
La Chine demeure la principale menace étatique pour les États-Unis, mais le rapprochement entre Pékin, Moscou, Téhéran et Pyongyang constitue aussi un facteur croissant d'inquiétude, souligne la communauté du renseignement américain dans son dernier rapport annuel.
Ces pays sont parfois regroupés sous l'acronyme "Crink" (China, Russia, Iran, North Korea en anglais).
"La Chine est notre concurrent le plus performant", a résumé mardi la cheffe du renseignement américain Tulsi Gabbard lors d'une audition devant le Sénat sur ce rapport intitulé "Évaluation annuelle des menaces", qu'elles soient militaire, économique, technologique, cyber ou spatiale.
La progression de la Chine dans tous les domaines est identifiée depuis de longues années par les États-Unis comme la principale menace. Elle est à l'origine du "pivot vers l'Asie" des priorités stratégiques américaines amorcé sous la présidence de Barack Obama.
"La Chine représente la menace militaire la plus importante pour la sécurité nationale des États-Unis. L'Armée populaire de libération (APL) est en mesure d'agir sur un spectre complet de conflit, pour contrer l'intervention des États-Unis dans une crise régionale, projeter sa puissance à l'échelle mondiale, et sécuriser ce que Pékin revendique comme son territoire souverain", selon le rapport, qui compile les évaluations des différentes agences de renseignement américaines.
La Chine est actuellement "en mesure de conduire des frappes conventionnelles de longue-portée" contre les territoires américains du Pacifique, comme Guam, Hawaï ou l'Alaska, et "pourrait envisager le développement de missiles intercontinentaux à charge conventionnelle" qui lui permettraient de frapper le territoire continental des États-Unis.
Elle continue aussi de moderniser et d'accroître ses capacités nucléaires.
Dans le domaine cyber, la Chine demeure la menace "la plus active et la plus persistante" pour le gouvernement américain, le secteur privé et les réseaux d'infrastructures critiques", poursuit le rapport. Elle "a éclipsé la Russie en tant que leader spatial et est prête à concurrencer le leadership mondial des États-Unis".
Malgré tout, la Chine est plus "prudente" que les autres compétiteurs, ne voulant pas apparaître "trop agressive".
Leçons tirées de l'Ukraine
Le renseignement américain met aussi en garde contre la coopération croissante entre les Crinks "qui s'est accélérée ces dernières années, renforçant les menaces émanant de chacun individuellement et lançant de nouveaux défis à la puissance américaine à l'échelle mondiale".
"Cet alignement augmente les risques de tensions ou de conflits entre les États-Unis et l'un de ces adversaires, entraînant un autre adversaire" dans un risque d'engrenage, selon le rapport.
Toutefois, cette coopération des Crink est "inégale et principalement motivée par un intérêt commun à contourner ou à affaiblir la puissance américaine" et a été modérée par "la volonté de contrôle de l'escalade, ainsi que des intérêts politiques divergents".
Au sein des Crink, "la coopération entre la Chine et la Russie est celle qui peut potentiellement représenter la menace la plus persistante pour les intérêts américains".
Moscou et Pékin affirment qu'une "amitié sans limites" les unit et ont beaucoup renforcé leur coopération depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie en 2022 et les tentatives des pays occidentaux d'isoler Moscou.
Plus largement, cette guerre et les sanctions occidentales ont fait de Moscou "un catalyseur" pour les Crink, puisque la Russie "est plus dépendante d'autres pays pour atteindre ses objectifs, en Ukraine, mais pas uniquement".
Moscou a notamment renforcé sa coopération avec l'Iran pour acquérir de très nombreux drones qu'elle utilise pour bombarder l'Ukraine, et avec la Corée du Nord qui lui fournit du matériel et des soldats.
Le rapport souligne par ailleurs la "résilience" de la Russie face à la guerre et aux sanctions, et met en garde contre les enseignements tirés par la Russie de sa confrontation aux matériels et renseignements occidentaux, qu'elle pourrait partager.
"Cette expérience remettra probablement en question la planification future de la défense américaine, y compris face à d'autres adversaires avec lesquels Moscou partage ces enseignements", selon le rapport.
Outre les menaces étatiques, le rapport du renseignement américain se penche aussi sur les cartels de la drogue, qui sont dans le collimateur de l'administration Trump, sur les groupes jihadistes et sur d'autres organisations criminelles transnationales.
Avec AFP
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