
L’attentat sanglant du 22 juin contre l’église Mar Élias à Damas, qui a coûté la vie à au moins 25 personnes, a ramené sur le devant de la scène une vieille menace: celle du groupe État islamique, communément appelé Daech.
Le groupe terroriste semblait affaibli ces dernières années. Pourtant, une nouvelle structure jihadiste affiliée, «Saraya Ansar al-Sunna», a revendiqué l’attaque, promettant de cibler les minorités alaouite, chiite et druze, ainsi que les partisans de l’ancien régime syrien.
Un nom aux résonances suspectes
Derrière le nom d'«Ansar al-Sunna» se cache cependant une réalité plus complexe. L’appellation n’est pas anodine. Historiquement associée à la mouvance jihadiste sunnite, elle aurait eu plus de sens durant les années les plus intenses du conflit syrien, lorsque des groupes comme Jabhat al-Nosra dominaient certaines régions. Mais aujourd’hui, alors que le pouvoir syrien est majoritairement sunnite et bénéficie d'un soutien local et international, le recours à cette rhétorique semble déplacé, voire artificiel.
Certains analystes n’hésitent pas à voir dans cette appellation l’empreinte d’un discours fabriqué en dehors du contexte syrien, avec des accents libanais bien marqués.
Des connexions anciennes et bien documentées
L’histoire de Daech, depuis sa genèse sous Abou Moussab al-Zarqaoui jusqu’à son expansion en Syrie et en Irak, révèle des connexions ambiguës entre le groupe et des services de renseignement régionaux. À l’époque de sa formation, le groupe comptait dans ses rangs de nombreux anciens officiers baathistes, notamment irakiens, qui ont structuré l’organisation comme une entité militaire et sécuritaire efficace.
Des documents et témoignages crédibles suggèrent que certaines antennes médiatiques de Daech émettaient depuis la Syrie, sous la protection des services syriens. Une réalité qui jette une ombre sur les prétentions d’indépendance idéologique du groupe.
Un outil au service d’intérêts géopolitiques?
Chaque fois que le régime syrien de Bashar el- Assad ou son allié iranien traversent une période de tension, Daech semble réapparaître opportunément, comme pour détourner l’attention ou créer une nouvelle donne sécuritaire. Ce n’est pas un hasard si plusieurs experts comparent le groupe à une entreprise à actionnariat multiple, au sein de laquelle chacun tire profit à sa manière du chaos généré.
L’attaque de Damas survient ainsi dans un contexte régional chargé, entre pressions économiques sur l’Iran, incertitudes au Liban et équilibres fragiles en Irak. Le retour de Daech pourrait donc servir plusieurs agendas, bien au-delà des slogans religieux.
Vigilance et lucidité
Il ne faut pas sous-estimer la capacité de nuisance de Daech, mais il est tout aussi important de comprendre qui tire profit de sa résurgence. La lutte contre le terrorisme passe aussi par la mise à nu de ses instigateurs et par une lecture lucide des dynamiques régionales qui transforment les groupes jihadistes en outils au service de puissances bien réelles.
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