Juliette Fievet: la voix bienveillante qui dévoile les coulisses du rap
L’animatrice radio et télé Juliette Fievet pose lors d’une séance photo à Paris, le 24 février 2025. ©Joel SAGET / AFP

Journaliste et animatrice sur RFI et France 24, Juliette Fievet s'impose avec son émission Légendes urbaines, où elle dresse des portraits humains et intimes d'artistes souvent méconnus du grand public. Elle privilégie l’écoute et la transmission, loin des clichés et des clashs.

Booba et Ninho se sont livrés à son micro : la journaliste et animatrice française Juliette Fievet s'est donné pour mission de montrer la face B des artistes, notamment des rappeurs, qu'elle accueille dans Légendes urbaines, sur RFI et France 24.

Elle aime le répéter, le credo de son émission hebdomadaire, qui cumule des millions de vues et d'écoutes, également sur YouTube, tient en un mot: la «bienveillance», dit-elle à l'AFP.

«Peu importe si les gens trouvent ça stupide ou gnangnan», balaie cette tornade quadra avec un franc sourire.

«Ma responsabilité, c'est d'envoyer du love» (de l'amour, ndlr), considère Juliette Fievet, désireuse de donner «des bouffées d'oxygène aux gens» sur des médias à l'actualité internationale souvent lourde.

«Ce qui m'intéressait, ce n'était pas de parler de musique, c'était de montrer quels étaient les êtres humains derrière cette culture», ajoute cette figure de l'audiovisuel public français destiné aux publics étrangers.

«L'idée n'était pas de faire de la démonstration, de dire: regardez, on n'est pas si cons que vous pensez. Mais il faut parfois admettre qu'il est important aussi de pouvoir faire des ponts auprès de gens qui n'ont pas les codes» du rap, observe-t-elle.

L'animatrice l'assure: derrière les clichés, il y a des histoires à raconter. Exemple? Kalash Criminel, «un mec qui a une cagoule et pour gimmick Sauvagerie!» mais qui cache «un humaniste», «hyper calé en géopolitique».

Le rappeur a en effet créé une association de lutte contre les discriminations envers les personnes albinos - il l'est lui-même - et la maltraitance animale.

En installant cette proximité avec ses invités et en bannissant le clash, elle a toutefois prêté le flanc aux critiques sur une supposée complaisance, comme face à Booba en 2021.

«Le nombre de journalistes qui m'ont dit : +pourquoi tu n'as pas parlé de l'aéroport+ ?», en référence à la bagarre entre les rappeurs Booba et Kaaris à l'aéroport d'Orly près de Paris en 2018, relève Juliette Fievet.

«Mais Booba, il a une carrière de trente ans ! Il a fait un milliard de choses dans sa vie, pourquoi veux-tu que je lui parle de l'aéroport ? (...) Il en parle largement sur ses réseaux sociaux, on n'est pas là pour ça», rétorque-t-elle.

«C'est une vraie interview, elle n'est pas là juste pour te caresser dans le sens du poil», estime de son côté le rappeur francilien Souffrance, passé à son micro en 2023.

En préambule, la maîtresse des lieux déroule une présentation fouillée de son invité, histoire de «poser le cadre» et «éviter les questions Wikipédia».

«Tu sens qu'elle t'amène à te confier. Mais c'est parce qu'elle envoie tellement d'amour qu'à un moment donné, tu te sens tellement bien», remarque Souffrance, louant cet espace «de visibilité, de discussion».

L'attrait de Juliette Fievet pour la sphère hip-hop remonte à ses jeunes années : pour cette ado métisse «révoltée» contre les «injustices du monde», la découverte de cette culture et en particulier du rap, musique contestataire par essence, est une révélation.

C'est aussi une fenêtre sur le monde depuis la bourgade de Fournes-en-Weppes (nord de la France) pour la jeune fille, adoptée bébé par une famille de «Ch’tis» mélomanes.

Dans les années 2000, elle se fait un nom dans le management d'artistes, à l'image des rappeurs Kery James et du groupe 113, mais aussi de la popstar internationale Nelly Furtado.

Pour l'avenir de Légendes urbaines, la fonceuse Fievet qui fourmille de projets, imagine encore plus d'éclectisme. Elle a déjà reçu des acteurs (Omar Sy, Claudia Tagbo, Jean-Pascal Zadi) et des humoristes (Malik Bentalha, Manu Payet, Alex Lutz).

Pour son investissement, elle doit être nommée, début juillet, chevalier de l'ordre de la Pléiade, une distinction qui récompense des personnalités «servant les idéaux de la francophonie».

Avec AFP

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