
Le chef druze, Walid Joumblatt, a accusé Israël d'instrumentaliser les druzes de Syrie en multipliant les ouvertures envers cette minorité, dans le cadre d'un vaste plan visant, selon lui, à tenter de morceler le Moyen-Orient en États communautaires.
"Israël continue de vouloir appliquer son plan de toujours (...) consistant à morceler la région en entités confessionnelles et à étendre le chaos", a-t-il déclaré dans un entretien accordé à l'AFP mercredi.
"Ils veulent annihiler Gaza, puis viendra le tour de la Cisjordanie (...), ils tentent de déstabiliser la Syrie, à travers les druzes mais d'autres aussi", a-t-il ajouté, dénonçant "un jeu dangereux".
Dès la chute du pouvoir à Damas de Bachar el-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël a envoyé des troupes dans une zone tampon démilitarisée du Golan, dans le sud-ouest de la Syrie, et tente de grignoter des territoires.
À Soueida, province du sud de la Syrie où sont concentrés les druzes, Israël a multiplié les gestes d'ouvertures. Elle leur a envoyé des colis humanitaires par l'entremise des druzes israéliens et autorisé des dignitaires religieux à se rendre en Israël le 15 mars malgré l'état de guerre entre les deux pays.
Début mars, à la suite d'escarmouches dans une banlieue de Damas à majorité druze et chrétienne, Israël avait brandi la menace d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.
Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie.
Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui inclurait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.
Les pourparlers étaient sur le point d'aboutir, mais des "pressions israéliennes" sur certaines des parties ont empêché la conclusion d'un accord final, a affirmé à l'AFP une source proche de ces pourparlers qui n'a pas voulu être identifiée.
"Soutenir Chareh"
Walid Joumblatt a rappelé que sous le mandat français, il y a une centaine d'années, "la Syrie avait été divisée en quatre entités: "un État alaouite, un État druze, l'État de Damas et l'État d'Alep", tous deux sunnites.
"Les druzes, avec les autres nationalistes syriens, ont pu empêcher alors la division de la Syrie en lançant une révolte contre la puissance mandataire et le projet avait échoué au bout de quelques années", a-t-il poursuivi.
M. Joumblatt espère qu'une division de la Syrie, que la guerre civile a morcelée en zones d'influence, "pourra aujourd'hui être évitée".
"Il faut soutenir Ahmad el-Chareh", le nouveau dirigeant syrien, a-t-il lancé à l'adresse des dirigeants arabes.
Le chef druze a été le premier responsable libanais à se rendre en Syrie en décembre pour rencontrer son nouveau dirigeant, qui lui a assuré que son pays n'exercerait plus "une influence négative" sur le Liban voisin.
Le meurtrier de Kamal Joumblatt
Interrogé sur l'arrestation du meurtrier de son père, un général de l'ex-armée syrienne, par les nouvelles autorités à Damas, il a affirmé qu'il ne compte pas demander son extradition.
Ibrahim Houweïja, ancien chef des renseignements de l'armée de l'air en Syrie, avait été arrêté le 6 mars dans le nord-ouest de la Syrie.
"C'est un grand criminel, il a également commis des crimes à l'égard du peuple syrien et doit être jugé en Syrie", a dit Walid Joumblatt.
Figure incontournable de la politique libanaise depuis près de 45 ans, le chef druze a affirmé par ailleurs que les nouvelles autorités libanaises sont sous pression depuis la fin de la guerre meurtrière entre le Hezbollah, soutenu par l'Iran, et Israël.
"Les Américains veulent que le Liban normalise ses relations avec Israël", a-t-il avancé, affirmant que Washington "ne fournira pas d'aide à l'armée libanaise" avant le désarmement du Hezbollah et cette normalisation.
Commentaires