Le président de la République, Joseph Aoun, a entamé lundi les consultations avec les députés, au palais de Baabda, en vue de la nomination d’un Premier ministre. Il avait annoncé la tenue de ces consultations parlementaires au lendemain de son élection jeudi, procédure conforme à la Constitution libanaise.
Que stipule ce texte concernant la procédure de désignation du Premier ministre? Quelles sont les modalités d’une telle démarche?
L’article 53 de la Constitution libanaise dispose que “le président de la République nomme le chef du gouvernement désigné, après consultation du président de la Chambre des députés, sur la base de consultations parlementaires impératives dont il l’informe officiellement des résultats”. Au terme de cette étape, le président de la République “promulgue seul le décret de nomination du président du Conseil des ministres”, selon le même article.
Ceci est la version amendée de l’article 53 de la Constitution, auquel ont été apportées des réformes, selon le document de l’entente nationale ou accord de Taëf, conclu le 21 septembre 1990. Avant cette date, le président de la République avait le pouvoir de nommer et de révoquer les ministres parmi lesquels il désigne un président du Conseil des ministres.
Au sein du système confessionnel de partage du pouvoir au Liban, ce poste est réservé à un musulman sunnite. La personnalité qui obtient une majorité absolue de soutiens parmi les députés (soit 65 députés sur 128) est nommée au poste de Premier ministre. Celui-ci serait chargé de la formation d’un nouveau gouvernement.
Considérations pratiques
À la lumière du texte de la Constitution, on peut s’interroger sur le rôle du président de la République et ses prérogatives dans le mécanisme de désignation du chef de l’Exécutif.
Paul Morcos, avocat et président de la fondation juridique Justicia, a expliqué à Ici Beyrouth qu’il revient, tout d’abord, au président d’organiser les consultations parlementaires menant au choix du Premier ministre. À cet égard, Me Morcos a précisé qu’il s’agit d’un choix et non d’un processus électoral. En d’autres termes, les députés sont amenés à effectuer un choix, en concertation avec le président de la République.
Dans cette perspective, Me Morcos s’est penché sur les interprétations selon lesquelles le président serait juste un intermédiaire ou un relais dans cette procédure. L’ancien Premier ministre, Saëb Salam, avait souligné, en 1966, avoir défendu le choix du président Charles Hélou, ayant nommé Abdallah al-Yafi à la tête de l’Exécutif. “Le président n’est ni une boîte aux lettres ni une urne électorale”, avait-il lancé aux détracteurs du président. Ce discours a été repris en 1998 par le chef du Parlement, Nabih Berry, puis en 2020 par Salim Jreissati, alors ministre sortant d'État chargé des Affaires de la présidence de la République.
À son tour, Me Morcos a précisé que le président n’est pas qu’“une simple calculatrice pour comptabiliser les choix des députés”. Il joue un rôle de partenaire actif dans le cadre des consultations en guidant, ajustant les choix des parlementaires, ou encore en les mettant en garde contre un choix qu’il verrait inconvenable. Il peut ainsi être favorable ou non à l’égard d’une personne, ou proposer un nouveau nom. Dans tous les cas, “il ne peut prendre des décisions à la place des députés”, explique l’avocat.
Selon lui, l’enjeu principal est de choisir un chef de Cabinet en fonction de sa capacité à former un gouvernement qui puisse obtenir la confiance du Parlement. Sur ce point, la vision du président est importante. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il en discute également avec le président de la Chambre.
Finalement, il revient au président de la République de confirmer officiellement cette décision en la promulguant par un décret de nomination, comme stipulé dans l’article 53 de la Constitution.
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