«Testostérone», un ménage scénique au théâtre Le Monnot
©Photo: Compte Instagram officiel du théâtre Le Monnot.


Dans sa pièce
Testostérone, l'artiste libanais Joe el-Khoury fait le grand ménage dans sa vie. Auteur, metteur en scène et interprète solo de cette œuvre théâtrale écrite en arabe libanais, il entreprend sur scène une introspection profonde et sans concession.

Sur les planches de l’ACT au théâtre Le Monnot, Joe el-Khoury convie les spectateurs de Testostérone dans sa chambre, celle d’une maison de ville. Loin de son village natal qui l’exaspère, il reste pourtant «religieusement» attaché à ses racines. Pour lui, franchir ce seuil représente un pas vers un nouvel avenir, une affirmation de soi, une forme de rébellion.
Photo: Compte Instagram officiel du théâtre Le Monnot.
«Dans ma chambre, une serpillière dans une main et une cigarette dans l’autre. C’est le chaos et le désordre partout, je suis frustré et mon taux de testostérone fluctue. Il est temps de faire un grand nettoyage, soit de la chambre, soit... dans ma vie. C’est drôle, n’est-ce pas?», résume-t-il sa pièce en quelques mots.

Durant environ une heure et demie, Joe el-Khoury égrène sur scène des souvenirs d’un passé rythmé par des anecdotes parfois poignantes, reflétant un vécu social masqué et des clichés relationnels. Du balai à l’éponge, d’une photo de Haïfa accrochée au mur à la voix de sa mère le rappelant à l’ordre, entre la psychologue et la Vierge Marie, entre TOC et TSPT, l’artiste se démène à faire le ménage, revenant sur les pas de son enfance. Devant un public à l’écoute, il mûrit au son de différents airs de musique. Il ose, sans pour autant dire ses quatre vérités. Cependant, il laisse parfois tomber sa pudeur, nouant son foulard autour de sa taille, sautant sur le lit, courant s’appuyer aux murs de la salle pour échapper aux bombes ou fuir «tante Jeannette» et brisant, par instants, le quatrième mur pour disperser le reste de sérieux.
Dans une scénographie aussi encombrée que les pensées qui trottent dans sa tête, Joe el-Khoury saisit son courage à deux mains et livre son texte avec des mouvements saccadés et des phrases bien rythmées, parfois inspirées des génies du monologue. Mais c’est sa touche personnelle que le public retient: son énergie débordante, son jeu «ludique» – à juste titre, ses mouvements déchaînés et libérés dès qu’il lâche prise, ses anecdotes lancées instinctivement, son mime frôlant le burlesque, ses clins d’œil au public, ses danses démesurées et les personnages qui le hantent.
Ce premier monologue, où Joe el-Khoury endosse plusieurs rôles, pourrait bien être l’ébauche d’un futur prometteur. L’homme qu’il est devenu s’envolera vers d’autres projets, si à force de ménage et de tri, il s’accroche scéniquement à sa valeur ajoutée et conserve précieusement la passion de la scène et cette même persévérance.
Au théâtre Le Monnot jusqu’au 27 juin 2024, à 19h.
 
Marie-Christine Tayah
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