Les festivals face à la crise budgétaire réinventent leur avenir
La chanteuse française Laure Gonnet, alias Styleto, se produit sur scène lors de la 49e édition du festival de musique Printemps de Bourges, à Bourges, dans le centre de la France, le 16 avril 2025. ©Guillaume SOUVANT / AFP

Confrontés à la baisse des subventions et à l'évolution des publics, les festivals de musique doivent repenser leur modèle économique. Une mutation nécessaire mais difficile, dans un secteur où la solidarité devient vitale.  

Confrontés à des baisses de budget et à l’évolution des attentes du public, les festivals de musique sont contraints de repenser leur modèle, mais peinent à trouver des solutions collectives dans un secteur en plein bouleversement.

«Face aux difficultés, il y a en réponse une forte nécessité de collectif à l’intérieur du secteur, mais aussi de dialogue avec les collectivités pour pouvoir anticiper l’avenir», affirme David Demange, directeur de la SMAC (Scène de musiques actuelles) La Rodia et du festival Détonation à Besançon.

Les festivals, déjà bousculés par une offre toujours plus importante d’événements, l’évolution de la consommation de la jeune génération et toujours plus à la merci des caprices météorologiques, doivent aussi composer avec les récentes baisses de subventions décidées par les collectivités, dans un contexte de restrictions budgétaires défavorables au milieu culturel.

«Le combat doit devenir politique et idéologique pour préserver notre pacte culturel» d’importantes menaces, lance le maire de Bourges Yann Galut (DVG), dont le Printemps de Bourges fait «partie de l’ADN de la ville».

Le festival, qui organise cette année sa 49ᵉ édition avec des stars comme Polnareff, Clara Luciani et Tiakola, n’a pas échappé à la première baisse de son budget en dix ans : en hausse en 2024, à environ 7,5 millions d’euros, il a été amputé de 400 000 euros pour 2025.

Ce constat est similaire à la situation d’autres festivals, dans une conjoncture économique de plus en plus tendue : «44% de ceux affichant des taux de remplissage supérieurs à 90% ont bouclé une édition déficitaire en 2024», selon le Centre national de la Musique (CNM).

«Afflux»

«On fait face à un afflux de demandes de financements, en hausse de 64% sur les festivals», détaille Jean-Baptiste Gourdin, le nouveau président du CNM.

«C’est le reflet des tensions qui pèsent sur le modèle économique de financement des acteurs», poursuit-il. «On alloue aujourd’hui beaucoup plus d’aides en nombre de bénéficiaires» qu’il y a cinq à six ans.

En déplacement au Printemps de Bourges mercredi, la ministre de la Culture Rachida Dati a annoncé que le CNM allait financer en 2025 et 2026 jusqu’à 24 millions d’euros d’investissement pour le «plan lieux», des fonds fléchés pour «favoriser la transition écologique, repenser la sécurité et le confort des spectateurs et améliorer l’accueil du public dans les salles et les festivals».

Mais la progression des aides «ne pourra pas se poursuivre éternellement», nuance Jean-Baptiste Gourdin.

«Il n’est pas raisonnable d’imaginer que le CNM puisse se substituer» aux désengagements de certaines collectivités territoriales, avertit-il, invitant à questionner le modèle de ces événements.

Une réflexion sur «la complémentarité des aides» afin d’avoir «la meilleure coopération possible» doit également être mise sur la table, estime Christopher Miles, directeur général de la création artistique au ministère de la Culture.

«Il faut accompagner les transformations, ne pas avoir de tabou, y compris sur la billetterie», avance aussi M. Miles, en référence notamment à la tarification dynamique. Cette modulation des prix selon la demande, déjà en vigueur dans d’autres secteurs comme l’aérien ou le ferroviaire, séduit l’industrie du live, qui y voit la promesse de recettes supplémentaires.

Autre piste : «il faut par exemple que l’argent du live, revienne au live avec des aides sélectives et que l’industrie musicale, à l’image du monde du cinéma, puisse créer une chaîne de valeurs qui permette à tout le monde de vivre», juge-t-il.

Parmi les initiatives, le groupe Combat (Les Inrockuptibles, Radio Nova, le festival Rock en Seine), présidé par l’homme d’affaires Matthieu Pigasse, a lancé mercredi Combat Rock, une plateforme de «mutualisation des moyens» pour fédérer des festivals indépendants ou associatifs. Un premier partenariat a été signé avec le festival breton La Route du Rock.

Par Tom MASSON / AFP

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