Dans son premier film Diamant Brut, Agathe Riedinger dresse un portrait sans concession d'une génération en quête de reconnaissance sur les réseaux sociaux. Une critique sociale portée par l'interprétation intense de Malou Khebizi, révélation des César 2025.
Diamant Brut, premier long-métrage d'Agathe Riedinger, plonge dans l'univers des réseaux sociaux et en révèle les travers. Portée par l'interprétation authentique de Malou Khebizi, cette œuvre naturaliste dresse un constat sans concession d'une société où l'image et la popularité virtuelle règnent en maîtres. Sans pour autant porter de jugement sur ses protagonistes, la réalisatrice met en lumière les rouages d'un système qui broie les individus dans son engrenage impitoyable.
Le film suit le parcours de Liane, incarnée par Malou Khebizi dans son premier rôle au cinéma. Cette jeune femme à peine sortie de l'adolescence rêve d'échapper à la misère en participant à un jeu de téléréalité. Dans son monde, la réussite se mesure en nombre de followers sur Instagram. Son corps, maquillé et tatoué, devient à la fois un outil promotionnel et l'expression de sa féminité.
Agathe Riedinger explore avec justesse les thèmes de la lutte des classes, des jeux de pouvoir et de séduction. "C'est un film sur le besoin d'amour", explique-t-elle. "Liane réunit tous les archétypes de la jeune femme sur laquelle on va coller une étiquette de bimbo décérébrée, qu'on va mépriser".
Mais la réalisatrice refuse de juger ses personnages. "Considérer que la téléréalité, c'est de la télé-poubelle, c'est un concentré de mépris de classe, pour les candidats et pour les spectateurs", affirme-t-elle. "Pour des gens qui n'ont pas forcément accès aux études, à l'emploi, c'est une solution que la société a fabriqué et dont ils se saisissent".
Malou Khebizi se reconnaît dans ce parcours. "C'est des problématiques que j'ai pu connaître dans ma vie, de besoin de reconnaissance, de venir d'un milieu où l'on ne nous donne pas tous les outils pour réussir", confie-t-elle. "Être désirable, c'est la seule chance qu'on donne aux femmes pour réussir. Elle en fait son arme".
Le film expose ainsi les rouages d'une société où les réseaux sociaux peuvent être aussi émancipateurs que cruels. La quête de célébrité devient une alternative au chômage, un moyen de gagner de l'argent rapidement. Mais cette mécanique impitoyable, entre voyeurisme et chacun pour soi, broie ceux qui s'y engagent.
Diamant Brut réussit le pari d'un cinéma social engagé, ancré dans son époque. Sans jugement ni condescendance, il dresse le portrait d'une génération en quête de reconnaissance, prête à tout pour échapper à sa condition. Un miroir tendu à une société qui fabrique des illusions et se repaît du spectacle de leur destruction.
Porté par l'interprétation intense de Malou Khebizi, nommée aux Révélations des César 2025, le film marque également l'éclosion d'une cinéaste prometteuse. Agathe Riedinger signe un premier long-métrage maîtrisé, qui interroge avec acuité les dérives de notre époque. Un diamant brut qui ne demande qu'à être poli.
Avec AFP
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