitent, en définitive, une décision politique de la part de Damas pour clore ce dossier, dans la mesure où les positions de Beyrouth et de Nicosie sont déjà arrêtées. L’essentiel, d’après certaines sources, est que les autorités syriennes ne se laissent pas influencer par d’éventuelles tentatives de blocage émanant d’acteurs extérieurs, notamment de la Turquie.
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