Quid du cessez-le-feu?
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L’incertitude persiste quant au devenir du cessez-le-feu entre le Hezbollah et Israël. Alors que les négociations diplomatiques se poursuivent, et malgré les récentes déclarations de l’envoyé spécial américain Amos Hochstein en faveur du retrait israélien du Liban-Sud, les progrès vers une accalmie sur le terrain restent minimes. Les deux camps continuent de s’accuser mutuellement de violations répétées.

Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré, dimanche dernier, que "si les combattants du Hezbollah ne se retirent pas au nord du fleuve Litani, il n’y aura pas d’accord et Israël sera contraint d’agir unilatéralement pour assurer le retour en toute sécurité des habitants du nord d’Israël dans leurs foyers". De son côté, le secrétaire général du Hezbollah, Naïm Kassem, a affirmé être "prêt à répondre aux violations israéliennes". Il a précisé que "la décision concernant la riposte, sa méthode et les armes utilisées appartient au commandement de la résistance... Rien ne nous oblige à patienter au-delà ou en deçà des soixante jours spécifiés par l’accord du cessez-le-feu".

Selon l’accord de cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre dernier, l’armée libanaise et les Casques bleus de l’ONU doivent se déployer dans le sud du Liban, tandis que l’armée israélienne doit se retirer sous 60 jours. L’accord stipule également le retrait du Hezbollah jusqu’à 30 km de la frontière israélienne. Où en est l’application de cet accord? Quelles perspectives une fois les 60 jours écoulés? La trêve pourrait-elle être renouvelée?

Contacté par Ici Beyrouth, le général à la retraite Khalil Hélou souligne que "l’accord de cessez-le-feu n’a toujours pas été appliqué. Côté libanais, le déploiement de l’armée au Liban-Sud reste limité et lent, tandis que le Hezbollah ne s’est pas retiré à 30 km au nord du Litani, contrairement à ses engagements via ses représentants politiques". Il ajoute que "l’armée israélienne a violé cet accord à plusieurs reprises, continuant de cibler des positions, des individus et des passages frontaliers entre le Liban et la Syrie, qu’elle considère comme des menaces, conformément à des ententes orales annexes".

Un texte de "garanties" américaines, présenté par Washington à Israël en parallèle de l’accord entre Beyrouth et Tel-Aviv, stipule notamment que les États-Unis "reconnaissent le droit d’Israël à répondre aux menaces depuis le territoire libanais, conformément au droit international".

Le Hezbollah semble vouloir maintenir un certain statu quo. Le général Hélou estime qu’il "n’a pas procédé à un retrait pour des raisons politiques internes et régionales". Il ajoute: "Bien que le discours de la ‘résistance’ et de victoire continue de prévaloir, le Hezbollah ne pourra plus se réarmer aussi facilement qu’avant. De plus, il n’est pas enclin à engager une nouvelle guerre avec Israël, qui serait une fois de plus désastreuse pour lui." Il note également qu’"Israël a pris le contrôle de nouvelles zones stratégiques en Syrie, notamment dans le sud de la chaîne de l’Anti-Liban, pour des raisons de sécurité mais aussi à des fins expansionnistes".

L’avenir de la trêve dépend aussi des développements régionaux. Selon le général Hélou, “une éventuelle frappe contre les installations nucléaires iraniennes pourrait pousser le Hezbollah à attaquer Israël en utilisant le reste de son arsenal”. Il souligne toutefois qu’il subsiste des inconnues quant aux intentions des dirigeants en Israël, en Iran et aux États-Unis.

Une source diplomatique a indiqué à Ici Beyrouth que "le texte du cessez-le-feu mentionne uniquement 60 jours et n’inclut pas de renouvellement automatique." Il s’agit d’"un accord hybride, ad hoc, qui n’est ni définitif ni juridiquement contraignant." Tout changement après la date du 27 janvier devra faire l’objet de nouvelles négociations, probablement sous médiation américaine et française. La même source précise que "le mécanisme d’observation de la trêve est indépendant de la Finul bien qu’il soit lié à la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU. Cette résolution ne prévoit pas de lien direct entre la Finul et le mécanisme d’observation". Elle insiste sur "l’importance de parvenir à l’application définitive de la résolution 1701", en abordant notamment les 13 points litigieux le long de la frontière libano-israélienne.

Le journaliste et expert juridique Youssef Diab souligne, dans un entretien avec Ici Beyrouth, que "Netanyahou avait reçu un feu vert politique des Américains pour rester au Liban-Sud et avait même évoqué la création d’une zone tampon, non prévue dans l’accord". Diab estime que la trêve pourrait être prolongée, mais qu’elle ne serait pas acceptée par le tandem chiite Hezbollah-Amal, qui se trouverait dans une position délicate vis-à-vis de sa population, 60 villages étant encore interdits d’accès par les forces israéliennes. Il prévient qu’une "prolongation de la trêve sans garanties internationales pourrait avoir des répercussions négatives sur le Liban".

Diab souligne également que l’accord "prévoit le droit d’Israël à l’autodéfense, mais un autre accord non officiel aurait été signé avec le président du Parlement, Nabih Berry, autorisant Israël à mener des opérations aériennes sur tout le territoire libanais en cas de menace sécuritaire ou de réarmement du Hezbollah".

Il est important de noter que le texte des "garanties" américaines stipule que "les survols israéliens du Liban seront effectués uniquement à des fins de renseignement, de surveillance et de reconnaissance, et devront être aussi discrets que possible, sans franchir le mur du son".

Enfin, Diab estime que "tous les scénarios restent envisageables si un président de la République n’est pas élu pour appliquer sérieusement la résolution 1701".

 

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