
Les Inouïs du Printemps de Bourges a ouvert ses portes mardi avec 32 artistes au programme, sélectionnés sur 4.000 candidatures reçues chaque année. Quarante ans après sa création, ce Festival tremplin dédié à l’émergence artistique n’a pas pris une ride. Le jury 2025 est présidé par l’auteur-compositeur-interprète français, Eddy de Pretto, lauréat en 2017.
Eddy de Pretto et Feu! Chatterton (groupe de rock) y ont fait leurs premières armes.
Depuis 40 ans, les Inouïs du Printemps de Bourges, qui s'est ouvert mardi, continuent de débusquer des «perles rares » et les accompagnent dans une industrie musicale bouleversée par le streaming.
«J'avais besoin d'une petite impulsion pour m'aider à développer mon projet», confie à l'AFP Alex Montembault, l'un des 32 artistes sélectionnés pour ce nouveau cru.
Le chanteur n'est pourtant pas un nouveau venu: il a interprété pendant plus de deux ans Marie-Jeanne, la serveuse automate dans la comédie musicale Starmania revisitée par Thomas Jolly.
«Même si j'ai fait partie d'une grosse machine», «mon projet perso est vraiment au tout début. Je repars un peu de zéro», assure-t-il.
C'est le point commun des Inouïs: tous en sont aux balbutiements de leur carrière, une phase délicate à négocier tant les fronts, comme les écueils, sont nombreux. À Bourges, ils viennent chercher conseils, outils et réseau professionnel pour se structurer.
Financé par de l'argent public et des partenaires privés, le dispositif s'appuie sur des antennes territoriales qui défrichent le terrain. Environ 4.000 candidatures sont reçues chaque année.
Depuis 1985, 1.600 artistes ont été accompagnés. Parmi eux, des noms bien connus du public comme Christine and the Queens (devenu Rahim Redcar), Petit Biscuit, Feu! Chatterton ou encore Hyphen Hyphen, l'ancien groupe de Santa.
Le jury 2025 est présidé par Eddy de Pretto, lauréat en 2017.
«Les bases»
Après un temps de résidence, cette nouvelle promo se retrouve à Bourges pour une «classe verte», un stage de professionnalisation.
«Voici ce que sont les différents métiers, ce que vous avez comme différents contrats, ce que sont les plateformes, les différents types de revenus. L'idée, c'est de leur donner les bases, les clés», explique Rita Sa Rego, directrice de Réseau Printemps, l'association qui chapeaute les Inouïs.
«C'est tellement important de savoir où on va au niveau de l'artistique, de faire une musique qu'on a vraiment envie de défendre, pas simplement pour répondre à une demande», considère aussi Alex Montembault.
Les sélectionnés doivent également se produire sur scène pendant 30 minutes, un axe majeur des Inouïs, même si tout ne tourne plus autour du live.
Entre la crise sanitaire et l'avènement des plateformes de streaming, «on ne consomme et on ne crée plus la musique de la même manière», relève Mme Sa Rego.
«Aujourd'hui, les artistes sortent des titres sur internet mais ils n'ont jamais fait de concert. Dans les années 80, ils étaient aguerris, c'est-à-dire qu'ils faisaient des concerts, mais il n'y avait pas les plateformes de streaming pour sortir des sons. C'est la grosse différence», note-t-elle.
Pour rester pertinents, les Inouïs ont donc pris en compte le volet numérique des projets artistiques. Mais hors de question de renier les concerts, l'autre jambe sur laquelle tout artiste émergent doit s'appuyer.
«Pour conquérir un public, vous avez besoin de faire du live», leur transmet la directrice.
«Maillage»
C'est aussi sur scène, samedi, que seront fêtés les 40 ans des Inouïs: neuf artistes - tous des anciens Inouïs, dont Fishbach, Voyou et Aupinard - s'empareront de titres qui ont marqué les débuts de chanteurs désormais reconnus.
Terrenoire, lauréat 2018 avant deux albums salués par la critique, en assure la direction musicale.
Aux yeux de Raphaël Herrerias, moitié de ce duo avec son frère Théo, les Inouïs se démarquent par un fonctionnement régionalisé, qui «décentralise la possibilité d'entrer dans ce milieu, dans cette industrie». Le «maillage territorial est extrêmement important», à l'heure de coupes dans les budgets culturels, glisse-t-il.
«Nous, on a bénéficié de ça», d'être «au contact des programmateurs» et «on a vu que ça a tout modifié», se souvient-il.
Pour émerger, les artistes ont le choix entre des dispositifs différents, parfois complémentaires, des Off de festivals (Bars en Trans) aux tremplins (Les Inrocks Lab). Les plateformes disposent aussi de leur programme, comme Radar, du géant suédois Spotify, et Deezer Next, créé en 2017 sur «un principe de coopération et d'accompagnement» dans la durée.
Par Fanny LATTACH / AFP
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