À Gaza, les déplacés meurent de froid dans des tentes de fortune
Des hommes épongent l'eau de pluie qui a inondé l'annexe de la tente médicale du complexe médical Nasser à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, en raison d'une tempête de pluie, le 31 décembre 2024. ©Bashar Taleb / AFP

Devant sa tente au cœur de la bande de Gaza, Yahya el-Batran allume un feu pour tenter de se réchauffer avec ses enfants et son épouse, quelques jours après la mort de leur nourrisson à cause du froid, selon des médecins.

Joumaa est décédé dans la tente de la famille à Deir el-Balah vingt jours seulement après sa naissance. Ali, son jumeau, est au service des soins intensifs à l'hôpital Nasser, dans le sud du territoire assiégé et dévasté par la guerre entre Israël et le Hamas palestinien.

Complètement démunie, la famille Batran, déplacée par la guerre, vit dans une tente de fortune à Deir el-Balah, faite de couvertures et de tissus usés. Ces dernières semaines, les températures ont chuté à 8 degrés Celsius accompagnées de fortes pluies.

"Nous n'avons ni couvertures suffisantes, ni vêtements adaptés. J'ai vu mon bébé commencer à geler, sa peau est devenue bleue, puis il est mort", se lamente Noura Al-Batran, 38 ans, encore convalescente après son accouchement.

Ses jumeaux sont nés prématurés. "J'ai prévenu le médecin qu'il n'y avait pas de chauffage là où nous vivons, mais il a décidé de les faire sortir de la couveuse."

"J'ai fui les bombardements avec mes enfants pour les protéger des bombardements et maintenant ils meurent ici de faim et de froid?", s'emporte le père, Yahya al-Batran, 44 ans.

"Mourir sous nos yeux"

Comme des centaines de milliers d'autres Gazaouis, la famille El-Batran a été plusieurs fois déplacée par les combats et les bombardements qui ont détruit une grande partie de la bande de Gaza.

Les déplacés vivent dans des tentes de fortune et souffrent d'un manque de nourriture, de carburant et de médicaments, l'ONU mettant en garde depuis des mois contre la famine dans ce territoire pauvre et surpeuplé.

Yahya el-Batran, qui a fui avec son épouse, ses enfants et ses parents invalides Beit Lahia (nord), confie avoir donné aux jumeaux les noms de deux neveux tués dans des bombardements israéliens.

"Nous regardons nos enfants mourir sous nos yeux", dit-il avec amertume.

Dimanche, le ministère de la Santé à Gaza a annoncé "la mort en raison du froid" de Joumaa al-Batran, et fait état le lendemain de sept enfants morts de froid en une semaine.

Dans un coin de la tente des Batran, érigée avec des centaines d'autres dans une palmeraie, Yahya embrasse trois de ses enfants sur un tapis détrempé par la pluie.

Il pose ensuite une petite casserole d'eau sur le feu pour préparer du thé qu'il mélange à du pain sec. Avec un peu de fromage et de thym, cela tiendra lieu de déjeuner pour toute la famille.

"Mes enfants meurent de faim et de froid", pleure son épouse.

"Gelée"

À Khan Younès, plus au sud, Mahmoud el-Fassih raconte avoir retrouvé sa petite fille Sila "gelée" dans leur tente du secteur d'al-Mawassi, où il s'est réfugié après avoir fui Gaza-ville (nord).

Il l'a emmenée aux urgences, mais elle était déjà décédée.

Le docteur Ahmad el-Farra, directeur du service des urgences et pédiatrie de l'hôpital Nasser, a expliqué à l'AFP que le bébé de trois semaines était arrivé à l'hôpital "en hypothermie sévère, sans signes vitaux, avec un arrêt cardiaque ayant entraîné son décès".

Le service de presse du gouvernement du Hamas à Gaza a mis en garde lundi contre l'impact d'une dépression météorologique sévère prévue dans les jours à venir, qui constitue une "menace réelle pour deux millions de déplacés".

Le docteur Farra alerte sur la possibilité d'une augmentation des décès parmi les enfants, nourrissons et personnes âgées.

Agée de 20 jours, Aïcha al-Qassas, est également morte de froid à al-Mawassi, selon sa famille.

"À Gaza, tout mène à la mort", déplore Mohamed al-Qassas, son oncle. "Ceux qui ne meurent pas sous les bombardements israéliens succombent à la faim ou au froid".

Avec AFP

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