Benjamin Hassan: le rêve brisé, la fierté intacte
Premier Libanais à jouer à Roland-Garros, Hassan tombe, mais entre dans l’histoire. ©Photo tirée de la page Instagram de Benjamin Hassan

Il quitte Roland-Garros sur une défaite, mais entre dans l’histoire: Benjamin Hassan a inscrit son nom en lettres rouges sur la terre battue parisienne. Le tennis libanais tient son pionnier.

Il y a des défaites qui ont le goût d’une victoire. Celle de Benjamin Hassan, battu par l’Italien Matteo Gigante (4-6, 2-6, 0-6), au premier tour de Roland-Garros, en est une. Le score est sec, l’issue irréversible, mais le symbole est immense. Pour la première fois dans l’histoire, un joueur de tennis libanais a disputé un match du tableau principal de Roland-Garros. Rien que cela.

Dans ce match face au 167e mondial, plus expérimenté et soutenu par toute la structure fédérale italienne, Hassan s’est bien défendu, notamment dans un premier set de haute intensité (42 minutes), avant de céder face à la régularité et à la puissance du Transalpin. Mais l’essentiel était ailleurs. Le Liban, empêtré dans ses crises à répétition, privé d’infrastructures et de toute politique sportive sérieuse, a vu l’un de ses fils s’inviter parmi les plus grands, sur la terre rouge du prestige et des légendes.

Une performance historique

Né en Allemagne d’un père libanais, Benjamin Hassan (221e à l’ATP) avait réussi l’exploit de se qualifier pour le tableau principal sans perdre un seul set en deux tours, éliminant le Français Sascha Gueymard Wayenburg, puis le Japonais James Trotter. Une performance déjà exceptionnelle en soi, réalisée alors qu’il n’était pas au meilleur de sa forme. «J’étais un peu malade, mais j’ai trouvé mon rythme ici, à Paris», avait déclaré Hassan à l’issue de sa qualification. «J’ai essayé de finir les matchs rapidement pour préserver mon énergie.»

En se hissant dans le tableau principal, il a écrit une page d’histoire comme le premier joueur libanais à se qualifier pour Roland-Garros, un des quatre tournois du Grand Chelem. Il rejoint ainsi Hady Habib, son compatriote, auteur d’un parcours similaire, en janvier dernier, à l’Open d’Australie, confirmant l’émergence d’un tennis libanais ambitieux malgré le manque de moyens.

L’absence de soutien officiel

Le contraste est cruel: d’un côté, l’Italie de Gigante, nation du tennis avec des clubs, des infrastructures, des coaches, des sponsors, un soutien étatique et fédéral massif. De l’autre, Benjamin Hassan, qui s’entraîne en Allemagne, ne bénéficie d’aucun accompagnement structuré de la part du Liban, si ce n’est l’élan moral d’une diaspora qui vibre derrière lui à chaque point marqué.

«Je reçois des messages du monde entier. C’est incroyable de sentir que tout un peuple me soutient», expliquait-il encore. Mais les messages ne remplacent pas les financements, ni les conditions d’entraînement, ni les wild cards, ni les préparateurs physiques. Et pourtant, le Liban était là – en silence, en fond d’écran, incarné par Hassan – sur le Philippe-Chatrier ou sur un court annexe.

Paris, la ville des secondes chances

Ce n’est pas la première fois que Paris est le théâtre de ses exploits. L’année dernière, il avait échoué de peu à se qualifier. Quelques mois plus tard, lors des Jeux olympiques de Paris, il était devenu le premier joueur libanais à disputer un tournoi olympique de tennis, y remportant même un match contre l’Américain Christopher Eubanks.

Cette fois, l’étape est plus grande encore. Malgré l’élimination, le nom de Benjamin Hassan est désormais inscrit dans les annales du tennis libanais. Un pionnier, un phare, une flamme qui éclaire un avenir encore flou, mais porteur d’espoir.

«Ce que j’ai accompli ici, c’est une étape majeure pour le tennis libanais», affirmait-il. «J’espère inspirer les jeunes, montrer qu’avec du travail, même les plus grands rêves sont accessibles.»

Une leçon au-delà du sport

Il reste un message à retenir: le talent existe, mais il a besoin d’être reconnu, soutenu et encouragé. Benjamin Hassan a fait sa part. Au Liban maintenant d’en tirer les leçons. Le rêve s’est brisé, mais le sillon est tracé. La fierté, elle, est là – solide comme la ligne de fond.

 

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