Mpox en Afrique: prévenir une pandémie, coûte que coûte
Un professionnel de santé administre le vaccin contre le mpox à un membre du personnel hospitalier lors du lancement de la campagne de vaccination à l'Hôpital Général de Goma, le 5 octobre 2024. ©Aubin Mukoni / AFP

Le coup d'envoi des campagnes de vaccination contre le mpox a été donné en République démocratique du Congo. Bien que cette initiative constitue une étape cruciale, elle demeure néanmoins insuffisante pour répondre à l'ampleur croissante de l'épidémie en cours.

La République démocratique du Congo (RDC) a récemment marqué un tournant significatif dans la lutte contre le mpox, une maladie virale potentiellement mortelle. En effet, elle a lancé, le 5 octobre, une campagne de vaccination contre cette maladie, en réponse à une flambée épidémique préoccupante qui a touché le continent africain, et plus particulièrement la région du bassin du Congo. Cependant, la variole simienne est loin d’être un phénomène récent en Afrique; elle est, en effet, endémique dans les forêts du centre de l'Afrique tropicale. Isolé en 1958 sur des macaques, le virus a été, pour la première fois, détecté chez l'homme en RDC en 1970, alors que la maladie n'était encore qu'un phénomène sporadique. Dès lors, plusieurs épidémies ont été signalées, principalement en Afrique. Deux récentes flambées, survenues en 2022 et 2024, classées comme des urgences de santé publique de portée internationale (USPPI), suscitent toutefois de grandes inquiétudes.

Dynamiques de transmission

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a identifié deux groupes distincts de virus: le “clade I” (ou clade centrafricain), principalement observé dans le bassin du Congo, et le “clade II” (ou clade ouest-africain), qui sévit, comme son nom l’indique, en Afrique de l'Ouest. En 2022, la recrudescence de la maladie est due au clade II. Les hommes homosexuels et bisexuels sont les plus affectés, mettant en lumière des dynamiques de transmission qui passent souvent par des contacts rapprochés. L'OMS lève son alerte en mai 2023 après avoir recensé 87.400 cas et 140 morts. En 2024, une nouvelle flambée épidémique est signalée, notamment en RDC, avec deux épidémies concomitantes: l'une causée par le “clade I”, touchant principalement des enfants, et l'autre liée à l'émergence d'un nouveau sous-groupe, qu’on baptisera le “clade 1b”. Ce dernier se propage alors parmi les adultes dans l'est de la RDC, mais également ‒ dans une moindre mesure ‒ dans les pays limitrophes tels que l'Ouganda, le Rwanda, le Burundi et le Kenya.

Campagnes de vaccination

D'après les statistiques du Centre africain de contrôle et de prévention des maladies (Africa CDC), publiées le 3 octobre, plus de 34.000 cas ont été confirmés en Afrique depuis le début de l'année, avec 70% des décès survenant chez les enfants de moins de cinq ans. Le Dr Jean Kaseya, directeur général de l'Africa CDC, avait alors averti que “l'épidémie n'est pas sous contrôle”, soulignant les défis persistants dans la gestion de cette crise sanitaire. Le Rwanda a inauguré, le 17 septembre, la toute première campagne de vaccination en Afrique. En revanche, le déploiement tant attendu du vaccin en RDC s'est finalement concrétisé, le 5 octobre, grâce à l'arrivée de 265.000 doses fournies par l'Union européenne et les États-Unis. Cette initiative revêt une importance particulière dans un pays où la pauvreté limite l'accès aux soins. Elle marque “une étape importante pour limiter la propagation du virus”, selon le Dr Matshidiso Moeti, directeur régional de l'OMS pour l'Afrique, cité dans un communiqué.

Le mpox existe

Les opérations de vaccination ont démarré à Goma, une ville de l’est de la RDC, où les autorités locales, soutenues par l'OMS et des ONG, ont mobilisé des ressources pour sensibiliser la population aux gestes barrières. Le lancement de ces compagnes a été accompagné par un message clair: “Le mpox existe.” Pour l’instant, ces dernières ne s’adressent qu’aux adultes tandis que les enfants, profondément touchés par cette épidémie, en sont exclus. Le vaccin en question a été conçu par le laboratoire danois Bavarian Nordic. Il s'agit d'un vaccin vivant atténué contre la variole et le mpox, élaboré à partir de virus vivants modifiés de la vaccine Ankara. À l'origine, il avait été approuvé pour les adultes, mais le 19 septembre, l'Agence européenne des médicaments a recommandé d'étendre son indication aux adolescents âgés de 12 à 17 ans.

Aide insuffisante

Les vaccins contre la variole humaine (dont le virus est apparenté à celui du mpox) offrent une protection contre la variole simienne. Cependant, depuis l’éradication de la variole en 1980, la vaccination systématique a été interrompue. Toutes les personnes âgées de moins de 40 ans seraient donc vulnérables aux deux virus. En outre, en Afrique, plus de 70% de la population a moins de 40 ans, ce qui rend le continent particulièrement vulnérable aux épidémies de mpox. Les principaux défis à l'accès aux vaccins dans le Continent noir comprennent leur coût élevé, les restrictions liées à la propriété intellectuelle qui entravent leur production locale et le manque de mécanismes de solidarité à l'échelle mondiale. D’après un éditorial publié le 3 octobre dans Science, le Fonds de lutte contre les pandémies, hébergé par la Banque mondiale, aurait apporté une aide insuffisante et tardive pour faire face au mpox. De plus, aucun engagement des fabricants n'a, pour le moment, été pris pour produire suffisamment de doses à des prix abordables pour les pays africains.

Le défi de l’épidémie de mpox ne se limite pas à la RDC ou à l'Afrique. C'est un problème global qui exige une attention collective, aujourd’hui plus que jamais. Les vaccins, bien que cruciaux, ne représentent qu'une partie de la solution. Il est impératif d'intensifier les efforts de dépistage, de traçage des contacts et de sensibilisation communautaire. Des recherches supplémentaires et des collaborations scientifiques sont nécessaires pour mieux comprendre les mécanismes moléculaires et biologiques en jeu, afin de développer des traitements efficaces. La communauté internationale se doit d’agir pour éviter, coûte que coûte, que cette épidémie en Afrique ne devienne une pandémie.

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