Tours de contrôle frontalier: quelle réponse libanaise aux protestations syriennes?
Le Liban officiel est aujourd’hui devant un nouveau test qui porte sur sa capacité et sa volonté à faire primer l’intérêt national face aux tentatives de la Syrie de lui imposer le sien.

Plus de dix ans après leur installation, les tours de contrôle à la frontière avec la Syrie, gérées par l’armée libanaise et érigées par le gouvernement britannique, sont subitement devenues une source d’inquiétude pour le régime de Damas.

Celui-ci a récemment fait parvenir aux autorités libanaises un mémorandum dans lequel il proteste contre ces structures «qui présentent une menace pour la sécurité intérieure syrienne». L’argument des autorités syriennes est le suivant: «Le gouvernement israélien peut profiter des données qui parviennent aux autorités britanniques».

La réponse du Liban n’a pas tardé. Le ministre sortant des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib, toujours prompt à défendre les intérêts des autres, a assuré dimanche, lors d’une interview à une radio, qu’«il n’est pas question que ces tours deviennent des sources d’actes hostiles contre la Syrie».

Quid du Liban? Le ministre a rappelé que le but de leur installation est «de contrôler la frontière et d’empêcher les opérations de contrebande et la circulation de clandestins». Ce en quoi, on le sait, le Liban a échoué lamentablement, en l’absence d’une volonté politique de contrôler sérieusement les frontières.

Abdallah Bou Habib a expliqué que son département attend la réponse de l’armée libanaise au mémorandum syrien pour formuler à son tour la sienne. Il a indiqué, mais de manière très vague, que «les discussions au sujet de ces questions importantes sont engagées à très haut niveau, au plan interne, pour dégager les solutions appropriées de nature à préserver la stabilité du Liban».

Pour Georges Okais, la réponse la plus appropriée au mémorandum syrien, consiste à «ériger davantage de tours de contrôle et à renforcer le contrôle des frontières». En d’autres termes, il s’agit, pour le Liban, d’«exercer, même tardivement, sa souveraineté», a-t-il écrit sur son compte X, avant d’ajouter: «C’est seulement de cette façon qu’il est possible de répondre à ces insultes continues » de la part de la Syrie.


Il y a lieu de relever que les protestations syriennes interviennent alors qu’il est question, au cas où une trêve serait annoncée à Gaza, d’un règlement au Liban-Sud, qui impliquerait une ouverture du dossier des frontières passoires du Liban.

Lors de sa visite à Beyrouth, au début du mois de février, le ministre britannique des Affaires étrangères, David Cameron, avait proposé aux responsables libanais avec qui il avait discuté des formules possibles pour un règlement au Liban-Sud, l’installation de tours de contrôle à la frontière sud. Celles-ci seraient établies consécutivement à la mise en œuvre de la résolution 1701 du Conseil de sécurité et permettraient à l’armée libanaise de surveiller dans un rayon de cinq kilomètres le secteur des deux côtés de la frontière sud. David Cameroun avait expliqué que ce projet pourrait commencer au Sud et s’étendre ensuite à toutes les frontières libanaises, avec Israël et la Syrie.

Dans ce contexte, il faut préciser que la Syrie, qui n’a jamais voulu délimiter ses frontières avec le Liban, ni faciliter un règlement du contentieux frontalier avec Israël à Chebaa et Kfar Chouba, à la frontière sud, est le premier bénéficiaire de frontières poreuses.

Les Libanais l’ont surtout observé, à leurs dépens, lorsque la crise économique et financière a frappé le pays. Celle-ci a pratiquement financé l’économie syrienne, également en crise, grâce à la contrebande de produits subventionnés par l’État libanais.

Si des centaines de milliers de réfugiés économiques syriens se trouvent au Liban, c’est grâce aux nombreux passages frontaliers illégaux, qui servent de plus à la circulation des combattants et des armes du Hezbollah, le tout portant un coup sérieux à la souveraineté libanaise.

Reste à voir quelle va être la réponse du gouvernement au régime de Damas.
Commentaires
  • Aucun commentaire