Kiev de nouveau la cible des missiles russes


 

Des missiles russes ont touché dimanche un complexe résidentiel proche du centre de Kiev, faisant un mort et plusieurs blessés selon les autorités, quelques heures avant l'ouverture d'un sommet du G7 en Allemagne où il était largement question de l'Ukraine.

"Un homme a été tué, il n’avait que 37 ans. Il y a des blessés, dont une fille appelée Genya, elle a sept ans et elle est la fille du défunt (...) Sa mère a également été blessée. Elle est citoyenne russe. Rien ne le menaçait dans notre Etat, elle était en toute sécurité jusqu’à ce que la Russie décide que tout lui est hostile" en Ukraine, a déclaré le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans son message vidéo du soir.

Plusieurs explosions ont retenti à l'aube dans la capitale ukrainienne, épargnée par les bombardements russes depuis début juin. Dans un quartier principalement résidentiel mais qui compte aussi une usine d'armement, une équipe de l'AFP a vu les trois derniers étages d'un immeuble en feu, sa cage d'escalier détruite.
14 missiles de croisière

Les frappes visaient une usine de production de missiles, selon Moscou, qui a qualifié de "fausses" les affirmations selon lesquelles elles avaient touché une zone résidentielle.

L'usine d'armement Artiom, "en tant qu'infrastructure militaire, était la cible", a déclaré le ministère russe de la Défense dans un communiqué, affirmant que les dégâts causés à un immeuble résidentiel voisin étaient dus à un missile ukrainien de défense antiaérienne.



Un porte-parole de l'armée de l'air ukrainienne a indiqué que les missiles, "probablement des X101", avaient été tirés par des bombardiers russes TU-95 et TU-160 depuis la mer Caspienne.

"Un missile a été abattu par la défense antiaérienne dans la région de Kiev, les débris sont tombés sur un village", a déclaré le gouverneur de la région de Kiev, Oleksiï Kouleba, sur Telegram. Un député ukrainien, Oleksiï Gontcharenko, a affirmé sur Telegram que les Russes avaient tiré 14 missiles sur Kiev et sa région dans la matinée.

"Une partie des missiles ont été abattus. Mais seulement une partie", a souligné le président Zelensky, rappelant son "besoin d’une défense anti-aérienne puissante" et appelant ses partenaires à "avancer plus vite s’ils sont vraiment nos partenaires et non juste des observateurs". Sur le site de l'attaque, de nombreux habitants se trouvaient au pied des immeubles, beaucoup en pleurs.



"Il y a eu quatre missiles à partir de 06H30", a témoigné Edouard Chkouta, habitant juste à côté. Un immeuble "a été touché directement dans les derniers étages et j'ai vu de mes propres yeux des blessés sortir", a-t-il raconté.

"Ca fait trois fois qu'ils bombardent ici. Je me suis réveillé à la première explosion, je suis allé au balcon et j'ai vu des missiles tomber et entendu une explosion énorme, tout a vibré", a raconté à l'AFP Iouri, 38 ans.
"Barbarie"

Fin avril, un autre bombardement russe avait touché le même complexe résidentiel dans la capitale pendant une visite du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. Une journaliste ukrainienne de Radio Liberty avait été tuée dans son appartement.



Et "aujourd'hui, des civils à Kiev sont attaqués pendant que le G7 se réunit. (La Russie) comprend qu'il n'y a pas d'armes qui puissent nous faire peur, elle veut que le monde entier ait peur", a tweeté le ministre ukrainien de la Défense Oleksiï Reznikov.

Cette frappe russe a effectivement eu lieu quelques heures avant la rencontre des leaders des sept pays industrialisés (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni) dans un château des Alpes bavaroises, en Allemagne, mais également à deux jours d'un sommet de l'Otan, organisation honnie par la Russie, du 28 au 30 juin à Madrid.

Le président américain Joe Biden a qualifié de "barbarie" l'attaque sur Kiev. Le Premier ministre britannique Boris Johnson a mis en garde le président français Emmanuel Macron (dont le pays préside encore l'UE pour quelques jours) contre toute tentative de négocier "maintenant" avec Moscou une paix en Ukraine. Et les deux hommes ont dit voir encore une possibilité de "renverser le cours" de la guerre, selon Downing Street.




M. Biden, qui est arrivé samedi soir en Europe et participera ensuite au sommet de l'Otan, est bien décidé à consolider, et sur la durée, les rangs occidentaux face à Moscou.

Boris Johnson avait également appelé samedi les dirigeants du G7 à ne pas "abandonner l'Ukraine", prévenant contre toute "fatigue" dans le soutien à Kiev et annonçant une aide économique supplémentaire pouvant atteindre 525 millions de dollars, pour porter le total à 1,8 milliard.

"Tout signe de fatigue ou d'affaiblissement dans le soutien occidental à l'Ukraine jouera directement en faveur du président (russe Vladimir) Poutine", avait insisté Downing Street.

Dès l'ouverture du G7, quatre pays, dont M. Biden a déclaré qu'ils seraient rejoints par les trois autres, ont annoncé un embargo sur les importations d'or de Russie - la deuxième exportation russe après l'énergie, qui lui rapporte des dizaines de milliards de dollars.
Plus d'armes, plus de sanctions

Le gouvernement ukrainien a réclamé aux sept dirigeants réunis, dès l'ouverture du sommet, plus d'armes et de sanctions contre Moscou.

Après la frappe sur Kiev, "le sommet du G7 doit répondre par plus de sanctions contre la Russie et plus d'armes lourdes pour l'Ukraine", a exhorté sur Twitter Dmytro Kouleba, le chef de la diplomatie ukrainienne.



Le président Zelensky a estimé dimanche soir que "les leaders du G7 (...) ont un potentiel conjoint suffisant pour arrêter l’agression russe (...) Mais ce ne sera possible que lorsque nous obtiendrons tout ce que nous demandons et dans les délais nécessaires : et les armes, et le soutien financier, et les sanctions contre la Russie".

De son côté, le président russe Vladimir Poutine avait annoncé samedi que son pays allait "dans les prochains mois" livrer au Bélarus d'Alexandre Loukachenko des missiles capables de transporter des charges nucléaires. Les deux dirigeants ont aussi dit vouloir moderniser l'aviation bélarusse pour la rendre capable de transporter des armes nucléaires - des déclarations qui risquent de tendre davantage encore les rapports entre Moscou et les Occidentaux.
Severodonetsk rasée

Les forces russes ont obtenu samedi d'importants succès militaires dans l'est de l'Ukraine, s'emparant à l'issue d'une bataille acharnée de la ville stratégique de Severodonetsk et pénétrant dans celle voisine de Lyssytchansk.

Le gouverneur de la région de Lougansk, Serguiï Gaïdaï, a confirmé samedi soir l'occupation de Severodonetsk, soulignant que la ville était "détruite à 90%, il sera très difficile d'y survivre". Selon lui, les Russes ont nommé un "commandant" pour la cité dont il n'est possible de s'échapper "qu'à travers des territoires occupés".



Les séparatistes prorusses ont parallèlement déclaré être entrés avec les militaires russes à Lyssytchansk. "Des combats de rue s'y déroulent", ont-ils ajouté.

Cette progression sur le terrain est cruciale pour la Russie, qui veut conquérir l'intégralité du bassin industriel du Donbass, déjà partiellement aux mains des séparatistes prorusses depuis 2014.
"Séries anormales de frappes"

Par ailleurs, l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW) a observé "des séries anormales de frappes russes sur des zones de l'arrière". Il cite le commandement de l'armée de l'air ukrainienne selon lequel une cinquantaine de frappes ont été recensées samedi près de Kiev, Khmelnytskyï, Lviv (ouest), Tcherniguiv (nord), Mykolaïv (sud), Kharkiv (nord-est) et dans la région de Dniepropetrovsk (centre).

Kharkiv, deuxième plus grande métropole d'Ukraine, résiste à la pression des troupes russes depuis le début de l'offensive le 24 février, mais les missiles s'abattent à nouveau quotidiennement sur le centre-ville.

Et Moscou a déclaré dimanche avoir frappé trois centres d'entraînement militaires dans le nord et l'ouest de l'Ukraine, dont un situé près de la frontière polonaise.

Avec AFP

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