Selon le dernier rapport de la Banque mondiale (BM) sur l'économie du Liban (LEM), publié mardi, la croissance réelle du PIB du Liban a été réduite d'environ 6,6% en 2024 en raison du conflit entre le Hezbollah et Israël, ce qui porte le déclin cumulé du PIB réel depuis 2019 à plus de 38%. Cette contraction croissante reflète l'impact dévastateur des déplacements massifs, des destructions et de la baisse de la consommation privée. Elle exacerbe aussi les défis macroéconomiques non résolus et souligne le besoin urgent de réformes globales et d'investissements ciblés dans les secteurs critiques comme seule voie viable après le conflit.
L'édition d'automne 2024 du LEM intitulée “Des fardeaux qui pèsent sur un pays en crise” prévoit une contraction de l'activité économique de 5,7% en 2024, ce qui équivaut à une perte de 4,2 milliards de dollars américains en consommation et en exportations nettes. La section “Dossier spécial” du rapport examine l’impact du conflit sur l’économie libanaise en analysant les chocs sur la consommation et les exportations nettes, en particulier les exportations de services provenant des recettes du tourisme, un pilier essentiel de l’économie libanaise, à la suite de l’escalade de la guerre entre Israël et le Hezbollah à la mi-septembre 2024. Elle développe un scénario contrefactuel dans lequel, en l’absence de conflit, le PIB aurait augmenté, quoique timidement, de 0,9% en 2024.
“Le conflit a porté un nouveau coup sévère à l’économie libanaise, déjà en proie à une grave crise. Il rappelle brutalement la nécessité urgente de réformes globales et d’investissements ciblés pour éviter de nouveaux retards dans la prise en compte des priorités de développement de longue date”, a déclaré Jean-Christophe Carret, directeur des opérations de la Banque mondiale pour le Moyen-Orient. “Alors que le Liban se lance dans l’élaboration de son plan de redressement et de reconstruction postconflit, un programme de stabilisation économique et un programme ambitieux de réformes visant à renforcer la gouvernance seront essentiels pour attirer les financements nécessaires en vue de mettre le pays sur la voie d’un redressement durable à long terme”, a-t-il ajouté.
Le LEM constate que les principaux indicateurs économiques du Liban, notamment la croissance du PIB, l’inflation, le solde budgétaire et les déficits commerciaux, sont de plus en plus orientés à la baisse. Il met en évidence la fragilité de la stabilité du taux de change, observée depuis août 2023, qui a un coût d’opportunité élevé. Cette stabilité repose sur une augmentation des recettes, des restrictions budgétaires et des restrictions de dépenses, ce qui se traduit par des excédents non dépensés du secteur public malgré la demande croissante de dépenses et d’investissements essentiels. Le conflit menace davantage cette stabilité fragile, parce que des dépenses accrues sont nécessaires pour soutenir les services publics et les efforts de relance. Cela pourrait entraîner une augmentation de la circulation monétaire ou un nouvel épuisement des réserves de change liquides restantes.
Selon le rapport, la situation budgétaire du Liban est susceptible de se détériorer davantage en raison des besoins de financement croissants pour garantir les services essentiels et répondre aux demandes urgentes, aggravés par une baisse potentielle des recettes fiscales, notamment de la TVA. L’accès au financement étant entravé par le défaut souverain, une restructuration complète de la dette est essentielle pour retrouver l’accès aux marchés internationaux des capitaux afin de permettre au pays de relever ses défis multiformes. La stabilité macroéconomique, l’amélioration de la gouvernance, le renforcement des services publics et le renforcement du capital humain demeurent des priorités essentielles. Des investissements ciblés sont indispensables pour soutenir des réformes durables, faciliter la reprise des services de base et reconstruire le stock de capital endommagé du Liban.
Le rapport s’appuie également sur des données innovantes et des analyses contextuelles pour explorer les défis économiques du pays. Il utilise Night-time Lights (NTLs) comme outil à haute fréquence et facilement disponible pour analyser l’activité économique du Liban. Il examine également le pouvoir d’achat d’un salarié hypothétique dont le revenu est entièrement libellé en dollars depuis 2019, en le comparant au pouvoir d’achat d’un salarié en livres libanaises sur la période 2019-2024.
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