Destructions des forêts du Akkar, l’État aux abonnés absents

 
Antoine Daher, président du Conseil de l’environnement à Kobeyate et au Akkar, a récemment tiré la sonnette d’alarme, déplorant le massacre d'arbres séculaires dans les forêts du Akkar, qui figurent au nombre des plus belles forêts du Liban et du Moyen-Orient. Dans une déclaration, M. Daher a fait appel au Premier ministre sortant Najib Mikati, aux ministres sortants de l’Environnement et de l’Agriculture, aux députés du Akkar, au mohafez du Akkar ainsi qu’aux responsables militaires et sécuritaires pour qu’ils interviennent et mettent fin à cette destruction.
M. Daher a dénoncé «les commerçants du bois qui coupent quotidiennement des arbres séculaires dans les montagnes du Akkar». «Cette pratique prive la région de sa beauté naturelle et porte atteinte à son potentiel en matière de santé, d’économie et de tourisme écologique, lit-on dans le texte. La région de Tarik al-Ingliz, située sur les hauteurs des montagnes du Akkar, est particulièrement touchée par cette déforestation massive.»
Des utilisations commerciales
Selon Khaled Taleb, militant écologiste et fondateur de l’association Darb Akkar, de nombreux arbres sont coupés à Qammoua pour des utilisations commerciales, notamment le genévrier élevé (Juniperus excelsa) et le sapin de Cilicie (Abies cilicica). «Parfois, l’armée ou la police municipale interviennent pour stopper ces coupes illégales, dit-il à Ici Beyrouth. Cependant, les régions victimes de ces braconnages sont souvent très éloignées et rarement habitées, ce qui rend les opérations de contrôle difficiles.»
Les forêts du Akkar, un joyau à préserver

M. Taleb a souligné que certaines personnes dépendent du bois pour se tenir au chaud, ce qui justifie une exploitation raisonnée des ressources forestières. Il propose «d’établir des usines de buchettes dans la région, mais il faut des ressources financières considérables pour cela». «Actuellement, il n’y a que deux usines à Andkit et à Menjez qui ne fonctionnent pas à leur capacité maximale, note M. Taleb. Il serait judicieux que chaque Fédération des municipalités du Akkar dispose de sa propre station de production de buchettes.»
De nombreux problèmes techniques
Bien que la situation soit grave, il existe un écart entre les plans élaborés et les actions réellement entreprises. «Les collectivités locales du Akkar sont confrontées à de nombreux problèmes techniques et logistiques pour mettre en place des mesures concrètes de protection de l’environnement», constate M. Taleb.
«Il est recommandé de conserver un ou deux arbres séculaires par hectare puisqu’ils servent de micro-habitats essentiels aux écosystèmes», explique de son côté Jean Stéphan, enseignant-chercheur en écologie et biodiversité à l’Université libanaise. «Les braconniers confondent souvent le genévrier élevé avec le très rare genévrier puant (Juniperus foetidissima), ce qui aggrave la situation, déplore-t-il. En éclaircissant les forêts de sapins, on perturbe l’ombre dont ces arbres ont besoin, ce qui nuit non seulement au sapin lui-même, mais également à la flore environnante, y compris des espèces rares telles que les pivoines, dont on en trouve deux espèces au Liban, la pivoine mâle (Paeonia mascula) et la pivoine du Kesrouan (Paeonia keserouenensis).»
Contacté par Ici Beyrouth, Antoine Daher affirme que «les noms des braconniers sont bien connus et les forces de l’ordre n’interviennent que très rarement sans prendre de mesures sévères». «Tous ce que nous pouvons faire pour l’instant c’est de médiatiser l’affaire et d’essayer de lutter à notre échelle pour préserver ce patrimoine national que sont les forêts du Akkar», lance-t-il.
La préservation des forêts du Akkar revêt une importance capitale à plusieurs égards. Sur le plan de la biodiversité, ces forêts abritent une multitude d’espèces végétales et animales, certaines étant même rares et menacées. Préserver ces écosystèmes permet de maintenir leur équilibre naturel et de garantir la survie de nombreuses espèces. Sur le plan environnemental, les forêts du Akkar jouent un rôle crucial dans la régulation du climat, la purification de l’air, la prévention de l’érosion des sols et la préservation des ressources en eau. De plus, dans un contexte de déforestation mondiale croissante, la protection de ces forêts contribue à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à lutter contre les changements climatiques. Il est donc impératif de prendre des mesures concrètes pour mettre fin à la déforestation et préserver ces précieux joyaux naturels du Akkar.
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